Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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photographie (suite)

Pour transformer l’image latente, qui est invisible, en une image visible, il convient de réduire le bromure d’argent insolé en le dissociant en argent métallique, qui fournira l’image négative, et en acide bromhydrique, qui sera neutralisé par des substances basiques contenues dans le révélateur. Beaucoup de substances sont utilisables comme révélateurs : les plus courantes sont le génol, l’hydroquinone, le phénidon, auxquelles on associe des substances stabilisantes, comme le sulfite de soude, qui retarde l’oxydation spontanée à l’air et joue de surcroît le rôle de solvant du bromure d’argent. On joint aussi un antivoile, comme le bromure de potassium, et un accélérateur, comme le borax ou le phosphate de sodium. De nombreuses formules sont possibles selon les résultats recherchés. Après un rinçage soigné, car les deux bains sont incompatibles, on fixe l’image argentique en éliminant le bromure non impressionné. Le meilleur solvant à cet égard est l’hyposulfite de sodium, qui forme avec le bromure d’argent un sel complexe, soluble dans l’eau. On lui adjoint des produits durcissants, comme l’alun de potassium, et stabilisateurs, comme l’acide borique ou acétique. À partir des négatifs ainsi obtenus, on peut pratiquer, au moyen d’opérations similaires, le tirage sur papier, qui fournit un négatif d’un négatif, autrement dit une image positive. Cela peut être fait par insolation en lumière blanche, par contact ou par agrandissement par projection dans un agrandisseur ; les épreuves photographiques ainsi obtenues peuvent être virées en couleurs ou en nuances diverses.


Le traitement des photographies en couleurs

La photographie en couleurs remplace les grains d’argent par des colorants et nécessite ce transfert sur trois couches superposées. Le traitement chromogène, s’il est possible par l’amateur, oblige donc à des opérations compliquées et à des réglages, notamment des produits chimiques et de la température des bains, extrêmement délicats, et la plupart des utilisateurs se contentent de remettre les films qu’ils ont pris à un laboratoire spécialisé, soit pour le développement de leurs films inversibles (diapositives) ou négatifs, soit pour le tirage de ces derniers sur papier. La photographie en couleurs s’est faite d’abord selon des procédés additifs où les couleurs se retrouvaient côte à côte sur l’émulsion. Elle est maintenant presque exclusivement le fait de procédés soustractifs, utilisant sur le support trois couches colorées superposées.


Les utilisations

La photographie est devenue d’un usage très étendu et quasi universel : documentation, études et fixation instantanée d’un moment précis d’un phénomène, expression artistique, reproductions pour l’édition, etc. La principale utilisation pour l’amateur, qui était autrefois le tirage d’épreuves sur papier, s’est enrichie avec la couleur des projections éventuellement sonorisées ou passées en fondu enchaîné (diaporama). L’enseignement s’en est inspiré, et le tirage des diapositives commerciales rejoint peu à peu celui de la carte postale.


Les techniques particulières

La photographie a conduit à de nombreuses techniques particulières qui l’éloignent parfois fortement de la simple reproduction fidèle d’un document, et nous devrons nous limiter à quelques exemples.

• La photographie minute. Edwin H. Land a imaginé en 1947 un appareil utilisant une émulsion combinée avec son révélateur fixateur incorporé. Il suffit, après la prise de vue, d’écraser sur l’émulsion le produit chimique, ce qui se fait automatiquement en tirant le film, et l’on obtient en quelques secondes l’image positive directe développée et fixée. Plus récemment, ce procédé a pu être réalisé également en couleurs.

• Macro- et microphotographie. L’utilisation de dispositifs optiques permet d’obtenir soit des vues très rapprochées à dimension 1/1 par exemple, que l’on nomme des macrophotographies et qui peuvent être encore agrandies au tirage, soit, en combinaison avec un microscope ou une optique plus poussée, des microphotographies, fournissant des images de détails à de forts grossissements, le microscope électronique lui-même pouvant donner des images reprises par photographies qui approchent la possibilité de fournir des images de la dimension de la molécule.

• Photographie ultra-rapide. La photographie, n’étant plus limitée dans l’espace puisqu’elle peut aller de la photographie des astres à celle de la molécule, ne se limite pas davantage dans le temps, et il est devenu possible, grâce à des dispositifs d’éclairage particuliers et puissants (flash, étincelles...), d’obtenir des photographies en instantanés très rapides, tels que le millionième ou le milliardième de seconde, très utiles pour fixer et étudier certains phénomènes rapides.

• Photographie en lumière monochromatique. Ce genre de photographie, facile à réaliser en utilisant pour l’éclairage une lampe à vapeur de sodium (lumière monochromatique dans le jaune), permet d’éliminer toute aberration chromatique et d’obtenir ainsi une meilleure définition et une meilleure qualité d’images documentaires d’objets métalliques ou translucides.

• Photographie en lumière polarisée. La lumière polarisée, que l’on réalise en utilisant un filtre polarisant, permet d’éliminer des reflets gênants. Des objets placés entre deux filtres polarisants fournissent des images intéressantes dans les recherches scientifiques, notamment lorsque l’on conjugue ce procédé avec la microphotographie.

• Photographie en lumière rasante. Si l’on photographie un objet en lumière rasante, par exemple à l’aide d’un projecteur avec une incidence de l’ordre de 10 à 20°, on amplifie, par le jeu de leur ombre, tous les accidents de surface. On obtient ainsi par exemple les éléments de l’étude des coups de pinceau d’un peintre.

• Photographie en ultraviolet. Les émulsions ordinaires, non chromatisées, sont sensibles aux rayons ultraviolets proches du visible. On peut accroître cette sensibilité en limitant la teneur en gélatine du support ou en sensibilisant l’émulsion au moyen de produits fluorescents (huile, salicylate de sodium, exculine...). La photographie ultraviolette que l’on utilise pour des études scientifiques, des expertises... se caractérise par une forte diffusion, qui supprime ou atténue les ombres, mais par des effets différents de ceux qui sont obtenus en lumière ordinaire : une tulipe blanche apparaît noire ; des verres montrent des densités qui sont fonction de leur transparence aux rayons de courte longueur d’onde. La photographie ultraviolette se réalise avec un filtre noir à l’oxyde de nickel (filtre de Wood) devant l’objectif. Ce filtre ne laisse passer que les rayons ultraviolets. L’éclairage du sujet doit être fait avec une source qui doit contenir des rayons ultraviolets, ce qui est le cas d’un éclairage solaire si l’on se contente des rayons proches du visible ou, mieux, d’une lampe à vapeur de mercure en verre spécial.