ornithorynque

Ornithorynque
Ornithorynque

Une origine ancienne et mystérieuse, un bec de canard, une fourrure douce et des œufs, ce petit mammifère a de quoi intriguer… Même s'il occupait autrefois d'autres continents, l'ornithorynque ne vit aujourd'hui que dans les rivières de l'est de l'Australie.

1. La vie de l'ornithorynque

1.1. Les repas du fond de l'eau

Fréquentant apparemment toujours la même portion de rivière, l'ornithorynque chasse, surtout le matin et le soir, diverses sortes de petites proies aquatiques : larves d'insectes, vers, mollusques, crustacés, mais aussi têtards, œufs de poissons ou petits poissons. À l'occasion, il capte quelques proies rapides qui nagent en pleine eau, mais le plus souvent, il trouve son repas sous les pierres au fond du cours d'eau.

Pour chasser, l'ornithorynque ne se sert pas de la vue (il a les yeux fermés sous l'eau), mais surtout du toucher, principalement au niveau de son bec. Entouré de très nombreuses terminaisons nerveuses et doué d'électroréception, cet appendice lui permet de repérer ses proies aux infimes modifications de champs électriques que provoquent les moindres mouvements des insectes ou des larves.

Un solide appétit

Nageant au fond de son plan d'eau, l'ornithorynque sonde avec son bec les sédiments ou le dessous des pierres, à la recherche de sa nourriture. Ayant emmagasiné plusieurs proies dans ses poches jugales (joues), il remonte à la surface pour faire la planche sur le ventre. Puis il mâche en s'aidant de sa langue et des plaques cornées de sa bouche, qui font office de dents, avant d'avaler.

Même s'il ingurgite parfois des têtards, de petits poissons, des escargots d'eau, des crevettes ou des vers, l'essentiel de son régime est constitué de larves d'insectes – selon une étude faite dans la rivière Shoalhaven, en Nouvelle-Galles du Sud (Australie), surtout les larves de trichoptères (Trichoptera), les phryganes, qui représentaient lors de ces observations 64 % de son alimentation en été et 41 % en hiver. En Tasmanie, à côté des larves trichoptères, une espèce d'écrevisse endémique (Parastacoides tasmanicus tasmanicus) constitue une part importante de son régime.

On a aussi noté le régime d'un mâle en captivité de 1,5 kg, qui ingérait chaque jour 450 g de vers, de 20 à 30 petites écrevisses, 200 vers de farine, 2 petites grenouilles et 2 œufs pochés : un solide appétit, puisqu'il mangeait chaque jour l'équivalent de la moitié de son poids total !

Actif toute l'année, l'ornithorynque a besoin de se nourrir régulièrement pour maintenir son métabolisme. En hiver, et en particulier au sud de l'État de Victoria, où la température de l'eau avoisine 0 °C pendant plusieurs semaines, il lui est parfois difficile de trouver sa nourriture : avec le froid, les larves s'engourdissent et s'enfouissent plus profondément. Il peut alors résister pendant quelques jours sans rien manger, grâce aux réserves de graisse accumulées pendant la belle saison, qui se concentrent essentiellement dans sa queue.

Une réserve de graisse dans la queue

Une réserve de graisse dans la queue



L'ornithorynque peut stocker dans sa queue 40 % des réserves de graisse de tout son corps. Mesurer la couche de graisse de la queue permet d'évaluer l'état de santé de l'animal. Entre février et mai, pendant l'automne austral, cette couche de graisse sous-cutanée est à son maximum. C'est la saison où l'animal stocke des réserves. Quand la couche de graisse atteint son minimum en octobre-novembre (printemps austral), c'est l'époque où les conditions de vie sont les plus dures pour l'ornithorynque qui doit vivre sur ses réserves.

1.2. Une vie entière passée dans l'eau

L'ornithorynque vit essentiellement dans l'eau : il ne quitte l'élément liquide que pour se reposer à terre, dans son terrier qui s'ouvre directement sur la berge de la rivière. Il nage le plus souvent au ras de l'eau, en ramant alternativement avec l'une et l'autre de ses pattes avant, dotées de larges palmes (à la différence d'autres mammifères aquatiques comme la loutre, le castor ou le campagnol amphibie, qui n'utilisent que leurs pattes postérieures, avec parfois l'aide de la queue et d'ondulations de l'ensemble du corps).

Ses pattes arrière lui servent de gouvernail et sa queue ne joue qu'un rôle accessoire de godille. Il peut atteindre ainsi 3 à 4 km/h, mais nage le plus souvent à une vitesse moindre. Ses narines, qui s'ouvrent au bout du bec, lui permettent de respirer en effleurant seulement la surface de l'eau. Pour aller chercher sa nourriture au fond de la rivière, il peut rester jusqu'à 5 minutes en apnée, mais généralement ses plongées durent plus généralement une minute.

Une vie sociale mal connue

Plutôt solitaire, l'ornithorynque ne semble pas faire preuve d'une vie sociale très intense. En réalité, l'animal est si discret qu'il n'est pas facile à observer. Cependant, la densité d'animaux peut être relativement élevée par endroits, et, si la rivière est calme, on peut alors distinguer plusieurs ornithorynques en train de pêcher : les uns nageant sous l'eau, d'autres en plongée et d'autres encore, revenus en surface, pattes écartées, provoquant des ronds dans l'eau par les mouvements de mastication de leurs mandibules.

S'il est effrayé, un ornithorynque peut plonger très rapidement pour se cacher. Son plongeon s'accompagne alors d'un « splash » sonore, qui sert peut-être à signifier à ses congénères la présence d'un danger potentiel.

Les combats et l'amour

D'août à octobre, les animaux font preuve de plus d'activité, car c'est la saison de reproduction. Les mâles deviennent plus agressifs. La taille de leurs testicules et de leurs glandes à venin augmente. Celles-ci sont reliées à un éperon, au niveau de leurs chevilles. Il semble bien qu'éperon et venin servent lors de combats entre mâles adultes, qui portent souvent, principalement sur la queue, des cicatrices, signes de ces affrontements. En captivité, certains vont jusqu'à s'entre-tuer. En nature, ce doit être plus rare, car le plus faible a toute possibilité de fuir.

Les observations faites en captivité ou en semi-captivité ont montré que, le plus souvent, c'est la femelle qui initie la parade (Les animaux nageant l'un près de l'autre, la femelle vient toucher le mâle ou passe sous lui. Puis ce dernier, placé derrière elle, lui saisit la queue avec son bec. Pour s'accoupler, le mâle semble s'enrouler derrière la femelle.) On suppose que les animaux agissent de même dans leur milieu naturel. Dans les populations sauvages, un ou quelques mâles dominants pourraient effectuer l'essentiel des accouplements, qui se pratiquent eux aussi dans l'eau.

Les accouplements ont lieu dès le mois d'août dans le Queensland, en septembre en Nouvelle-Galles du Sud et en octobre ou en novembre dans l'État de Victoria et en Tasmanie.

1.3. Un terrier spécial pour couver et allaiter les petits

L'ornithorynque creuse son terrier d'habitation (long de 5 à 10 m) juste au bord de l'eau, dans un terrain à la fois meuble et stable, souvent autour de racines d'arbre. Pour ce faire, il se sert de ses pattes antérieures, palmes repliées. Le diamètre des galeries qui mènent à la chambre correspond juste à la largeur de son corps, ce qui a pour effet d'essorer son pelage quand il rentre.

Pour la mise-bas et l'élevage des petits, la femelle utilise un autre terrier, nettement plus grand, qu'elle aménage dans les deux semaines qui suivent l'accouplement. Les galeries peuvent atteindre 18 m de long et s'élever de 1 à 7 m par rapport à l'entrée. Dans la chambre où elle fait son nid, la femelle dispose des feuilles qu'elle rapporte sous sa queue repliée. Cette litière assure l'isolation thermique et l'humidité voulues pour l'incubation. Une fois installée, elle ferme le tunnel de l'intérieur et ne sort plus que rarement pour se nourrir.

Dix jours pour couver, quatre mois pour allaiter

Entre deux et quatre semaines après l'accouplement, la femelle pond de deux à trois œufs. Presque sphériques, ils mesurent de 16 à 18 mm de long, 14 ou 15 mm de diamètre, et sont collés entre eux. Pour couver, la femelle se roule autour d'eux en les maintenant entre son ventre et sa queue repliée. Après 10 à 12 jours d'incubation éclosent de minuscules ornithorynques, de 25,4 mm de long, nus et aveugles. Ils sont allaités dans le terrier pendant trois à quatre mois. La femelle n'ayant pas de mamelon, le lait suinte le long des poils de son ventre.

Les jeunes n'effectuent leur première sortie avec la mère qu'à trois mois et demi. Ils mesurent alors environ 37 cm (femelles) et 41 cm (mâles), soit 80 % de leur taille adulte, mais ne pèsent encore que 56 et 67 % du poids adulte. Il semble qu'ils ne soient pas matures avant deux ans pour les femelles, un peu plus tôt pour les mâles. Toutefois, des observations ont montré que les jeunes femelles ne commencent généralement à se reproduire que vers l'âge de quatre ans.

1.4. Milieu naturel et écologie

Exclusivement australien, l'ornithorynque ne se rencontre, en fait, que dans l'est du pays. Vers le nord, dans le Queensland, il ne dépasse pas la ville de Cooktown. Vers le sud, il occupe une bonne partie de l'État de Victoria et toute l'île de Tasmanie. Très dépendant de l'eau, il vit toujours près de rivières, mais, en bordure de mer, il évite l'eau salée.

L'ornithorynque craint à la fois la sécheresse, qui lui retire toute possibilité de trouver sa nourriture, et les inondations, qui peuvent miner les berges et l'emporter au loin. Cela explique la répartition globale de l'espèce vers l'est – à l'ouest de la grande chaîne de montagnes qui longe plus ou moins la côte australienne, le cours des rivières s'assèche tous les étés, et on ne le rencontre que dans les cours d'eau permanents.

À l'inverse, il s'est bien adapté aux crues printanières. Pourtant, avec la fonte des neiges, les rivières grossissent brutalement. Leurs eaux deviennent opaques, rapides et froides, rendant souvent les conditions de vie difficiles pour le petit mammifère. Certains naturalistes du début du siècle pensaient que les ornithorynques se réfugiaient alors dans les terriers de lapins. On ignore quelle est la parade de l'ornithorynque pour survivre aux crues. Mais l'observation montre qu'il les surmonte : après une crue de la rivière Shoalhaven (en Nouvelle-Galles du Sud), au cours de laquelle le niveau de l'eau était monté huit fois plus haut que la normale, tous les animaux résidants, excepté un, ont été retrouvés vivants.

Étudié mais encore mal connu

Pour mieux connaître la vie des ornithorynques, des expériences de capture avec marquage (à l'aide de bagues posées sur les chevilles des animaux) et recaptures ont commencé, dans les années 1970, dans la rivière Shoalhaven, en Nouvelle-Galles du Sud. Une trentaine d'années d'études dans cette rivière ont permis notamment de déterminer la longévité de l'ornithorynque dans la nature : élevée pour une espèce de cette taille, elle peut atteindre 21 ans chez la femelle, sans doute autant chez le mâle. En captivité, le record est de 22 ans et demi.

Des études ont également été menées en Tasmanie, qui ont montré que les habitudes de vie, diurnes ou nocturnes, varient selon le sexe (les femelles ont plus souvent un comportement diurne que les mâles) et la saison (plus d'ornithorynques sont diurnes en hiver).

En 24 heures, les ornithorynques étudiés dans les rivières Shoalhaven et Thredbo se déplaçaient habituellement de 200 à 2 000 m et passaient en moyenne 50 % de leur temps dans l'eau. Ces observations ont été confirmées par les études faites en Tasmanie, où la durée passée dans l'eau à chercher de la nourriture était comprise entre 8,5 et 14 heures par période de 24 heures. Le domaine d'exploration était, quant à lui, compris entre 3 et 58 ha.

Ces travaux ont permis de faire d'intéressants progrès dans la compréhension de l'écologie de l'espèce, mais il reste encore beaucoup à découvrir.

Pas de concurrence réelle

Quand les truites d'Europe ont été introduites dans les rivières de montagne d'Australie, personne n'avait pensé que ces poissons se nourrissaient surtout d'insectes aquatiques. Craignant qu'ils ne deviennent des concurrents alimentaires pour les ornithorynques, certains biologistes australiens ont comparé le régime des deux espèces. Les poissons capturent surtout des larves de pleine eau qui nagent, alors que l'ornithorynque capture celles des fonds (benthiques), qu'ils trouvent en fouillant la vase ou en retournant les galets du fond de la rivière. La compétition est donc limitée. On s'est depuis aperçu que les ornithorynques avaient appris à manger les œufs de truite. Comme celles-ci pondent quand l'eau est la plus froide, cela peut même faciliter la survie du petit mammifère lorsque ses besoins en énergie sont les plus grands.

Avec les oiseaux d'eau comme les canards, tous végétariens, la concurrence n'existe pas.

De rares ennemis

Ce mammifère ne craint guère les grands rapaces et le renard, tant ses mœurs sont discrètes. Les crocodiles capturent sans doute quelques ornithorynques ; certains poissons de grande taille, comme des anguilles ou la morue de Murray, peuvent à l'occasion manger un jeune. Mais il semble que ces prédateurs potentiels ne s'attaquent que rarement à l'animal.

Une bonne adaptation thermique

L'ornithorynque fait preuve d'une grande tolérance dans ses besoins thermiques. Sa mue est graduelle et permanente, pour le protéger, même en été, de la fraîcheur de l'eau. Lorsque l'eau est proche de 0 °C, l'animal est capable d'augmenter son métabolisme pour se maintenir à 32 °C, sa température corporelle normale. En revanche, dans une eau au-delà de 30 °C, il est mal à l'aise et se réfugie dans son terrier.

Le rôle d'isolant thermique du terrier a été mesuré le long de la rivière Shoalhaven. En été, la température de l'air atteint 34 °C, celle de l'eau, 24 °C, et celle du terrier ne dépasse pas 18 °C. Inversement, quand il fait 12 °C et que l'eau est à 5 °C, la température du terrier ne descend pas au-dessous de 14 °C.

Le terrier assure un bon équilibre thermique, mais il impose certaines contraintes. Notamment pendant l'incubation, lorsque la femelle ferme de l'intérieur la ou les entrées. L'aération des galeries se fait alors moins bien et il peut s'accumuler du gaz carbonique, lié à la respiration de l'animal. Pour pallier cet inconvénient, les ornithorynques disposent d'une quantité importante d'hémoglobine pouvant transporter beaucoup d'oxygène vers les tissus. Les globules rouges représentent 52 % du volume de leur sang, contre 45 % chez l'homme. Il est même possible que les jeunes à la naissance possèdent plus de globules rouges que les adultes, ce qui leur permettrait de respirer sans difficulté une atmosphère appauvrie en oxygène du terrier de naissance.

2. Une seule espèce d'ornithorynque

2.1. Ornithorynque (Ornithorhynchus anatinus)

L'ornithorynque ne peut être confondu avec aucun autre animal. C'est un petit mammifère – il dépasse rarement 2 kg – vraiment original, à la fourrure courte et dense et au large bec de canard.

Son pelage est typique d'une espèce aquatique. La peau est protégée par une dense couche de poils de bourre, qui maintiennent une pellicule d'air tempéré entre elle et l'eau. Les poils de jarre, plus longs, protègent l'ensemble. La fourrure est presque aussi dense sur le ventre que sur le dos. Seule la couleur change. Le dos est brun ambre, parfois assez foncé, le ventre plus gris ou plus noisette. La queue, au pelage plus clairsemé, surtout en dessous, peut même être relativement dénudée.

Couvert d'une peau douce, nue, humide, ressemblant à du cuir souple, et se prolongeant par une plaque frontale, le bec, ressemblant à celui d'un canard, est un organe bien curieux pour un mammifère ! L'ornithorynque est le seul à en être doté ; c'est d'ailleurs cette particularité qui lui valu son nom, du grec ornithos, oiseau, et runkhos, bec. C'est un organe sensoriel parcouru de très nombreuses terminaisons nerveuses. Autre curiosité, l'ornithorynque est l'un des rares mammifères venimeux : le mâle possède un éperon à venin à chaque patte postérieure, au niveau de la cheville.

L'œil voit bien les mouvements en surface, mais l'animal le ferme en plongée. Contre l'œil se trouve le méat auditif, dépourvu de pavillon externe. Le même repli de peau ferme œil et oreille sous l'eau.

Les pattes sont courtes et pourvues de cinq doigts. Les pattes antérieures sont équipées de larges palmes, qui augmentent considérablement leur surface. À terre, ces palmures sont repliées sous les paumes.

Les adultes n'ont pas de dents, mais des surfaces cornées à croissance continue. Les jeunes, en revanche, possèdent deux paires de dents.

Comparé à celui des autres mammifères, le cerveau de l'ornithorynque est petit et lisse. Au niveau du cortex cérébral, on retrouve l'importance de la fonction sensitive liée au bec.

L'ornithorynque – comme les autres monotrèmes (échidnés) – a un appareil génital très différent de celui des mammifères placentaires. Il possède un cloaque comme les oiseaux, les reptiles et les marsupiaux. Chez le mâle, l'urètre est complètement séparé de la fonction urinaire et les testicules restent intra-abdominaux. Chez la femelle, seul l'ovaire gauche est fonctionnel (ce n'est pas le cas des échidnés, chez qui les deux ovaires sont également développés). Comme chez tous les monotrèmes, les deux uretères, la vessie et les deux utérus de la femelle débouchent dans un sinus urinogénital commun, qui s'ouvre dans le cloaque. Le tube digestif vient également se terminer dans le cloaque, un peu en arrière de l'orifice du sinus urinogénital.

Les glandes mammaires sont très peu développées et sans mamelon, mais elles peuvent mesurer jusqu'à 13,5 cm de long pendant la lactation, soit presque pratiquement le tiers de la longueur de l'animal. Étant dépourvues de mamelon,  les petits ne peuvent donc pas téter, mais lèchent le lait qui s'écoule le long des poils du ventre de leur mère.

          

ORNITHORYNQUE

Nom (genre, espèce) :

Ornithorhynchus anatinus

Famille :

Ornithorhynchidés

Ordre :

Monotrèmes

Classe :

Mammifères

Identification :

Petit animal à la fourrure courte et dense, bec de canard. Corps cylindrique. Queue plate. Pattes courtes ; celles antérieures largement palmées. Éperon venimeux sur les pattes postérieures des mâles adultes et des jeunes des deux sexes. Pas d'oreilles externes. Pas de mamelle externe ni de mamelon, mais glandes mammaires sous-cutanées

Taille :

Tête et corps : 30-45 cm. Queue : 10-15 cm

Poids :

De 0,8 à 2,6 kg ; les mâles sont plus lourds

Répartition :

Côte est de l'Australie et Tasmanie

Habitat :

Rivières et lacs d'eau douce permanente

Régime alimentaire :

Larves d'insectes aquatiques ; invertébrés

Structure sociale :

Inconnue

Maturité sexuelle :

2 ans

Saison de reproduction :

Août-octobre

Durée de gestation :

De 15 à 27 jours, suivis de 10 à 12 jours d'incubation des œufs

Nombre de jeunes par portée :

De 1 à 3, le plus souvent 2

Longévité :

21 ans dans la nature ; 22,5 ans (record) en captivité

Effectifs, tendance :

Inconnus

Statut :

Espèce totalement protégée sur toute son aire de répartition (captures pour la fourrure auxixe siècle)

Remarque :

Biologie encore mal connue ; reproduction en captivité très difficile

 

2.2. Signes particuliers

Pattes

Entièrement étendue, la membrane natatoire des pattes antérieures dépasse largement la surface de la main. À terre, l'animal la replie sous ses paumes pour marcher ou creuser le sol à l'aide de ses 5 griffes, relativement larges. Les pattes postérieures, partiellement palmées, ont également 5 doigts. L'animal se tient en appui sur elles pour creuser. Au niveau de la cheville, le mâle adulte possède un éperon venimeux d'environ 1 cm de long, relié à une glande à venin localisée dans la cuisse. Chez les jeunes femelles, cet éperon ne dépasse pas 0,5 cm et tombe habituellement vers l'âge de 8 à 10 mois.

Bec

Le bec repose sur les mêmes structures osseuses de la face que celles dont sont pourvus tous les autres mammifères : le maxillaire et le prémaxillaire, pour la partie supérieure, et le dentaire, pour la partie inférieure. Ces os supportent la peau et les autres parties molles du bec. La position antérieure des narines est caractéristique des espèces aquatiques. La richesse en terminaisons nerveuses de tout le bec en fait un organe sensoriel essentiel pour se diriger en plongée et permet à l'animal de localiser ses proies yeux et oreilles fermés.

Squelette

La forme générale et la puissance des pattes antérieures et des omoplates de l'animal témoignent de l'adaptation à la nage. Les 7 vertèbres cervicales possèdent des ébauches de côtes. Les côtes thoraciques et abdominales ressemblent à celles de certains reptiles. La fonction des étranges os marsupiaux du bassin n'est pas connue.

3. Les autres espèces de monotrèmes : les échidnés

L'ordre des monotrèmes regroupe deux familles : celle des ornithorhynchidés, dont le seul représentant est l'ornithorynque, bien adapté à la vie aquatique, et celle des tachyglossidés, ou échidnés, qui comportent quatre espèces terrestres, adaptées à la recherche de fourmis, de termites et de vers. Les monotrèmes ont pour particularité de pondre des œufs ; mais, comme chez tous les mammifères, les femelles allaitent leurs petits.

Les échidnés sont couverts de piquants et équipés d'un museau tubulaire ; ils ont des pattes antérieures robustes, dotées de puissantes griffes, pour éventrer les fourmilières et termitières et creuser le sol. Ils sont répartis en deux genres : Tachyglossus, l'échidné à nez court, qui habite l'Australie et la Nouvelle-Guinée, et Zaglossus, les échidnés à nez long, qui se rencontrent dans les montagnes de Nouvelle-Guinée. Alors que l'échidné à nez court est encore relativement commun, les trois échidnés à nez long sont très rares et très menacés. Les échidnés peuvent apparemment vivre vieux, du moins en captivité : des longévités de 49 ans pour l'échidné à nez court et de 31 ans pour l'échidné à nez long, Zaglossus bruijni, ont été enregistrées. Malheureusement, dans la faune locale de Nouvelle-Guinée, dont les grands mammifères sont absents, les deux espèces représentent pour les populations indigènes un gibier de grande taille, et sont donc trop chassées.

3.1. Échidné à nez court (Tachyglossus aculeatus)

Identification : d'allure, l'échidné tient du hérisson et du porc-épic. Long de 45 à 60 cm, dont 8,5 à 9 cm pour la queue, il pèse entre 2,5 et 6,5 kg. Le pelage, fait de poils et de piquants mêlés, est plus fourni chez les animaux de Nouvelle-Guinée et de Tasmanie que chez ceux d'Australie. Solides et pointus, les piquants constituent une protection efficace contre les ennemis potentiels. La couleur générale du pelage de l'animal est brune à noirâtre, la pointe des piquants pouvant être plus claire. Le dessous du corps, dépourvu de piquants, est plus pâle. Le nez, tubulaire, représente environ 18 % de la longueur totale du corps. Les narines et la bouche s'ouvrent à son extrémité. L'orifice buccal, très étroit, permet juste le passage de la longue langue filiforme. Les pieds des pattes postérieures sont rejetés sur le côté. En marchant, l'animal ne prend pas appui sur la paume de son pied, mais sur un côté de la cheville. L'ouïe et l'odorat sont excellents, mais la vue semble faible.

Répartition : l'espèce fait preuve de grandes capacités d'adaptation, supportant aussi vaillamment la neige que les sables brûlants ; elle est ainsi présente dans les montagnes de Nouvelle-Guinée, les déserts du centre de l'Australie et en Tasmanie.

Alimentation : essentiellement des fourmis et des termites qui sont abondantes presque partout, toute l'année. Pour les atteindre, l'échidné à bec court dispose de fortes griffes aux pattes antérieures, qui lui permettent de percer la paroi des termitières les plus solides.

L'espèce repère probablement ses proies à l'odorat. Lorsque les termites ou les fourmis sont localisées, l'animal les capture au moyen de sa longue langue. Celle-ci peut sortir de 18 cm de la bouche. Elle est recouverte des sécrétions de glandes salivaires très développées qui doivent aider à la saisie des insectes.

Comme de nombreux autres mammifères mangeurs de fourmis, l'échidné ne possède pas de dents. Les papilles cornées qu'il a sur le dessus et l'extrémité de la langue ainsi que sur le palais suffisent à broyer ses proies.

En août-septembre, l'échidné s'attaque de façon très nette à une fourmi bien particulière, l'Iridomyrmex detectus, dont les colonies sont défendues, en permanence, par des soldats agressifs, mais dont les femelles, à cette époque, sont particulièrement nombreuses et riches en matière grasse. Le reste de l'année, l'échidné évite soigneusement les fourmilières de l'Iridomyrmex detectus.

Comportement : quand la nourriture ne manque pas, un animal peut vivre sur 50 hectares, mais il accepte de partager ce domaine vital avec d'autres. L'échidné peut être actif à différents moments de la journée, plutôt la nuit quand il fait chaud, et le jour, en hiver. Quand la température baisse beaucoup, il peut présenter des phases de torpeur, mais il n'hiberne pas. C'est un excellent fouisseur, qui, s'il est surpris en plein champ, creuse directement sous lui pour s'enterrer sur place.

L'animal sait aussi nager, ce qui explique la vaste répartition de l'espèce.

Reproduction : entre juin et août en Australie, les femelles peuvent être en chaleur et attirer les mâles par une sécrétion cloacale. On a déjà observé une femelle suivie par 5 mâles, mais les comportements sont rarement agressifs. Il existe un vestige d'éperon venimeux chez les mâles, mais non fonctionnel. Avant la ponte, une poche incubatrice se forme sur le ventre de la femelle, englobant les glandes mammaires. La gestation varie de 14 jours à un mois selon les auteurs. La femelle se couche sur le dos pour déposer l'œuf, normalement unique, dans la poche, où l'éclosion survient au bout de 10 jours.

Le jeune échidné est allaité par sa mère jusqu'au sevrage qui n'intervient qu'au bout de 6 mois ; il reste dans la poche maternelle tant que ses piquants n'ont pas commencé à pointer. Il sera complètement indépendant à l'âge de un an et ira alors occuper son propre domaine vital.

Statut : préoccupation mineure.

3.2. Échidnés à nez long (Zaglossus bruijni, Zaglossus bartoni, Zaglossus attenboroughi)

Identification : plus grands que le précédent, jusqu'à 1 m de long, pour un poids de 5 à 10 kg. Pelage assez pauvre en piquants, mais riche et dense en poils. Les piquants sont souvent cachés dans la fourrure, sauf sur les flancs, où ils sont plus épais et plus longs. Le bec est très long et légèrement incurvé vers le bas.

Répartition : île de Nouvelle-Guinée ; en altitude, entre 1 300 et 4 000 m. Il est possible qu'il ait disparu près de la mer à cause d'une pression humaine trop forte.

Alimentation : le régime alimentaire se compose surtout d'invertébrés, en particulier de vers de terre, mais les insectes ne semblent pas fréquents. Comme son bec est effilé et cylindrique, l'animal doit repérer une des extrémités du ver de terre, avant de saisir celui-ci avec des épines qui bordent l'extrémité de sa langue, puis de l'avaler, dans le sens de la longueur.

Reproduction : encore très mal connue. On sait seulement qu'il pond un, ou des œufs, dans une poche incubatrice, puis allaite ses petits.

Statut : les trois espèces sont en danger critique d'extinction.

4. Origine et évolution de l'ornithorynque

La classe des mammifères, quelque 5 400 espèces, est actuellement divisée en trois sous-classes d'importance très inégale. Les euthériens, ou mammifères placentaires (chez lesquels la gestation est interne), de loin les plus nombreux, comprennent environ 95 % des espèces. Les métathériens, ou marsupiaux (dont les petits réalisent l'essentiel de leur développement dans une poche externe sur le ventre de la mère, la poche marsupiale), représentent pratiquement les 5 % restants. La troisième sous-classe, celle des protothériens, représentés par l'ordre des monotrèmes, ne compte que cinq espèces, localisées en Océanie (Australie et Papouasie-Nouvelle-Guinée) : l'ornithorynque et les quatre échidnés, seuls mammifères à pondre des œufs et à allaiter leurs petits après l'éclosion.

L'histoire de l'évolution des monotrèmes resta longtemps très mystérieuse. Le seul ancêtre direct de l'ornithorynque contemporain qu'on avait pu identifier était Obdurodon insignis, retrouvé seulement en Australie, et datant de quelque 15 millions d'années. De là, la trace se perdait. Il a fallu attendre 1985 pour remonter davantage dans l'histoire du groupe. Michael Archer et ses collègues australiens mettent au jour, en Nouvelle-Galles du Sud, une partie de la mandibule d'un animal proche des ornithorynques, Steropodon galmani, vieux de près de 100 millions d'années.

En 1992, une équipe de la même université a fait en Amérique du Sud, en Patagonie, une découverte capitale : celle d'une molaire qui ressemble étrangement à celles d'Obdurodon ou à celles des jeunes ornithorynques modernes. Cette molaire d'ornithorhynchidé du paléocène (62 millions d'années) est le premier reste de monotrème trouvé en dehors de l'Australie. Le groupe des mammifères pondeurs avait donc, autrefois, une répartition très vaste : à la fin du secondaire, ses représentants circulaient sur l'ensemble du supercontinent de l'hémisphère austral, le Gondwana, lorsque l'Amérique du Sud, l'Antarctique et l'Australie devaient encore communiquer soit directement, soit à travers un chapelet d'îles.

Les liens entre les protothériens et les deux autres sous-classes de mammifères, les métathériens et les euthériens, continuent toutefois de faire débat : notamment, à quel moment la lignée des premiers s'est-elle séparée des autres mammifères ? Les monotrèmes sont-ils proches des marsupiaux, ou bien se sont-ils séparés très tôt d'une lignée qui aurait donné ultérieurement les marsupiaux et les mammifères placentaires ? La question reste ouverte.

L'espèce moderne d'ornithorynque, Ornithorhynchus anatinus, est apparue dans le courant du pléistocène en Australie, et plus récemment en Tasmanie. Elle habite aujourd'hui la côte est des États du Queensland et de la Nouvelle-Galles du Sud, une bonne partie de celui de Victoria et toute l'île de Tasmanie.

5. L'ornithorynque et l'homme

Bien connu des Aborigènes, l'ornithorynque fut un objet d'étonnement, de mystère et de controverses pour les premiers naturalistes européens qui l'ont étudié.Chassé pour sa fourrure au xixe siècle, l'animal est aujourd'hui entièrement protégé. Mais il reste très sensible à tous les projets d'aménagement des cours d'eau et se reproduit extrêmement difficilement en captivité.

5.1. Des aborigènes aux zoologistes

Les Aborigènes connaissent bien l'ornithorynque, qu'ils ont baptisé « mallingong », « boondadura » ou « tambreet ». Il était en revanche bien surprenant pour les premiers colons Européens arrivés en Australie, qui l'appelaient « bec de canard », « taupe aquatique » ou encore « taupe-canard ». C'est en 1798 que l'ornithorynque fait sa première apparition en Europe, sous la forme d'une peau vide de ses organes, expédiée au docteur George Shaw du British Museum. Celui-ci pense d'abord qu'il peut s'agir d'une supercherie – un bec de canard assemblé à une peau d'un mammifère semblable à la taupe –, mais après une étude approfondie, il le décrit, en 1799, sous le nom de Platypus anatinus. Indépendamment, en Allemagne en 1800, le naturaliste Johann Blumenbach le nomme Ornithorhynchus (« à bec d'oiseau ») paradoxus. L'espèce est finalement baptisée Ornithorhynchus – le nom de genre Platypus était déjà utilisé pour un scarabée (Platypus flavicornis, nommé ainsi par Fabricius en 1776) – anatinus – pour souligner l'antériorité de la description de Shaw.

D'autres spécimens arrivent en Europe, entiers et conservés dans de l'alcool, et sont consciencieusement disséqués et étudiés par les naturalistes les plus réputés. La position systématique de l'espèce n'est pas simple à établir. Si George Shaw pense qu'il s'agit d'un mammifère, en France, Jean-Baptiste Lamarck est d'avis de le classer à part, entre les mammifères et les oiseaux. Étienne Geoffroy Saint-Hilaire crée pour l'animal la sous-classe des monotrèmes, au vu de la présence du cloaque, mais sans préciser s'il le rapproche plutôt des reptiles ou plutôt des mammifères.

À cette époque, on avait noté l'absence de mamelle externe et de mamelon, mais ce n'est qu'en 1824 que l'Allemand Meckel découvre les glandes mammaires sous-cutanées et comprend que le lait suinte de toute une région ventrale. Connue des aborigènes et des colons européens installés en Australie, l'oviparité n'est admise par la communauté scientifique qu'en 1884, lorsqu'elle est décrite par le naturaliste William Caldwell, en expédition en Australie.

5.2. Traqué pour sa fourrure au xixe siècle

Sa fourrure extrêmement douce valut à l'ornithorynque une période très sombre dans ses relations avec l'homme. En effet, au xixe siècle, l'animal fut chassé pour sa peau. Les chasseurs commençaient par étourdir le petit mammifère en tirant un coup de feu de gros calibre dans les rivières qu'il fréquentait. À la suite de quoi, ils envoyaient leurs chiens pour rapporter l'animal. On raconte que, plus d'une fois, des chiens se sont fait piquer par les éperons venimeux de mâles ornithorynques, et que certains en sont morts. C'est d'ailleurs comme cela que l'on sait que le venin peut tuer un chien. D'autres ornithorynques se sont fait piéger accidentellement dans des nasses à poissons. Certains furent même chassés pour le simple plaisir du « sport ».

Le commerce des peaux a réellement cessé à partir des années 1920. D'une part, la chasse à l'ornithorynque était interdite depuis le début du xxe siècle dans pratiquement tous les États australiens. D'autre part, la fourrure elle-même n'avait pas une qualité suffisante pour mériter d'être exportée, et les fourreurs s'étaient aperçus qu'elle était finalement assez difficile à travailler. Le rapport n'était donc pas intéressant.

5.3. Attention, venin !

Hormis quelques musaraignes dont la salive est venimeuse, les monotrèmes sont les seuls mammifères à venin. Et encore chez les échidnés cet appareil n'est-il plus fonctionnel. On ne sait d'ailleurs pas très bien pourquoi les ornithorynques mâles ont conservé leur appareil à venin, alors que les échidnés ont perdu l'usage du leur au cours de leur histoire.

Seuls les ornithorynques mâles peuvent véritablement blesser l'homme de cette façon. Il s'agit d'un comportement de défense : l'animal rapproche ses deux pattes postérieures l'une de l'autre et plante ses éperons dans tout ce qui s'approche de lui. Chez l'homme, l'essentiel des blessures a lieu au niveau des bras, et plutôt des mains et des poignets. La piqûre entraîne une violente douleur et une enflure qui se propage rapidement à tout le membre. Cette inflammation peut durer plusieurs jours. Dans certains cas, on a même observé un effet de somnolence pendant quelque temps, peut-être lié à l'intensité de la douleur. Il est même arrivé que la souffrance et l'inflammation durent plusieurs semaines avant de disparaître complètement.

Le venin n'est pas réellement dangereux pour l'homme, mais il est très douloureux. En revanche, il peut tuer de plus petits animaux.

5.4. Élevage et implantation : de très rares succès

L'Australie est actuellement le seul pays au monde où l'on puisse observer l'ornithorhynque. Leur exportation est totalement interdite : seul un envoi unique vers les États-Unis fut autorisé, en 1947. Pendant une dizaine d'années, le zoo de New York a ainsi pu élever des ornithorynques. Mais, malheureusement, les animaux ne se sont pas reproduits.

David Fleay, un biologiste australien qui s'est consacré à l'étude de l'ornithorynque, est l'unique personne à avoir réussi la reproduction de cet animal en captivité. Le premier centre d'élevage, ou « platypusary », qu'il créa dans les années 1940, se trouvait dans l'ancienne réserve aborigène de Coranderrk, près de la ville de Healesville, dans l'État de Victoria. C'est là que, en 1943, une femelle prénommée Jill donna naissance à un bébé de sexe féminin, Corrie, qui fut officiellement présentée à la presse le 3 janvier 1944. Elle était alors âgée de neuf semaines, encore aveugle, presque incapable de mouvement, et recouverte d'une fourrure courte et satinée. Sa croissance fut scrupuleusement suivie par les équipes scientifiques et filmée. De cette époque datent la plupart des données acquises concernant la reproduction de l'espèce.

En 1940, David Fleay participa à un projet d'introduction de l'espèce sur l'île des Kangourous, au large de l'État d'Australie du Sud. Dans cet État, notamment dans la rivière Murray, l'ornithorynque est rare, s'il existe encore. L'île semblait a priori favorable pour accueillir quelques animaux. Cinq mâles et cinq femelles furent donc capturés entre le 7 et 17 février 1940 dans de petites rivières de l'État de Victoria et transportés en avion jusqu'à l'île des Kangourous, près des rivières Rocky et Ravine et du ruisseau Breakneck (« casse-cou »), aux eaux fraîches abondantes, riches en crustacés et en insectes aquatiques. Les animaux supportèrent bien leur captivité transitoire et le voyage en avion. Ils s'accoutumèrent parfaitement à leur nouveau milieu puisqu'ils s'y reproduisirent. Plus de quarante ans après, il y a toujours des ornithorynques dans la région où ils ont été lâchés. Les rivières qu'ils fréquentent sont aujourd'hui incluses dans la réserve naturelle de Flinders Chase.

C'est également dans les années 1940 que l'État d'Australie de l'Ouest demanda un permis d'importer un couple d'ornithorynques de l'État de Victoria. Davis Fleay fut encore chargé de l'opération. Les deux animaux furent transportés en avion jusqu'à Perth et introduits à Mundaring Weir, tout au sud-ouest de l'État, où ils survécurent très bien. Mais ils ne réussirent pas à faire souche. Il s'agit des deux seules tentatives de déplacement d'ornithorynques en dehors de l'aire contemporaine de l'espèce.

5.5. Les origines légendaires de l'échidné à long bec

Pour les habitants de Nouvelle-Guinée, les échidnés à nez long, Zaglossus, ont des origines diverses. Ainsi, les Hatam des montagnes Arfak pensent que l'échidné naît de l'œuf d'un oiseau de paradis (le paradisier d'Albertis, Epimachus albertisi) tombé au sol.

Pour le peuple Etolo de la province des Hautes-Terres du Sud, ce sont de vieux kangourous arboricoles qui se transforment en échidnés, leur longue queue devenant le museau tubulaire.

Les Goilala du mont Albert-Edward croient que l'animal se reproduit en enfonçant dans le sol un long organe en forme de tube pour déposer son sang sous terre ; jusqu'à ce que le jeune atteigne la taille adulte, ses parents le nourrissent d'urine et de sang, qu'ils lui transmettent par le même organe.