récit
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
De l'ancien français resit, déverbal de réciter, du latin recitare.
Philosophie Générale
Narration.
Le récit est perçu comme un des modes d'énonciation fondamentaux de la littérature. C'est un mode indirect qui suppose une rupture entre le temps de la narration et le temps des événements rapportés, entre l'énonciateur et les personnages qu'il fait parler. Platon l'oppose ainsi au mode direct, propre au discours théâtral. Cette distinction lui permet d'affirmer ainsi que seul l'art dramatique est mimétique : « Je pense qu'il sera désormais clair pour toi qu'il existe une forme qui recourt entièrement à l'imitation, tant pour l'art de la composition poétique que pour l'art de raconter les histoires : comme tu dis, c'est la tragédie et la comédie. Il y ensuite la narration racontée ; quand elle est l'œuvre du poète lui-même : tu la trouveras surtout dans les dithyrambes. Et enfin, il y a celle qui procède en recourant aux deux premières : on la trouve dans la poésie épique... »(1). Aristote(2) en revanche inclut la narration dans le cadre mimétique en montrant que le théâtre relève également du récit : on y met en scène des actions dans le cadre d'une intrigue.
La mimésis relève donc de la mise en intrigue : opération par laquelle nous cherchons à donner sens à une suite d'événements empiriques. Genette(3) propose de distinguer alors le récit, comme énoncé narratif d'une série d'événements, de l'histoire ou diégèse, la trame des événements racontés objet du récit, et de la narration elle-même, l'action de raconter. Selon Ricoeur, Aristote donne comme objet au langage notre expérience du temps ; dès lors la narration, le récit sont au cœur de notre identité individuelle et historique : « le temps devient humain dans la mesure où il est articulé sur un mode narratif et le récit atteint sa signification plénière quand il devient une condition de l'existence temporelle »(4). Le temps du récit permet de reconfigurer le temps de la vie. De son côté, Schapp(5), dans une perspective phénoménologique, affirme que les choses ne nous sont données que dans des récits et que l'homme est « enchevêtré dans des histoires ».
Elsa Rimboux
Notes bibliographiques
- 1 ↑ Platon, République, III, 394b-c, trad. G. Leroux, Flammarion, Paris, 2002, p. 177.
- 2 ↑ Aristote, La Poétique, trad. R. Dupont-Roc et J. Lallot, Seuil, Paris, 1980.
- 3 ↑ Genette, G., Figures II, « Frontières du récit », Paris, Seuil, 1969 et Figures III, « Discours du récit », Seuil, Paris, 1972.
- 4 ↑ Ricœur, P., Temps et récit, I, 3, Seuil, Paris, 1983, p. 105.
- 5 ↑ Schapp, W., Empêtrés dans des histoires, trad. J. Greisch, Cerf, Paris, 1992.
