pulsion

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


En allemand : Trieb, de treiben, « mettre en mouvement », « pousser ». Trieb se distingue d'Instinkt, « instinct ». La notion est ancienne et courante en allemand ; Schiller, opposant « pulsions animales » et « intellectuelles », l'emploie dans un sens proche de celui de Freud.

Psychanalyse

« Concept limite entre le somatique et le psychique »(1), la pulsion est une notion matérialiste et dynamique – proche de la phusis des Grecs – qui transgresse la dichotomie corps-âme. La notion de pulsion sexuelle(2) postule l'existence d'une transformation des processus sexuels somatiques en une énergie psychique sexuelle, la libido. Elle est l'hypothèse nécessaire à l'intelligibilité, non des manifestations de la libido, mais de ce qui les rend possibles. Elle déconnecte la sexualité des fonctions de reproduction, et lui donne toute son importance dans la vie psychique. La notion de pulsion partielle élargit le champ de la sexualité. Étayées sur les grandes activités biologiques (manger, excréter, etc.) et sur les soins du nourrisson, les pulsions partielles acquièrent progressivement leur autonomie (autoérotisme des zones érogènes) avant de connaître divers destins (plaisirs préliminaires, unification sous le primat de la génitalité, sublimation, etc.).

L'hypothèse économique, qui envisage la pulsion comme « une mesure de l'exigence de travail imposé au psychisme en conséquence de sa liaison au corporel »(3), se double d'une hypothèse dynamique qui requiert l'existence d'un dualisme pulsionnel, sous-jacent à tout conflit. Freud oppose d'abord les pulsions du moi (ou d'autoconservation) et les pulsions sexuelles. Après une période de transition (1911-1914), marquée par un monisme pulsionnel libidinal – le conflit opposant libido du moi et libido d'objet –, il promeut une nouvelle opposition, pulsion de vie vs pulsion de mort (1920).

La reprise d'un terme ancien, qui signifiait « propagation du mouvement dans un fluide », pour traduire l'allemand explique que la notion ne soit pas tombée en France en déshérence, et que l'attention ne soit pas portée exclusivement à la relation d'objet. La traduction anglaise par « instinct » est presque un contresens, puisqu'elle nie la contingence de l'objet pour l'inscrire dans l'ordre de l'instinctuel.

Christian Michel

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Freud, S., Trieb und Triebschicksale (1915), G.W. X, « Pulsions et destins des pulsions », in Métapsychologie, Gallimard, Paris, 1985, p. 17.
  • 2 ↑ Freud, S., Drei Abhandlungen zur Sexualtheorie (1905), G.W. V, « Trois Essais sur la théorie de la sexualité », Gallimard, Paris, 1985.
  • 3 ↑ Freud, S., Pulsions et destins des pulsions, pp. 17-18.

→ destin, dualisme, enfantin et infantile, Éros et Thanatos, étayage, libido, principe, processus primaire et secondaire, sexualité