prédication

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


Du latin praedicare, « proclamer », « annoncer ».

Linguistique, Logique, Métaphysique

Action qui consiste à décrire un ou plusieurs sujets de discours comme possédant une propriété, ou comme étant dans une certaine relation les uns avec les autres.

Il semble exister une dissymétrie, dans toutes les langues, entre deux types de termes : ceux qui permettent de référer à un sujet, comme les noms propres (« Napoléon ») ou les démonstratifs (« Cet homme qui porte un chapeau rouge »), et ceux qui introduisent des conditions qui doivent être satisfaites par les entités dont on parle pour qu'un discours soit vrai, qu'on nomme les prédicats. Dans la logique traditionnelle héritée d'Aristote, les propositions les plus simples possèdent toutes la forme sujet-prédicat. Ces propositions énoncent donc quelque chose (le prédicat) d'une autre chose (le sujet), et sont vraies si et seulement si le sujet satisfait bien la condition exprimée par le prédicat(1). Aristote exprime la relation de prédication de la façon suivante : « P appartient à S », ou « P est dit de S ». Un terme peut être général (« tous les hommes ») et pourtant sujet d'une proposition.

Dans la logique contemporaine en revanche, les prédicats peuvent aussi bien exprimer des conditions monadiques, ou des propriétés, que des relations. Ainsi, « être plus grand que » pourra être analysé comme un prédicat. On ne peut plus dire dès lors qu'un prédicat s'applique à un sujet. Aussi Frege introduit-il la terminologie des fonctions et des arguments : un prédicat n-adique peut être conçu comme dénotant une fonction possédant n places d'arguments(2). Le sujet d'une phrase du français peut déterminer la valeur d'un des arguments ; mais tel peut être le cas d'autres positions grammaticales, par exemple des compléments du verbe. Ainsi, dans « le Mont Blanc est plus élevé que la butte Montmartre », une des places d'argument est remplie par l'individu désigné par le sujet, le Mont Blanc, mais l'autre place est occupée par celui que désigne le complément.

Il est important de distinguer les prédicats des propriétés : ce n'est pas parce qu'une phrase prédique une condition d'une entité qu'une propriété qui corresponde à cette condition doit exister. Si l'on pense qu'il existe vraiment une dissymétrie dans les langues entre les termes référentiels et ceux qui introduisent des conditions, on sera même sceptique à l'égard des propriétés : les prédicats ne peuvent référer à des propriétés, puisque, dans l'hypothèse d'une telle dissymétrie, ils ne réfèrent pas du tout. La métaphysique contemporaine insiste sur l'indépendance de la tâche qui consiste à déterminer les conditions exprimées par les phrases des langues naturelles relativement à celle, métaphysique, de déterminer quelles sont les propriétés qui existent dans la nature.

Pascal Ludwig

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Aristote, Catégories, trad. J. Tricot, Vrin, Paris, 1959.
  • 2 ↑ Frege, G., Écrits logiques et philosophiques, trad. C. Imbert, Seuil, Paris, 1971.
  • Voir aussi : Engel, P., La norme du vrai, Gallimard, Paris, 1989.

→ connotation, nom propre, proposition, référence