nombre

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


Du latin numerus.

Épistémologie, Mathématiques

En théorie des ensembles, élément de l'un des ensembles suivants, dont on retiendra qu'ils incluent successivement l'ensemble qui les « précède » : les entiers naturels N, les entiers relatifs Z (qui peuvent être négatifs), les nombres décimaux D (dont la plupart doivent être notés à l'aide d'une virgule), les nombres rationnels Q (qui correspondent à tous les quotients de nombres entiers), les nombres réels R (que l'on peut mettre en correspondance bijective avec une ligne continue), les nombres complexes C (qui constituent un corps algébriquement clos : le théorème fondamental de l'algèbre y est vérifié).

Ces ensembles, jusque à Q inclus, sont dénombrables, c'est-à-dire que la suite des entiers naturels « suffit » à les numéroter. Avec R, on dispose d'un infini numérique d'ordre supérieur, appelé « puissance du continu » ; ce cardinal n'est pas dénombrable.

L'élaboration de ces concepts fut techniquement difficile et philosophiquement âprement discutée. Les seuls nombres admis dans la tradition euclidienne sont les entiers naturels, sans le zéro ni le un, et l'Encyclopédie méthodique nous rappelle que « dans l'école on a conservé la définition d'Euclide ». L. Carnot n'admet toujours pas la validité de la notion de nombre négatif, et l'apparition paradoxale, au xviie s., des nombres qui seront nommés « complexes » leur valut d'abord le nom de « racines imaginaires ». Il a fallu mobiliser une conception symbolique et formelle de la grandeur et de la mesure pour donner toute la rigueur nécessaire à ce concept général de nombre. Les théories des cardinaux et des ordinaux, dues à G. Cantor, ont à la fois clarifié et étendu l'idée de nombre en considérant des ordres successifs d'infini numérique et en élaborant le concept de nombres transfinis. Ces objets ont alimenté les spéculations. Les possibilités de constructions rigoureuses des ensembles « supérieurs » à partir des précédents (les complexes comme sur-corps des réels, les réels par « coupure » dans les rationnels ou encore comme limites des suites rationnelles ; les rationnels comme classes d'équivalence de Z x Z) ont focalisé l'attention sur la construction axiomatique de l'ensemble des naturels telle que l'ont élaborée notamment Dedekind et Peano à la fin du xixe s. Ce point de vue peut certainement contribuer à conférer à l'arithmétique un statut plus fondamental qu'à la géométrie, celle-ci pouvant être redéployée, ou déduite de celle-là.

Vincent Jullien

→ algèbre, arithmétique, mathématiques