Une vie

L'humble vérité

Guy de Maupassant, Une vie
Guy de Maupassant, Une vie

Roman de Guy de Maupassant (1883).

Le roman est l'histoire à la fois morne et dramatique d'une jeune femme de la petite noblesse normande, dont la vie n'est ponctuée que d'incidents désolants qu'aucune éducation, aucun soutien ni exemple moral ne lui permettront de surmonter. Son hobereau de mari n'est qu'un brutal, odieusement pingre, vaniteux et jouisseur ; la piété ne saurait être un réconfort, le prêtre n'étant qu' « un esprit étroit et fanatique » ; le fils unique se révèle un ingrat qui la dépouille. Seule sa servante saura finalement lui apporter un appui décisif.

Morceaux choisis

Jeanne, sortie la veille du couvent, libre enfin pour toujours, prête à saisir tous les bonheurs de la vie dont elle rêvait depuis si longtemps, craignait que son père n'hésitât à partir si le temps ne s'éclaircissait pas ; et pour la centième fois depuis le matin elle interrogeait l'horizon.

(Chapitre I).

Et la journée s'écoula comme celle de la veille, froide, au lieu d'être humide. Et les autres jours de la semaine ressemblèrent à ces deux-là ; et toutes les semaines du mois ressemblèrent à la première. […] L'habitude mettait sur sa vie une couche de résignation pareille au revêtement de calcaire que certaines eaux déposent sur les objets.

(Chapitre VI).

« C'est à vous que je dois ça tout de même : aussi vous savez que je n'veux pas de gages. Ah ! mais non ! Ah ! mais non !  Et puis, si vous ne voulez point, j'm'en vas ! » […] « Oh ! moi, je n'ai pas eu de chance. Tout a mal tourné pour moi. La fatalité s'est acharnée sur ma vie. »
Mais Rosalie hocha la tête : « Faut pas dire ça, madame, faut pas dire ça. Vous avez été mal mariée, voilà tout. »
Et elles continuèrent à parler d'elles ainsi qu'auraient fait deux vieilles amies.
Le soleil se leva comme elles causaient encore.

(Chapitre XI).