Prométhée

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de mythologie grecque et romaine ».

Bienfaiteur de l'humanité.

Fils du Titan Japet et de la Néréide Asie, ou de l'Océanide Clyméné, et frère d'Atlas, de Ménœtios 2 et d'Épiméthée, Prométhée, doué d'une clairvoyance extraordinaire (contrairement à Épiméthée qui agit avec un temps de retard), ne participe pas au combat qui oppose les dieux aux Titans ; ces derniers ne comptant que sur leur force pour s'emparer du pouvoir, refusent de recourir à la ruse, seul moyen de vaincre le maître de l'Olympe. Son frère Ménœtios périt lors de l'affrontement, foudroyé par Zeus.

Prométhée éprouve une grande haine pour Zeus, qui le lui rend bien. Pourquoi tant d'animosité de la part du dieu tout-puissant ? Parce que, justement, Prométhée a pris parti pour le genre humain contre les dieux, parce qu'il a su trouver la faille dans l'omnipotence divine. Mais rend-il les humains plus heureux et plus libres pour autant ?

Le vol du feu

Selon les traditions les plus récentes, Prométhée crée les premiers hommes dans une argile de Panopée, en Béotie, à laquelle il mêle « une parcelle d'autres éléments pris un peu partout ». C'est Athéna, qui lui voue une certaine affection, qui anime les créatures. On fait parfois intervenir le vol du feu à ce moment : les êtres qu'il vient de créer n'ayant qu'une enveloppe charnelle et menant une vie végétative, Prométhée dérobe dans l'Olympe, ou dans les forges d'Héphaïstos, sur l'île de Lemnos une étincelle de feu qu'il dissimule à l'intérieur d'une tige de férule ; cette étincelle devient ainsi l'âme humaine. Dotés de cette intelligence, les hommes abandonnent leur vie primitive. Révolté par ces trahisons, Zeus châtie Prométhée.

Voir aussi : Épiméthée

Mais de Prométhée, les légendes nous laissent surtout savoir qu'il est le bienfaiteur de l'humanité contre les dieux, contre Zeus en particulier qui ne peut pas dormir tranquille à l'idée que Prométhée ose le défier sur le plan de la sagacité et possède un secret dont il ignore tout.

Lorsqu'il faut connaître quelle nourriture sera attribuée aux hommes et aux dieux, Prométhée joue de ruse afin de favoriser les mortels. Un bœuf vient d'être tué à Sicyone et la question est de savoir quelles parties de l'animal seront consacrées à Zeus, lesquelles cédées aux humains. Prométhée fait le partage : d'un côté il place la meilleure viande camouflée sous la peau du bœuf ; de l'autre côté, il place les os et les abats, mais recouverts d'une graisse appétissante. Puis il demande à Zeus de faire son choix. Sans doute conscient de la tromperie, le maître de l'Olympe choisit néanmoins la part qui a le plus bel aspect. (Voilà pourquoi les mortels honorent les dieux en faisant brûler des os sur des autels recouverts d'encens.)

Plein d'irritation, Zeus décide que les humains seront privés du feu divin et devront manger leur viande crue. C'est alors que Prométhée entreprend de voler l'étincelle dans les ateliers d'Héphaïstos à Lemnos, ou sur la roue du Soleil, et de la rapporter aux hommes. Il profite de son séjour sur terre pour enseigner aux mortels tous les rudiments de la civilisation (l'art de se servir de la chaleur pour travailler le fer ou cuire les aliments, l'art de dompter les chevaux, l'art de cultiver les champs, celui de se soigner par les plantes...) qui leur permettent ainsi de s'éloigner de leur condition bestiale où Zeus se plaît à les voir.

Pandore, puis l'aigle

Les machinations de Prométhée n'échappent pas au maître de l'Olympe, qui décide de se venger des humains. Zeus ordonne à Héphaïstos de façonner une belle jeune fille avec un mélange de terre et d'eau ; puis Athéna, les Heures, les Grâces et Hermès et Zeus lui-même apportent leur concours afin de faire de Pandore une femme parfaite « parée de tous les dons ».

Zeus charge ensuite Hermès d'offrir cette femme à Épiméthée, sachant bien que son frère Prométhée flairera la ruse. Il lui remet également une jarre (une boîte) qui ne devra jamais être ouverte.

Prométhée a beau mettre son frère en garde, Épiméthée ne résiste pas devant la beauté de Pandore ; il l'épouse. Un jour, la jeune femme, poussée par la curiosité, ouvre la jarre : elle libère ainsi tous les maux que devra subir l'humanité et seule l'Espérance reste au fond quand le couvercle s'est rabattu.

Mais cette vengeance n'assouvit pas le maître de l'Olympe, car il sent bien que, s'il s'est vengé des hommes, l'esprit de Prométhée ne lui est pas acquis. Pouvoir et Force traînent Prométhée sur une montagne du Caucase, ou en Scythie (chez Eschyle), où Héphaïstos, contre son gré mais obéissant aux ordres, l'enchaîne.

La peine doit durer trente mille ans : chaque jour, pendant l'éternité, un aigle, ou un vautour, énorme dévorera son foie, qui se reformera pendant la nuit. L'aigle a été engendré soit par Typhon et Échidna, soit par Gaia et Tartare ; on dit encore qu'il est façonné par Héphaïstos et que Zeus le dote de la vie. Quel secret possède donc Prométhée qu'il refuse de livrer à Zeus ? Malgré le supplice, il garde le silence.

Le bienfaiteur mythique

Un peu moins de trente années s'écoulent avant qu'Héraclès ne tue l'animal avec ses flèches ; il intervient auprès de son père pour obtenir la grâce de celui qui n'est puni que pour avoir répandu les bienfaits sur le genre humain. Finalement Prométhée révèle son secret : l'enfant qui naîtra de Thétis, que Zeus s'apprête à épouser, surpassera son père en puissance et le détrônera. Zeus laisse alors Thétis à Pelée et épouse Héra.

Le Centaure Chiron, qui souffre de la blessure que lui a involontairement infligée Héraclès, cède son immortalité à Prométhée ; ce dernier rejoint l'Olympe et les ennemis d'hier se réconcilient. Chiron peut mourir en paix.

Prométhée bienfaiteur de l'humanité ? Certains en ont douté, affirmant qu'au moment du partage du bœuf, Prométhée condamne les hommes à se nourrir de viande ou à périr (les dieux, pour leur part, peuvent se dispenser de nourriture).

Mais il n'en demeure pas moins qu'il sauve les hommes du déluge provoqué par Zeus lorsque celui-ci s'aperçoit combien ces créatures sont mauvaises. Prométhée suggère à son fils Deucalion de construire une arche et d'y emmener sa femme Pyrrha ; il obtient également de Zeus que ces deux êtres repeuplent la terre. Grâce à Prométhée, les hommes ne sont plus ignares et bornés ; ils ne vivent plus comme des insectes au fond de leurs trous obscurs, à ne rien savoir faire de leurs mains ; la connaissance des nombres et de l'alphabet leur permet d'exercer leurs arts, tandis que les champs ne sont plus labourés par leurs semblables mais par des animaux domestiqués.

Variante : Le secret de Prométhée

Comme Zeus désire épouser Thétis, les Parques prophétisent que l'enfant qui naîtra de Thétis dépassera son père en puissance. Prométhée, qui a compris l'oracle, met en garde Zeus. Pour lui prouver sa reconnaissance, Zeus lui pardonne ses fautes et le libère.

Variantes

I. Prométhée n'est pas enchaîné sur une montagne, mais dans une caverne du mont Caucase, dont, d'en bas, on peut voir l'ouverture. On peut même apercevoir les chaînes pendantes, forgées dans une matière difficilement identifiable. En tout cas, depuis la légende, les habitants de la région détestent les aigles ; ils chassent ce rapace en mettant le feu à ses nids.

II. La découverte du feu n'est pas due à Prométhée, mais à Phoronée.

Voir aussi : Phoronée

III. Diodore de Sicile donne une version évhémériste de la légende, en faisant de Prométhée l'inventeur des techniques destinées à fabriquer le feu.

IV. Roi de Scythie, Prométhée est enchaîné par ses sujets parce qu'il se montre incapable de faire face aux inondations du fleuve Aigle qui dévaste les récoltes. Héraclès, de passage, détourne le fleuve vers la mer et délivre le souverain.