édition

(bas latin editio, -onis)

Johannes Gutenberg
Johannes Gutenberg

Reproduction, publication et diffusion commerciale de tout ouvrage imprimé, de toute espèce d'œuvre artistique (disque, estampe, monnaie, etc.).

HISTOIRE

Un « produit des œuvres de l'esprit »

La publication d'œuvres écrites fait de l'édition l'une des plus anciennes professions de la communication et du livre l'objet privilégié de cette activité. Or, celle-ci ne se limite plus aujourd'hui au support livre. En 1971, l'assemblée générale du syndicat national de l'édition en propose la définition suivante : « L'édition comprend les publications de toutes natures réalisées et communiquées au public sous quelque forme et sur quelque support que ce soit, de reproduction et de représentation. » La même année, le IVe plan précise que l'édition est un « produit des œuvres de l'esprit et [que] la matérialisation ou la distribution de celles-ci ne sont que des activités annexes qui peuvent être, et qui sont, la plupart du temps, sous-traitées ». Éditer, c'est donc permettre la communication entre un émetteur et un récepteur, par l'intermédiaire d'un support qui n'est plus nécessairement un livre.

L'apparition du métier d'éditeur fait suite à l'invention de l'imprimerie. Celle-ci donne naissance à de nouveaux types intellectuels. Ainsi, le libraire, à la fois imprimeur et éditeur – car il cumule alors des tâches aujourd'hui distinctes –, est un entrepreneur qui installe un atelier et une presse pour assurer la fabrication de livres qu'il a souvent choisis et préparés lui-même, et dont il assure ensuite la commercialisation. Les fonctions spécifiques de l'éditeur, dans la chaîne du livre, ne se définissent que progressivement par rapport aux professions d'imprimeur et de libraire. L'« éditeur responsable » date de l'époque de Napoléon.

Naissance et expansion de l'édition

Gutenberg n'est pas un inventeur, mais un innovateur. L'idée d'imprimer au moyen de bois gravé est née en Extrême-Orient, où le papier est connu dès le début de notre ère. Au vie s., les Chinois utilisent déjà la xylographie pour imprimer des images sur la soie, puis sur le papier. Au xive s., la Corée découvre la technique de l'imprimerie en utilisant des caractères mobiles métalliques.

La révolution de Gutenberg

Johannes Gensfleisch, dit Gutenberg, naît à Mayence entre 1397 et 1400. Il est le premier à maîtriser l'ensemble du processus typographique et, vers 1450, il passe contrat avec Johann Fust, un bourgeois aisé, qui lui avance les fonds nécessaires à l'acquisition d'un matériel d'imprimerie. La Bible latine de Gutenberg, son premier ouvrage imprimé, date de 1455 : richement enluminée, imprimée en caractères gothiques, cette Bible est dite « à quarante-deux lignes » (42 lignes par colonne). Or Gutenberg est mis hors course par le procès qu'il perd contre Fust. Ce dernier s'associe alors avec Peter Schöffer et, le 14 octobre 1457, tous les deux font paraître le Psautier de Mayence (Mainzer Psalterium), qui est le premier ouvrage daté et signé de ses typographes. Ce psautier comporte aussi la première publicité imprimée, ainsi que l'adresse et la marque des éditeurs. Directement liée à l'art du métal, l'imprimerie moderne va l'être également à la fabrication du papier.

La diffusion de l'imprimerie

En moins de trois décennies, l'imprimerie se répand en Europe. Les Allemands en deviennent naturellement les premiers propagateurs : leurs typographes introduisent la nouvelle technique dans les principales villes des Pays-Bas, d'Italie, de France et d'Espagne. Ce sont les gens d'Église qui attirent le plus les imprimeurs, car la première impression est le plus souvent celle d'un ouvrage liturgique (Bible, bréviaire, missel ou hagiographie destinée à l'édification des fidèles). Les premiers ateliers ouvrent à Rome en 1465 et à Paris en 1466. Dans toute l'Europe, plus de cent dix villes en sont dotées dès 1480. La vie culturelle et intellectuelle élargit ses horizons, en trouvant dans le livre imprimé un support qui déborde le cadre ecclésiastique pour toucher la haute société urbaine. La fabrication du livre reste longtemps artisanale. Le souci de l'imprimeur n'est pas encore le tirage : il apporte tout son soin à réaliser des éditions aussi luxueuses que les ouvrages calligraphiés.

En 1470, l'érudit Guillaume Fichet (1433-vers 1480) fait installer une presse au collège Saint-Bernard, à Paris. Vers 1500, une quarantaine de villes françaises possèdent leur atelier. Parmi elles, deux centres se détachent : Lyon et Paris. Lyon bénéficie de l'atout économique de ses foires et de la présence fréquente de la Cour pendant les guerres d'Italie. Paris est le siège du pouvoir royal. Avec Robert Ier Estienne (1503-1559), qui s'illustre notamment en utilisant les caractères gravés par Claude Garamont (1499-1561) – encore utilisés pour la bibliothèque de la Pléiade –, est fondée une véritable dynastie d'imprimeurs. William Caxton (1422-1491) à Londres, Anton Koberger (vers 1445-1513) à Nuremberg, Christophe Plantin (vers 1520-1589) à Anvers, et les Elzévir, à partir de 1580, à Leyde, sont les autres grands noms qui font entrer l'édition dans une nouvelle ère.

L'émergence du métier d'éditeur

Le métier d'éditeur est en partie inventé par le Vénitien Alde Manuce (1449-1515), qui est à la fois artisan et humaniste. Créateur, en 1500, du caractère italique inspiré de l'écriture de Pétrarque, il réalise les éditions princeps des classiques grecs et latins en formats aisément transportables, avant de travailler à la mise au point d'une édition scientifique de ces mêmes textes. Conseillé par un comité de lecture, l'Accademia Aldina, il élabore en fait une politique éditoriale dont les priorités répondent aux besoins de son temps. Il achète des presses, fait graver des caractères et crée un atelier de reliure avec l'aide de mécènes. Aux institutions religieuses et universitaires, mais aussi aux particuliers, il vend ses propres ouvrages et ceux de ses confrères européens avec lesquels il entretient des relations commerciales régulières. Alde Manuce intervient dans toutes les fonctions de la chaîne éditoriale. Sa pratique préfigure celle de l'éditeur au sens moderne du terme : il choisit ou commande les manuscrits, préside à leur mise au point définitive, conçoit la forme matérielle du futur livre qu'il compose, imprime, relie, enfin il s'efforce d'en assurer la diffusion.

Une activité en liberté surveillée

Le monde de l'imprimerie est d'ores et déjà socialement avancé et revendicatif. Mais le livre s'adresse encore à des privilégiés de la culture et le dogme du livre émancipateur doit être largement nuancé. La révolution de l'imprimé est surtout le fait d'une avant-garde ; elle n'a pas le même sens pour tous. La culture orale prédomine chez les paysans et une partie des citadins. Les livres sont rares, à l'exception de la Bible, dans les inventaires après décès des personnes pauvres habitant les villes fortement alphabétisées du nord de la France. Cette marchandise est d'ailleurs contrôlée par les autorités : en 1546, l'imprimeur Étienne Dolet, qui exerçait à Lyon, est pendu et brûlé à Paris en raison de son admiration pour l'Antiquité païenne ; la Sorbonne censure Rabelais et le pouvoir monarchique met au pas les imprimeurs érudits qui diffusent les textes sacrés en langue « vulgaire », et auxquels il est interdit de faire paraître des écrits irrespectueux envers le roi, la religion et les mœurs.

Au xviiie s., les relais de l'édition sont les salons et les clubs. Mais les idées nouvelles du siècle des Lumières doivent éviter la censure : ainsi, De l'esprit des lois (1748) et Candide (1759) sont publiés à Genève ; Julie ou la Nouvelle Héloïse (1761) l'est à Amsterdam. Dans la seconde moitié du siècle, les gens du livre (imprimeurs, libraires, colporteurs et artisans) peuplent les cachots de la Bastille. C'est l'époque où Diderot expose, dans sa Lettre sur le commerce de la librairie (1767), les difficultés de cette nouvelle profession ; l'époque aussi où la division du travail pénètre dans le domaine de l'édition.

L'édition à l'ère industrielle

En 1783, François Ambroise Didot (1730-1804) améliore la presse à bras, qui était restée quasiment inchangée depuis Gutenberg. Progressivement, les processus de reproduction de type industriel permettent de diffuser les ouvrages en plus grand nombre et pour un moindre coût. Le xixe s. résout le problème du support, en l'occurrence le papier, dont l'usage est limité par la rareté de la matière première – le chiffon – et par les délais de fabrication. L'introduction de la fibre végétale et l'essor du machinisme fournissent les conditions matérielles nécessaires à augmenter la production de livres. L'éditeur devient dès lors un industriel, de plus en plus sensible au risque financier et à la notion de rentabilité.

La fondation des maisons d'édition

La première révolution industrielle, qui coïncide essentiellement en France avec la période du second Empire, favorise la création et le développement des entreprises. Le secteur de l'édition n'échappe pas à la règle. Pierre Larousse (1817-1875), fils d'aubergiste et ancien élève de l'école normale de Versailles, fonde sa maison (la Librairie Larousse et Boyer) en 1852 ; Colin, Delagrave et Dunod se développent ; Hachette crée en 1857 la « Bibliothèque rose » à l'intention de la jeunesse, public jusque-là relativement délaissé. Les modes de diffusion se transforment, grâce à de nouveaux moyens de transport. Le chemin de fer facilite les communications : dès 1852, dans une note adressée aux différentes compagnies de chemins de fer françaises, Louis Hachette expose les lignes générales « d'une grande opération de librairie qui, indépendamment des avantages qu'elle procurerait aux compagnies, serait aussi utile qu'agréable au public ». La compagnie des Chemins de fer du Nord est la première de toutes, en 1852, à concéder à la Librairie Hachette « le droit exclusif de faire vendre dans l'intérieur de toutes les stations et gares dudit chemin de fer les ouvrages […] publiés par MM. L. Hachette et Cie ». En 1853, quarante-trois bibliothèques sont installées dans les principales gares ; huit ans plus tard, on en dénombre cent soixante-deux. En quelques années, les principales compagnies de transports maritimes et ferroviaires signent le même type d'accord.

La suppression, en 1870, du brevet instauré sous le premier Empire – mesure coercitive destinée à limiter le nombre d'éditeurs, et ainsi à mieux contrôler les contenus des ouvrages – suscite une multitude de vocations. Les lois scolaires de Jules Ferry, entre 1882 et 1885, ont notamment pour conséquence d'augmenter considérablement le nombre de lecteurs potentiels. Les points de vente spécialisés se multiplient, ce qui implique pour l'éditeur le développement d'une administration commerciale complexe. Au niveau européen, le livre est un support privilégié pour véhiculer les spécificités culturelles de même que les revendications nationalistes dans le cadre de sociétés de plus en plus alphabétisées. Plus largement, le livre imprimé conquiert le monde et devient un objet de consommation de masse. Le phénomène du best-seller existe bel et bien : en 1862, les Misérables de Victor Hugo sont publiés simultanément en huit langues.

Les premières collections populaires

Il existe un marché du livre depuis le début du xviie s. À Troyes, Nicolas Oudot invente les livrets de colportage, en l'occurrence des opuscules édités à moindres frais, sur du papier de qualité médiocre, et brochés sous une couverture de papier bleue. Vendus par les colporteurs dans les villes, puis dans les campagnes, les ouvrages de cette « Bibliothèque bleue » – romans de chevalerie, livres utilitaires, œuvres pseudo-scientifiques et surtout moralisatrices –, ont beaucoup de succès pendant trois siècles. Au xixe s., au fur et à mesure que se développent les chemins de fer, cette expansion se poursuit en France comme en Grande-Bretagne avec, respectivement, Louis Hachette et W.H. Smith. Enfin, bien que l'on ait coutume de dire que la naissance du livre au format de poche date du lancement à Londres, en 1935, des Penguin Books par Allen Lane, de nombreuses collections à petits prix et à grands tirages font leur apparition dès le milieu du xixe s., en Europe occidentale et aux États-Unis. C'est le cas des « romans de quatre sous », en France, ou des celebrated works de John Dick, en Grande-Bretagne.

          

Le livre au format de poche



Le livre au format de poche est l'objet de débats depuis son lancement véritable en France, en 1953. Le souci de toucher une clientèle plus vaste, en augmentant les tirages et en baissant les prix, est ancien. Le Livre de poche proprement dit et les collections analogues s'inscrivent dans la politique de l'édition à prix réduit tout en se conformant aux normes en vigueur aux États-Unis. Dans un premier temps, on y publie des auteurs, classiques ou contemporains, de grand renom. Dans un second temps, au fur et à mesure que s'épuise le fonds « classique », on y ajoute des livres à succès récents, ainsi que des essais.

L'édition de poche, dominée par le genre romanesque, suscite la création de rayons et de points de vente spécialisés (les « pochothèques »). Elle a beaucoup contribué à la modernisation des techniques d'impression. Grâce à ses prix attractifs, elle a permis de répondre à l'accroissement de la demande et, en même temps, de rompre avec la conception du livre comme objet précieux pour lui substituer celle du livre devenu produit de consommation courante, disponible en librairie traditionnelle comme en grande surface.

La fonction éditoriale

L'éditeur est à la source de la chaîne du livre, qui commence à la conception de ce dernier et qui s'achève à sa mise en vente. L'impression est, aujourd'hui, une activité dissociée de l'édition, et la plupart des maisons d'édition se sont séparées de leurs imprimeries. La spécialisation de l'éditeur s'est donc affirmée et renforcée.

La pratique éditoriale

L'intérêt de l'éditeur est de constituer un fonds, qui peut être spécialisé ou pluridisciplinaire, et de le diffuser.

Les auteurs

Soit l'éditeur reçoit la matière à éditer directement d'un auteur, soit il en passe commande à un ou plusieurs auteurs (écrivains, traducteurs, illustrateurs, photographes…), dans le cadre d'un programme ou d'une collection. Ce que l'on appelait naguère le « manuscrit » d'auteur, puis la copie après l'apparition de la machine à écrire, revêt de plus en plus une forme numérisée : celle de la disquette d'ordinateur ou celle de l'e-mail (le courrier électronique, officiellement orthographié « mél »).

Dans le cas de « manuscrits » spontanés, l'éditeur s'en remet à l'avis d'un comité de lecture. Pour les œuvres de commande, qui concernent huit livres sur dix, l'éditeur définit les objectifs et les caractéristiques des ouvrages, le sujet et le calibrage des contributions, ainsi que leur niveau d'accessibilité en prévision de la cible (part du lectorat) qu'il cherche à atteindre. Le succès venant, de nombreux auteurs proposent à leur tour leur collaboration ou un projet de livre. Le rôle de l'éditeur est alors d'arbitrer parmi le foisonnement des offres et son souci est de fidéliser les meilleurs de ses auteurs.

Les services éditoriaux

Entouré de son équipe de collaborateurs, l'éditeur fait la mise au point des originaux en fonction du futur produit qu'il a conçu et qu'il publie. Le travail de vérification et de préparation auquel il faut procéder avant la mise en fabrication d'un ouvrage est particulièrement important, car les spécialistes d'un domaine n'ont pas forcément une connaissance poussée des contraintes éditoriales. Les métiers de l'informatique éditoriale revêtent un rôle de plus en plus important en raison de la généralisation de la P.A.O. et des méthodes qui lui sont liées (par exemple, application des langages SGML, HTML et XML).

Une fois que l'éditeur a assuré et financé la production d'un ouvrage, il doit le faire connaître aux acquéreurs potentiels, pour limiter au minimum sa prise de risque. Pour cette raison, le marketing éditorial fait la promotion des nouveautés en ayant recours aux médias et aux manifestations du livre, et coordonne son action avec celle des réseaux de diffusion (constituée par les commerciaux de la « force de vente ») et de distribution (constituée par les prestataires de services des diffuseurs, chargés d'approvisionner les surfaces de vente et d'établir la facturation). Situé au carrefour du réseau complexe qui relie les auteurs, les forces de production et le public, l'éditeur doit donc montrer des compétences à la fois humaines et techniques.

          

Les manifestations du livre en France



Angoulême : Festival international de la bande dessinée.
Cannes : Milia.
Paris : Salon du livre ; Marché de la poésie.
Brive-la-Gaillarde : Foire du livre.
Montreuil : Salon du livre de la jeunesse.


La course au succès

Le succès n'est jamais acquis d'avance : à titre d'exemple, en 1952, lors de la parution du chef-d'œuvre de Samuel Beckett En attendant Godot, 125 exemplaires seulement furent vendus. La saison des prix littéraires est vitale pour les maisons d'édition, qui espèrent obtenir le « succès de l'année ». Ces prix déclenchent en effet des comportements spécifiques, et l'on sait, par exemple, qu'il y a des acquéreurs systématiques des prix Goncourt. Les médias audiovisuels (émissions littéraires à la télévision, interviews d'auteurs à la radio) focalisent aussi l'attention du public sur certaines parutions. Mais le marché reste en grande partie imprévisible. Tandis que des succès annoncés ne se vérifient pas, d'autres ouvrages connaissent une fortune a priori insoupçonnée. Parfois, un titre accrocheur (par exemple, le Harcèlement moral, sorti chez Syros en 1998) ou l'esthétique de la jaquette contribuent à dynamiser les ventes. Le succès facilite la cession des droits à l'étranger, qui est une source de revenu importante des maisons d'édition. Ces droits sont versés pour la traduction d'une œuvre ou l'adaptation d'un produit didactique, tel qu'une encyclopédie. Les foires internationales du livre sont un des lieux privilégiés pour les négocier.

          

Les principales foires internationales du livre



Le Caire - Beyrouth - Bruxelles - Mexico - Londres - Bologne (livre pour la jeunesse) - Buenos Aires - Tokyo - São Paulo - Prague - Varsovie - Séoul - New York (livre d'art) - Pékin - Moscou - Francfort - Montréal.

L'investissement financier

L'économie du livre repose sur le calcul de frais fixes (dont les frais généraux), qui sont indépendants du tirage (nombre d'exemplaires imprimés), et de frais variables (papier, droits de reproduction iconographique, impression, façonnage, reliure), qui sont proportionnels au tirage. Les uns et les autres sont comptabilisés sur un document appelé compte d'exploitation prévisionnel.

Au total, les budgets, qui doivent financer les coûts de production (incluant toutes les étapes de l'étude de marché à la mise en vente) dans une perspective de rentabilité, et donc de profit, varient selon les caractéristiques du produit – selon qu'il s'agit d'un roman, d'un livre d'art ou d'une encyclopédie multimédia –, selon les partis pris de mise en page et d'illustration, selon la complexité de la composition, la masse de corrections nécessaires ou encore, et de plus en plus, selon les performances attendues de l'affichage des données à l'écran. Quant aux droits d'auteur fixés par contrat, ils sont proportionnels aux ventes ou forfaitaires (dans le cas d'une œuvre collective). Le contrat d'édition, régi par la loi du 11 mars 1957, emporte cession du droit patrimonial de l'auteur au profit de l'éditeur. La cession est, en principe, réalisée à titre onéreux.

L'édition contemporaine

Le monde occidental industrialisé occupe une place prépondérante sur le marché mondial de l'édition et, a fortiori, sur celui de l'édition multimédia. Même si la production de livres augmente dans les pays en développement, en partie grâce à l'action entreprise par l'Unesco, leur diffusion se heurte à la faiblesse du niveau de vie – l'achat d'un livre n'étant pas une priorité –, à la pénurie de bibliothèques et au morcellement linguistique – malgré l'existence de langues nationales.

Le marché mondial de l'édition en 2000

LE MARCHÉ MONDIAL DE L’ÉDITION EN 2000
(Exportations par zone géographique)

Zone géographique

Part du marché (en %)

Union européenne

42

Amérique du Nord

17

Europe non communautaire

13

D.O.M. - T.O.M.

8

Afrique noire francophone

5

Maghreb

4

Asie et Océanie

4

Proche et Moyen-Orient

2

Europe centrale et orientale

2

Amérique latine

2

Divers

1

 

 

Dans les pays à forte consommation culturelle, l'avenir du livre ne va pas sans susciter de multiples interrogations sur l'évolution du secteur. La suprématie du best-seller, en littérature générale, pose la question de la qualité et celle des choix éditoriaux qui devraient avoir pour objet de la garantir. Le développement d'une littérature populaire de masse, accéléré par la décision des grandes surfaces de vendre les livres et les outils multimédias comme n'importe quelle marchandise, pose un autre type de problème : celui de la pérennité du commerce de détail, représenté par la petite librairie de proximité (dont l'origine remonte au xve s.).

L'évolution de l'édition en France

La France est l'un des pays du monde où le processus de concentration – à la fois horizontale et verticale – est le plus fort : deux groupes de dimension internationale, Vivendi Universal Publishing et Hachette, s'y étaient constitués. Or, en 2002, la mise en vente des maisons d'édition de Vivendi Universal Publishing et l'offre de rachat faite par Hachette ont créé une situation à risques monopolistiques pour les marchés du dictionnaire et du livre scolaire. À Bruxelles, la Direction générale de la concurrence a été appelée à rendre son avis : la Commission européenne a tranché en autorisant Hachette à ne conserver que 40 % des actifs de Vivendi Universal Publishing (devenu entre-temps Editis) qu'il avait acquis. Il est désormais le seul leader de l'édition française et, après le rachat de l'américain Time Warner Book Group en 2006, le numéro 3 de l'édition dans le monde.

La constitution des grands groupes

La période allant des années 1960 aux années 1980 coïncide avec la première phase de concentration, principalement autour de Hachette, des Presses de la Cité, de la Compagnie européenne de publication (C.E.P.) et, à un échelon moindre, de Gallimard et de Flammarion. En 1982, Jean-Luc Lagardère, patron de Matra, acquiert Hachette avec le concours de Paribas : une firme industrielle prend ainsi possession d'une maison d'édition. À l'étroit sur le marché national, le groupe s'attache des firmes étrangères (publiant en langues anglaise et espagnole) et prend progressivement une dimension mondiale en affirmant sa présence dans le domaine du multimédia (CD-ROM et réseau Internet).

En 1988, le rapprochement qui se fait entre les Presses de la Cité (comprenant, entre autres, les marques Bordas, Dunod, Gauthiers-Villars, Julliard, Plon, Perrin et France Loisirs, chef de file des « clubs du livre ») et le groupe C.E.P. Communication (Larousse, Nathan, Le Robert) permet de constituer le Groupe de la Cité, lequel est absorbé par C.E.P. Communication en 1996. Cet ensemble a pour actionnaire principal la Compagnie générale des eaux, qui donne naissance en 1998 au groupe Vivendi, dont Havas (renommé en 2001 Vivendi Universal Publishing) représente le pôle édition (maisons issues des divers regroupements) et multimédia (CD-ROM, logiciels de jeu, services en ligne…).

Face à ces géants, des maisons comme Gallimard, Albin Michel ou les Éditions de Minuit se sont efforcées de préserver leur indépendance. Flammarion a intégré le groupe italien Rizzoli et Le Seuil a été absorbé par le groupe La Martinière ayant des actionnaires américains. L'édition française offre ainsi un paysage contrasté, allant de la firme multinationale à la maison artisanale, bien représentée en province. Au demeurant, le phénomène de concentration se double d'un phénomène de polarisation autour de Paris : la majorité des auteurs y vit et la majorité des titres nouveaux y est éditée ; les médias sont aussi, pour l'essentiel, installés dans la capitale.

Les mutations du marché du livre

Dans sa fameuse Lettre, Diderot s'était montré précurseur en soulignant les spécificités d'un métier dans lequel, sur dix ouvrages édités, un seul permet, le cas échéant, de faire du profit. La « crise » de l'édition n'est donc pas récente, mais, plus que jamais de nos jours, le secteur est soumis aux contraintes économiques. Aussi la diffusion et la distribution, qui absorbent plus de la moitié du coût d'un ouvrage, sont-elles des fonctions essentielles du métier d'éditeur en vue de relancer les achats de livres.

Le marché du livre en France en 2000

LE MARCHÉ DU LIVRE EN FRANCE EN 2000

Domaines

% du chiffre d’affaires

% du total des exemplaires

Littérature générale

18,9

28,3

Sciences (y compris sciences humaines et sociales) et techniques

15,9

6,4

Enseignement

15

16

Livres pratiques

14,7

16,9

Encyclopédies et dictionnaires

11,3

2,4

Livres pour la jeunesse

9,3

17,3

Livres d’art

5

2,1

Bandes dessinées

4,1

5,7

Actualité

2,5

1,8

Religion

1,9

1,8

Ouvrages de documentation

0,8

0,6

Ésotérisme et occultisme

0,4

0,7

Les canaux de vente de livres

L'éditeur dispose de divers canaux de vente. La vente en librairie lui permet de toucher directement le public qu'il cible par le système de l'office : en vertu de l'accord passé entre un distributeur et un libraire, ce dernier reçoit d'office, dès parution, un certain nombre d'exemplaires des nouveautés (on parle alors de « mise en place ») et, en cas d'invendus, il dispose de quatre à douze mois pour en effectuer le retour. On constate, toutefois, que l'office, qui a permis d'attirer l'attention sur de jeunes auteurs, perd de son importance au profit du réassort, facilité par l'informatisation de la distribution : le libraire passe commande et gère son fonds en fonction de ses besoins.

Les canaux de vente des livres en France en 2000

LES CANAUX DE VENTE DES LIVRES EN FRANCE EN 2000

Canaux de vente

Part du marché du livre*

Diffusion / Distribution

66 %

V.P.C. /Clubs

16 %

Ventes directes

12 %

Grossistes

3 %

Courtage

2 %

Collectivités

1 %

* Estimation : 30 milliards de francs (4,6 milliards d'euros).

L'éditeur peut aussi se faire une clientèle par voie de presse : la publicité anticipe le lancement d'un ouvrage, l'annonce puis l'appuie, mais, en raison du coût élevé des campagnes publicitaires, peu d'auteurs en bénéficient. S'il s'agit d'une production spécialisée (encyclopédies, ouvrages scientifiques ou techniques), l'éditeur peut encore avoir recours aux pages Web sur Internet et, plus traditionnellement, au mailing (publipostage) ou au courtage (démarchage à domicile) – même s'il est vrai que ce dernier est en complet recul.

La formule club

La vente de livres en « club » est l'une des formes de la vente par correspondance (V.P.C.). Cette formule remonte à l'entre-deux-guerres. Après s'être développée dans les pays anglo-saxons, elle s'implante aussi en France sous l'impulsion de France Loisirs (né de l'association des Presses de la Cité et du groupe Bertelsmann, géant allemand de l'édition). Réunissant dans son catalogue des ouvrages qui, parce qu'ils ont neuf mois d'existence, peuvent être vendus en club à un prix inférieur au prix public – sans contrevenir à la loi Lang de 1981 sur le prix unique –, France Loisirs touchait, au début des années 1990, un ménage sur cinq. Comme l'édition de poche, la formule club privilégie des titres qui ont déjà rencontré un succès en édition courante.

          

La loi Lang sur le prix unique du livre



Mettant fin aux régimes successifs du « prix conseillé », qui laissait une marge de remise ou de majoration du prix de référence, puis du « prix net », qui supprimait tout prix de référence, la loi promulguée le 10 août 1981 a instauré le « prix unique » du livre, fixé par l'éditeur (ou l'importateur) de ce dernier. La remise de 5 % que tous les détaillants peuvent pratiquer sur leur lieu de vente demeure cependant permise.

L'objet de la loi est de soustraire le livre, considéré comme un bien culturel spécifique, aux mécanismes stricts du marché et de satisfaire par là même à trois objectifs principaux : celui de l'égalité de tous devant le livre, qui doit être vendu au même prix sur l'ensemble du territoire national ; celui de la sauvegarde d'un réseau décentralisé de distribution, qui vise au maintien de la librairie traditionnelle aux côtés de la grande surface ; celui du pluralisme de la création éditoriale, qui permet aux ouvrages spécialisés, « à rotation lente », de ne pas être défavorisés par rapport aux best-sellers et autres ouvrages « à rotation rapide ». La conséquence d'une telle loi, dont l'élargissement à tous les pays de l'Union européenne est en cours d'examen, est que l'acheteur d'un livre n'a plus à comparer les prix de vente pour se déterminer.

Le sort des invendus

Les incertitudes du goût tout autant que les erreurs d'appréciation suscitent des méventes et engendrent des stocks coûteux d'ouvrages invendables : certains d'entre eux seront remis ultérieurement sur les rayons ; beaucoup iront au pilon, afin d'être transformés en pâte à papier ; d'autres, enfin, alimenteront un second circuit, tel que celui de Maxi-Livres, apparu au début des années 1980. L'idée de départ était de racheter des invendus à moitié prix et de les écouler dans des réseaux de soldes ne faisant pas concurrence aux libraires traditionnels. Or, le dérapage de l'expérience à la suite de la publication, en 1996, d'un dictionnaire nouveau, et non pas soldé, a abouti à constater en justice un acte de « parasitisme commercial ».

La grande distribution

L'attitude des maisons d'édition à l'égard de la grande distribution est riche d'enseignements. Les supermarchés et hypermarchés ont d'abord été perçus comme des lieux d'achat profondément étrangers à la filière du livre. Mais, fournissant un débouché supplémentaire à des ouvrages qui satisfont les goûts du grand public, ils sont devenus des interlocuteurs privilégiés pour les éditeurs de livres au format de poche (voir encadré ci-après) ou de semi-poche et ceux qui se sont spécialisés dans des genres reconnus comme porteurs : outre les collections de poche, les best-sellers, les ouvrages pratiques, les livres pour la jeunesse (jugés par les libraires comme les plus évolutifs de tous), les bandes dessinées.

Au rôle spécifique des géants de la distribution dans le commerce des livres s'ajoute celui des grandes surfaces spécialisées : magasins F.N.A.C. (dotés du dispositif Ariane pour la prise de commandes automatisée), Virgin, Extrapole ; tous ensemble ne laissent que 37 % des ventes aux librairies traditionnelles (librairies générales et librairies-maisons de la presse). Autres conséquences : le marché du livre entre dans une logique de flux tendus qui ne lui est pas familière, et l'éditeur, qui a de plus en plus affaire à des centrales d'achat, perd l'essentiel de ses relations avec sa clientèle.

La répartition des livres dans les foyers français

LA RÉPARTITION DES LIVRES DANS LES FOYERS FRANÇAIS (en %)

Dictionnaires

82

Livres de cuisine

73

Livres d’histoire

56

Encyclopédies

55

Romans autres que policiers

55

Bandes dessinées

51

Romans policiers

50

Littérature classique

46

Livres pour enfant

45

Livres de bricolage

35

Beaux livres

33

Livres de poésie

30

Livres d’art

29

Livres scientifiques

28

Livres professionnels

27

Livres de décoration

25

Essais

24

Livres d’actualité

21

 

Une situation en demi-teinte

Le processus de mutation du monde de l'édition française est donc complexe, car il lui faut se resituer dans des contextes culturels perpétuellement changeants. Dans l'ensemble, le tirage moyen des ouvrages est en baisse – ainsi que le chiffre d'affaires –, mais la production de titres tend à augmenter : environ 50 000 par an (nouveautés et nouvelles éditions confondues).

La politique du prix réduit

Le livre au format de poche et le livre à petit prix ont les faveurs du public. Si le nombre des « gros » lecteurs – ceux qui lisent plus de 25 livres par an – est tombé à moins de 20 % du total des acheteurs de livres à la fin des années 1980, celui des « petits » lecteurs – ceux qui lisent entre un et neuf livres par an – est passé de moins de 25 % à plus de 30 %. Cette augmentation de la part des petits lecteurs est la conséquence directe du développement des collections à prix bas. De fait, il est fréquent que le public attende la sortie d'un titre en poche pour se le procurer.

          

Le livre au format de poche



Le livre au format de poche est l'objet de débats depuis son lancement véritable en France, en 1953. Le souci de toucher une clientèle plus vaste, en augmentant les tirages et en baissant les prix, est ancien. Le Livre de poche proprement dit et les collections analogues s'inscrivent dans la politique de l'édition à prix réduit tout en se conformant aux normes en vigueur aux États-Unis. Dans un premier temps, on y publie des auteurs, classiques ou contemporains, de grand renom. Dans un second temps, au fur et à mesure que s'épuise le fonds « classique », on y ajoute des livres à succès récents, ainsi que des essais.

L'édition de poche, dominée par le genre romanesque, suscite la création de rayons et de points de vente spécialisés (les « pochothèques »). Elle a beaucoup contribué à la modernisation des techniques d'impression. Grâce à ses prix attractifs, elle a permis de répondre à l'accroissement de la demande et, en même temps, de rompre avec la conception du livre comme objet précieux pour lui substituer celle du livre devenu produit de consommation courante, disponible en librairie traditionnelle comme en grande surface.

En outre, certains comportements ont évolué. Ainsi, les étudiants ont tendance à acheter « utile », c'est-à-dire à acquérir les ouvrages de référence indispensables à la préparation de leurs examens, puis à s'en défaire une fois le diplôme obtenu ; à leur intention, les collections universitaires à prix modique se sont donc multipliées. En se généralisant, le prix réduit a plusieurs effets : il supprime les repères de prix auxquels le lecteur se reconnaissait ; il contraint l'éditeur à baisser le prix de vente des ouvrages des collections dites « grand public » ; il entrave le succès de librairie des ouvrages au prix de revient élevé (beaux livres, livres d'art) ; il réduit à la fois le montant des droits d'auteur, la marge commerciale de l'éditeur et celle du libraire, pour une même charge de travail.

Évolution du livre au format de poche

ÉVOLUTION DU LIVRE AU FORMAT DE POCHE

 

1995

2000

Vente de livres (en francs [euros])

1 605 000 [244 681]

1 782 000 [271 664]

Taux de variation du chiffre d'affaires

5 %

5,1 %

Titres

11 496

11 918

Exemplaires

144 000 000

143 000 000

Tirage moyen

12 530

11 991

La surproduction éditoriale

La production éditoriale, par son volume même, témoigne d'une créativité qui dissimule toutefois des différences considérables de qualité intrinsèque et de stratégie commerciale. Sujets à la mode et personnes en vogue forment une grande part de sa substance, et la tentation pour les « coups » y demeure fréquente : les meilleurs des « coups » sont des produits dérivés de l'audiovisuel ou touchant une personnalité publique ; ils ont pour vocation de coller à l'actualité et ne visent qu'au court terme. Aussi plus de la moitié des livres qui sont vendus au cours d'une année ne sont-ils pas en projet lorsque celle-ci commence, et nombre d'entre eux auront une existence éphémère. Certaines maisons d'édition, en revanche, ont pour politique de faire coexister sur leur catalogue les livres destinés à la consommation de masse, les ouvrages de référence (tels que les classiques de la littérature ou les encyclopédies) et les collections à caractère expérimental, publiant des œuvres dont la rentabilité n'est pas assurée. Il reste que la plupart d'entre elles attestent une tendance à l'uniformisation des titres, qui nuit à l'innovation.

L'édition et les nouvelles technologies

L'informatique appliquée à l'édition

Pour beaucoup d'analystes, la révolution de l'informatique fait peser des menaces contre le livre, comme l'a prédit, dès 1962, l'auteur de la Galaxie Gutenberg, le Canadien Marshall McLuhan. L'électronique se révèle, certes, un facteur déstabilisant pour le livre, mais ce n'est pas le premier : le livre a déjà subi les assauts successifs de la presse, du cinéma, de la radiodiffusion, de la télévision, et doit encore se défendre contre la reprographie générant le « photocopillage ». En outre, l'informatique est un auxiliaire précieux du monde de l'édition ; depuis les années 1970, elle est utilisée pour la saisie des textes et pour la mise en page (P.A.O., infographie). Surtout, elle est à l'origine de l'explosion du multimédia.

          

« Photocopillage » et prêt gratuit



La croisade contre le « photocopillage » est l'un des combats les plus âpres qui s'offrent au monde de l'édition d'aujourd'hui. La pratique illégale de la photocopie est courante et cause aux auteurs un préjudice que l'on chiffre à plusieurs dizaines de millions de francs pour le seul secteur de l'enseignement en France. En 1996 a été créé le Centre français d'exploitation du droit de copie (C.F.C.), dont l'une des premières actions a été d'engager des négociations avec les principales institutions concernées, parmi lesquelles le ministère de l'Éducation nationale.

Le C.F.C., épousant la cause d'une partie des auteurs, s'insurge également contre la notion de prêt gratuit en bibliothèque. Le principe de la gratuité de la culture pour tous ne lui rend pas la tâche facile. Mais le prêt propose effectivement une alternative à l'achat, et entraîne donc un manque à gagner. L'idée de ceux qui combattent le prêt gratuit serait, pour certains, de majorer l'abonnement que les usagers acquittent d'une somme forfaitaire rémunérant les prêts ; pour d'autres, d'imputer cette somme au budget des collectivités locales. Le problème est délicat, dans la mesure où les bibliothèques et médiathèques publiques constituent des débouchés importants pour les éditeurs, tout comme, d'ailleurs, les établissements scolaires et universitaires. Cela rend compte, en régime démocratique, de la nécessité d'améliorer les relations souvent conflictuelles entre la puissance publique et le milieu de l'édition. Le partenariat est d'autant plus net, voire tutélaire, en France que la présence de l'État dans l'économie et dans la société y est plus marquée qu'ailleurs.

L'ère du multimédia

Le terme « multimédia » s'applique à la combinaison de divers modes d'expression sur un même support au moyen de la numérisation que réalise la programmation informatique. Il a pour caractéristique principale l'« interactivité », en l'occurrence les actions réciproques en mode dialogué entre l'utilisateur et l'outil. L'investissement dans le multimédia est un choix stratégique qui s'impose donc de plus en plus à l'éditeur. Le développement du CD-ROM et celui de l'Internet lui permettent de faire paraître un ouvrage sur support papier et en consultation électronique, ce qui lui offre la possibilité d'une logique de double commercialisation. Aussi, dès les années 1990, les maisons d'édition se sont-elles mises à exploiter leurs ouvrages de référence, dictionnaires ou encyclopédies, sur CD-ROM, moins largement sur DVD-ROM, puis à concevoir des produits qui puissent être mis « en ligne » (on line) sur l'Internet. Par opposition, on parle désormais de off line quand il s'agit de CD-ROM et de DVD-ROM.

L'avènement de la librairie électronique

Le commerce électronique d'œuvres de la pensée, c'est-à-dire les ventes en ligne via l'Internet, a commencé à être significatif en 1999. La constitution d'une telle librairie électronique, ou cyberlibrairie, dont le leader mondial est la firme Amazon (siège social à Seattle), requiert la création d'une base de données (catalogage) : celle-ci se fait par scannage des pages de couverture des ouvrages, opération lourde, qui est en outre assujettie à des droits dont les éditeurs desdits ouvrages ne disposent pas toujours. Pour mieux répondre aux besoins des libraires en ligne, un nouvel outil de communication d'origine anglo-saxonne est apparu : le standard Onix, dont la version française a été finalisée en 2001. Onix réunit dans une même norme internationale, utilisant le langage XML, toutes les informations relatives à l'identification, à la description, au contenu et à la commercialisation du produit.

          

La cyberlibrairie



Le commerce des livres sur sites Internet est à l'origine du concept de cyberlibrairie. C'est la définition même du livre qui est en cause : en effet, dans cette librairie « virtuelle » qu'est la cyberlibrairie, le livre dont le contenu est transmis en ligne est un objet dématérialisé. Mais, après affichage à l'écran, il peut être en quelque sorte reconstitué sur support papier.

La loi Lang sur le prix unique est applicable à l'importation en France de livres étrangers qui donnent lieu à un commerce électronique. Elle se heurte cependant à des pratiques qui tendent à baisser le prix d'achat de ces livres, la plus fréquente étant la vente à distance franco de port : dans la mesure où celle-ci peut être considérée comme une réduction volontaire de la marge du vendeur, elle n'est pas assimilable à une remise tombant sous le coup de la loi de 1981.

La question des droits est au cœur de l'exploitation du réseau Internet. Celle des droits à acquitter sur les textes est la première de toutes, dans la mesure où un seul exemplaire numérisé peut servir à alimenter une, voire plusieurs bibliothèques. La législation sur le droit d'auteur protège toute œuvre originale « quel qu'en soit le mode ou la forme d'expression ». Elle s'applique donc à la numérisation, qui n'est que l'expression, sous une forme différente, d'une œuvre. Si la communication d'une œuvre entre deux personnes au moyen du courrier électronique ne constitue pas une communication publique, la diffusion d'une œuvre protégée sur un service d'information est soumise au droit d'auteur. Sa consultation, autorisée dans le cadre de la consultation privée – encore que la consultation d'une œuvre sous une forme numérisée suppose la copie de cette œuvre (téléchargement) –, ne constitue en rien une cession de droit à la reproduire ou à la diffuser. De même, la question des droits de reproduction d'illustrations ayant pour origine des photos d'agences professionnelles est loin d'être réglée, dès lors qu'il s'agit de leur utilisation sur site Internet.

L'avènement de nouveaux supports
Le livre électronique

La révolution du numérique appliquée au livre a donné naissance au « livre électronique », ou e-book, tel que le fabriquent notamment les marques Rocket e-book et Soft Book, aux États-Unis, ou Cytale, en France. Le livre électronique est un support, doté d'un écran, qui permet l'accès à des ouvrages téléchargeables sur l'Internet (œuvres de littérature générale, dictionnaires, guides de voyage, etc.), dans la police de caractères la mieux adaptée à sa vue. Pour cela, il comprend un logiciel de lecture, qui est aussi programmé pour décrypter les œuvres si elles sont protégées par des droits d'auteur, et il possède une mémoire, destinée à stocker les contenus.

Le livre va-t-il, pour autant, vers le tout électronique ? Certaines études conjecturent que, d'ici à 2020, la moitié du marché mondial de l'édition sera constituée de ces livres électroniques, qui seraient alors utilisés comme des baladeurs « visuels ». En fait, les grands groupes d'édition penchent pour la mise de leurs contenus en un format unique, afin de permettre leur exploitation, de façon interactive, sur tous supports papier ou électronique. L'éditeur décidera ainsi de l'accès qu'il voudra donner à ses ouvrages, en même temps que des cessions de droits spécifiques à chaque accès.

Les autres supports mobiles

Outre cette nouvelle forme d'exploitation dérivée que représente le livre électronique, la révolution du numérique associera, dans un proche avenir, d'autres supports mobiles pour surfer sur l'Internet. Ce sera le cas du téléphone portable, dès lors qu'il sera équipé d'un écran afin d'afficher le contenu du Web. Il aura alors la fonction d'un périphérique sans fil.

Ce sera aussi le cas du « papier » utilisant l'encre électronique (e-ink), dont un prototype a été mis au point en 1998 au Massachusetts Institute of Technology : il s'agit d'une encre qui réagit sous l'effet d'un champ électrique et qui se dépose sur un support en plastique ayant l'apparence d'un livre. En actionnant les boutons que dissimule la couverture, l'utilisateur aura accès aux contenus, textes et images, stockés dans la mémoire du livre électronique, et pourra les lire même en plein soleil.

Dans tous les cas, le numérique fait la preuve de sa supériorité pour ce qui est du stockage des contenus et de leur accès en mode mobile.

Almanach
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Christophe Plantin
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Fnac Étoile, Paris
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Johannes Gutenberg
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L’encre électronique
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Pierre Larousse
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Planche extraite de l'Encyclopédie
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Portrait de Diderot par Garand
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Une imprimerie au XVIe siècle
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