manipulation mentale

Action exercée sur la conscience d'autrui pour la contrôler dans un but généralement pervers.

La manipulation mentale n’est pas la désinformation, car son objet n’est pas d’instiller de fausses opinions, mais d’inspirer des schémas de pensée. Elle réussit à faire passer pour une décision volontaire un choix totalement induit. Elle suppose une habileté qui n’est pas purement rhétorique, mais qui est proche des sciences cognitives. Avec les progrès de l’imagerie médicale , la connaissance des mécanismes cérébraux devient toujours plus fine. La vigilance déontologique permet d’éviter que les protocoles utilisés pour soigner un accident vasculaire cérébral ou une maladie neurologique dégénérative ne soient détournés de façon à s’immiscer dans le fonctionnement mental de celui qui ne serait plus un patient, mais un sujet d’expérimentation. Ce qui tenait de la science-fiction a, désormais, une assise technologique moderne, sans que pour autant l’exploration mentale soit manipulation mentale.

La littérature et le cinéma ont donné une image saisissante des multiples manières de tenir autrui sous influence. La manipulation peut n’être que suggestive, insinuante, indirecte, comme dans Rebecca d’Alfred Hitchcock (1940, d'après le roman de Daphné Du Maurier), où la gouvernante cherche à pousser l’héroïne au suicide, avec une économie de gestes et de mots qui souligne combien tout se passe dans la tête de la victime potentielle, gagnée par une admiration morbide pour une morte. Dans la Peur (1920), Stefan Zweig a dépeint la montée de la peur chez une femme adultère que son mari veut effrayer par des moyens détournés ; le sentiment de terreur qui s’empare de la protagoniste naît d’une atmosphère glauque, et non d’une menace explicite. Le personnage manipulé devient son propre manipulateur en se faisant l’involontaire complice de son tortionnaire psychologique, qui possède un doigté se distinguant de la brutalité.

Si la manipulation mentale est torture, c’est sur le mode de la cruauté raffinée et de l’intoxication savante. Il y a peu de sang qui coule, mais un épanchement du songe dans la vie réelle et une progression du cauchemar qui détruit l’image de soi.