Ce droit fait des progrès, comme le prouvent la mise en place de tribunaux chargés de juger les crimes commis dans l'ex-Yougoslavie ou au Rwanda et les discussions sur la création d'une Cour pénale internationale. L'échec de la procédure lancée par l'Espagne aura démontré, a contrario, la nécessité de traiter ces questions au niveau international, et non national. D'autre part, son séjour londonien a définitivement terni l'image du général Pinochet. Ce dernier ne sera plus jamais accueilli nulle part avec le tapis rouge comme il l'avait été, à Londres, en septembre 1998. Son soudain regain de vigueur, à peine de retour sur le sol chilien, interdit toute forme de compassion à son égard et révèle son véritable caractère, peu flatteur.

Enfin, l'assurance donnée par les autorités chiliennes qu'il sera jugé lui confère un statut d'accusé dans son propre pays, ce à quoi il avait jusque-là échappé.

Marc Méry

Dix-sept mois de procédure judiciaire

Augusto Pinochet est arrêté le 16 octobre 1998 à Londres. Le 28, la Haute Cour de justice invalide le mandat d'arrêt délivré à son encontre car il bénéficie selon elle d'une immunité en tant qu'ancien chef d'État. Cette décision est infirmée en appel, le 25 novembre, par les juges de la Chambre des lords qui refusent à l'ancien dictateur chilien le bénéfice de l'immunité. Le 17 décembre, les juges lords réunis en formation d'appel infirment le jugement de leurs pairs en raison des liens entretenus par l'un d'entre eux avec Amnesty International. Le 24 mars 1999, la Chambre des lords confirme son refus de reconnaître une quelconque immunité au profit d'Augusto Pinochet. Dans le même temps, elle réduit le champ des poursuites pouvant être retenues dans le cadre de la demande d'extradition espagnole. Ne peuvent être prises en compte que les accusations de torture postérieures à 1988, date de la ratification par la Grande-Bretagne de la convention internationale concernant ce crime. Fort de ces avis, le ministre de l'Intérieur, Jack Straw, approuve, le 15 avril, la poursuite de la procédure d'extradition. Le 27 mai, la Haute Cour rejette l'appel des avocats d'Augusto Pinochet contre cette décision. Le 8 octobre, après avoir entendu ses défenseurs, la justice britannique autorise l'extradition vers l'Espagne d'Augusto Pinochet. Le 14, le gouvernement chilien demande officiellement la libération de ce dernier pour raison de santé. Le 11 janvier 2000, après avoir ordonné une expertise médicale, Jack Straw accède à cette demande.