Allemagne

Cinq ans après l'unification, les importants efforts en faveur de l'ancienne Allemagne de l'Est commencent à porter leurs fruits. Certes, de nombreux problèmes subsistent et les différences de mentalités persistent entre l'Est et l'Ouest. Mais l'Allemagne peut se targuer de sa stabilité politique (Helmut Kohl semble avoir peu à craindre d'une opposition divisée) et de sa bonne santé économique.

Lors du bilan qu'il présente devant le Bundestag (Parlement fédéral) en octobre 1995, le chancelier Kohl souligne les progrès réalisés dans l'aménagement des infrastructures des nouveaux Länder issus de l'ex-RDA, dans leur système de santé et dans le domaine de l'assainissement de l'environnement. Le porte-parole du parti Alliance 90/les Verts, W. Schulz, complète le tableau en relevant que « la situation matérielle de beaucoup d'Allemands de l'Est est meilleure qu'elle n'était il y a cinq ans, mais que, s'ils se sentent politiquement libres, les Allemands de l'Est, pourtant, restent inquiets sur le plan social ».

Une croissance plus forte à l'Est qu'à l'Ouest

Le renchérissement du mark par rapport au dollar entraîne un tassement des exportations. Le chiffre de la croissance à l'Ouest est révisé à la baisse dans le courant de l'année : estimée à 3 %, elle s'établit finalement à 2,25 %. Dans les nouveaux Länder, qui représentent environ 10 % du PIB allemand total, elle reste soutenue (9 % sur l'ensemble de l'année). Elle demeure toutefois tributaire des transferts effectués d'ouest en est. Sur cinq ans, ceux-ci se sont élevés à plus de 500 milliards de marks. Conséquence d'une politique volontariste cherchant, au nom de l'unification intérieure du pays et de la pacification des esprits, à les mettre aussi rapidement que possible au niveau de ceux de l'Ouest, les salaires est-allemands ont progressé, mais moins vite qu'on ne l'avait prévu. Ils correspondent désormais, en moyenne, à 73 % des salaires de l'Ouest. Mais, dans les nouveaux Länder, la productivité du travail est encore moitié moindre qu'à l'Ouest. Les gains de productivité y sont en effet moins le fruit du progrès technique que de la rationalisation des emplois.

En l'espace de cinq ans, la dette publique de l'Allemagne unifiée a doublé, atteignant, en 1995, près de 2 000 milliards de marks. Le financement de l'unification a également conduit le gouvernement central à se décharger d'un certain nombre d'obligations sociales sur le dos des communes. Le déficit budgétaire de ces dernières s'élève en 1995 à près de 10 milliards de marks.

Bilan de la privatisation à l'Est

Deux chiffres traduisent les transformations qu'ont subies en cinq ans les nouveaux Länder : la densité industrielle y est passée de 277 emplois industriels pour 1 000 habitants en 1989 à 56 en 1995, soit un niveau inférieur à celui de l'Irlande. La politique de privatisation pratiquée par l'Office de gestion du patrimoine est-allemand, la Treuhandanstalt, a ramené les emplois des secteurs primaire et secondaire, qu'il contrôlait, de 4,1 millions en 1989 à 1,1 million au moment de sa dissolution, fin 1994. À vrai dire, ce chiffre ne tient pas compte des quelques dizaines de milliers d'emplois transférés dans le secteur tertiaire. Sur les 8 500 entreprises dont elle avait hérité en 1990, la Treuhandanstalt en avait, jusqu'à la fin de 1994, liquidé près d'un tiers, restitué environ 13 % à leurs anciens propriétaires et privatisé un peu plus de la moitié. L'office qui a pris la succession de la Treuhandanstalt dispose encore, à l'automne 1995, d'environ 3 000 petites unités, dont moins de cent pourraient échapper à la liquidation. En cinq ans, la Treuhandanstalt est donc arrivée à peu près au bout de ses peines, à l'exception de la privatisation des biens fonciers, qui reste pour l'essentiel encore à faire. Sa politique a provoqué la désindustrialisation des nouveaux Länder tout en y maintenant des noyaux durs qu'elle a rendus compétitifs en assurant leur modernisation.

Le recul du chômage

En 1995, pour la première fois, le chômage diminue dans les nouveaux Länder de façon significative et durable, passant en dessous de la barre du million de chômeurs enregistrés ; 320 000 personnes de moins qu'en 1994 participent à des mesures dites « de traitement social du chômage », mais les femmes représentent encore 64 % de l'ensemble des chômeurs. À l'Ouest, le chômage frappe 2,5 millions de personnes. Avec 3,5 millions de chômeurs au total, le taux de chômage s'établit ainsi autour de 9 % pour l'ensemble de l'Allemagne.