Portraits

Harding-la-« méchante »

Un scénario presque trop classique, mettant en scène deux personnages, une « méchante » et une « gentille », que tout oppose. Une série B au goût de déjà-vu, avec son lot de drames, de rebondissements et, cela va de soi, une fin en « happy end ». Le public américain en raffole. Rien d'étonnant donc à ce que l'affaire Harding/Kerrigan ait fait le bonheur de la presse populaire d'outre-Atlantique (et d'ailleurs !).

Tout commence à Détroit le 6 janvier, à la veille des championnats US de patinage artistique. À la fin d'un entraînement, Nancy Kerrigan (la « gentille ») est agressée. Un inconnu la frappe violemment à la jambe droite avec une barre de fer. Nancy s'écroule, sous l'œil d'une caméra (les images feront le tour du monde), et se voit finalement contrainte de déclarer forfait pour la compétition. Le lendemain, c'est donc Tonya Harding (la « méchante ») qui remporte la médaille d'or. Mais la jolie Nancy n'a pas tout perdu. La Fédération américaine de patinage artistique décide de la sélectionner pour les jeux Olympiques de Lillehammer malgré sa défection aux championnats US. La morale est sauve. Fin du premier acte, mais le FBI mène l'enquête...

Au fil des épisodes, on apprend que c'est le garde du corps de Tonya qui a préparé l'agression. Mieux, le cerveau, celui qui a ourdi le complot, n'est autre que l'ex-mari de Tonya-la-méchante ! L'incroyable nouvelle fait la une de tous les journaux, lesquels se posent bien sûr la question : Miss Harding savait-elle ce qui se tramait ? Les jours suivants, certains médias en panne de révélation fouinent dans le passé de Tonya. La série B tourne au soap opera...

Flash-back

Tonya Harding naît en 1971. Elle passe son enfance dans l'Oregon, où elle ne vit guère des jours heureux. Son père collectionne les longues périodes de chômage. Sa mère, mariée à sept reprises, est serveuse dans un bar. Son demi-frère s'intéresse de beaucoup trop près à elle. Il tente un jour de la violer. Pour s'échapper de cet univers, Tonya se rend chaque jour à la patinoire. Ses qualités athlétiques compensent ses lacunes artistiques et, après quelques années d'entraînement acharné, elle devient la première Américaine à réussir un triple axel (trois tours et demi en l'air).

Retour vers le futur

En février 1994, malgré les accusations de son ex-mari qui la dit complice et après un interminable bras de fer juridique avec les autorités sportives, Tonya finit par se rendre à Lillehammer pour réaliser son rêve de gosse. Hélas, elle finit loin du podium. Pire, sa rivale, la « gentille »-Nancy-au-sourire-Ultra-Brite, empoche la médaille d'argent, et, par là même, des millions de dollars de contrats publicitaires. Happy end ? Oui. Sauf pour Tonya Harding. Le retour sur terre américaine sera brutal. Elle évite de peu la prison, mais la justice de l'Oncle Sam la condamne notamment à 100 000 dollars d'amende et à trois ans de mise à l'épreuve pour entrave à la justice. Quatre mois plus tard, la Fédération américaine de patinage artistique lui retire son titre de championne des États-Unis. Elle est, de plus, radiée à vie. Enfin, en septembre, son ex-mari vend (pour la modique somme de 1 million de dollars) la vidéo et les photos de leur nuit de noces à un magazine de charme. Tonya Harding ne joue plus dans un mauvais feuilleton, mais dans un mauvais film X.

Leblanc libéré

« Je ne veux plus parler du passé. Ce titre me permettra de ne plus jamais en parler. Je me sens libéré. » Au soir de sa victoire dans le championnat du monde sur route cycliste, fin août à Agrigente en Sicile, Luc Leblanc entame une nouvelle vie. À 28 ans, le Limousin décide de chasser cette inexpugnable détresse de son regard bleu, de tirer un trait sur un passé trop lourd pour être porté seul. Grâce à un simple maillot arc-en-ciel aux fonctions inattendues d'exutoire, Luc Leblanc songe enfin à oublier le traumatisme qui a bouleversé son enfance et dirigé toute sa vie.

Adolescent, il a vu son jeune frère se faire renverser et tuer par une voiture folle sur le chemin de l'école. Meurtri dans sa chair et dans son âme, il a voulu entrer au séminaire, devenir prêtre pour mieux s'isoler du monde et oublier le drame. Il s'est ravisé au dernier moment et a finalement décidé de vouer sa vie à un autre sacerdoce : le vélo.