Dans l'audiovisuel, peut-être sommes-nous aussi à la veille d'une révolution, avec l'avènement de l'édition multimédia. Le mélange de textes, de graphismes, d'images fixes ou animées et de sons stockés électroniquement et leur manipulation appellent de nouveaux concepts d'écriture et de nouveaux supports normalisés. 1991 aura vu l'introduction sur le marché, aux États-Unis (avant son lancement en Europe, en 1992) du disque compact interactif. Celui-ci autorise la création de nouveaux produits éditoriaux combinant toutes les sources écrites ou audiovisuelles. Armé d'une télécommande et d'un lecteur approprié branché sur un téléviseur, un enfant peut ainsi colorier à son gré un dessin animé, un collectionneur construire son parcours dans un musée imaginaire, un étudiant ingurgiter à son rythme son programme de formation : chaque disque peut contenir le texte d'une année entière d'un quotidien ou 7 000 images, ou encore jusqu'à 19 heures de commentaires sonores.

Quittons la technique et revenons à la science ; car, elle aussi, en 1991, nous a fait entrevoir de fabuleuses perspectives, pour ce qui concerne la production d'énergie. Le 9 novembre, à Culham, près d'Oxford, dans les laboratoires du Joint European Torus (JET), on est parvenu pour la première fois à obtenir une quantité significative d'énergie à partir de réactions de fusion thermonucléaire. Le « tokamak » du laboratoire – une machine de 10 m de haut et de près de 3 000 tonnes – a permis d'atteindre pendant deux secondes une température proche de 300 millions de degrés, en dégageant une énergie de 1,5 à 2 mégawatts. Les spécialistes espèrent maintenant franchir en 1996 une autre étape décisive : celle où le réacteur produira autant d'énergie qu'il en consommera. Ce qui est encore loin d'être le cas puisque, lors de l'expérience réalisée le 9 novembre 1991, le JET a consommé 15 000 mégawatts !

La Terre sous surveillance

Un jour, peut-être dans le courant du siècle prochain, le vieux rêve de la domestication de l'énergie des étoiles deviendra enfin réalité. On disposera alors d'une énergie inépuisable provenant de... l'eau, dont chaque litre recèle 30 milligrammes de deutérium, l'un des combustibles de la fusion : l'équivalent de 300 litres de pétrole. Une énergie qui, de surcroît, sera propre, la fusion ne laissant pas de déchets, et sûre, car la réaction – à la différence de celle de la fission, utilisée dans les réacteurs nucléaires actuels – ne peut pas s'emballer.

Mais, avant d'en arriver là, un long chemin reste encore à parcourir. Pour les experts les plus optimistes, il faudra attendre 2030 pour voir le premier réacteur de fusion couplé au réseau ; pour d'autres, ce ne sera pas avant 2100. Les obstacles à surmonter sont énormes. Et cela coûtera très cher. L'Europe a déjà dépensé 10 milliards de francs pour construire le JET et le faire tourner pendant dix ans. La prochaine machine, qui devrait permettre d'obtenir une réaction dégageant suffisamment d'énergie pour s'auto-entretenir, sans apport extérieur autre que le combustible, coûtera plus de 20 milliards. La fusion nucléaire suscite de grands espoirs, mais quel visage aura notre planète le jour où l'homme parviendra enfin à la maîtriser ?

L'amélioration de nos connaissances sur l'évolution du climat et de l'environnement constitue l'un des enjeux scientifiques et socio-économiques majeurs des prochaines décennies. Comprendre cette évolution est donc un objectif prioritaire pour les scientifiques afin de permettre d'élaborer des stratégies pertinentes pour la gestion globale de l'environnement. L'effort de recherche doit porter sur la description, la compréhension et la modélisation des processus essentiels qui gouvernent le système atmosphère-hydrosphère-géosphère-biosphère, en tenant compte des facteurs anthropiques à conséquences globales comme la déforestation ou les émissions de gaz à effet de serre.

Tandis que se poursuivent les efforts pour surveiller l'évolution de la teneur de l'atmosphère moyenne en ozone, notamment dans l'Arctique grâce à la campagne européenne EASOE (European Arctic Stratospheric Ozone Experiment), lancée en novembre, et mettant en œuvre conjointement des ballons, des avions et des fusées-sondes, l'océan est, à son tour, placé sous haute surveillance. En particulier, le programme international WOCE (World Ocean Circulation Experiment) a pour objectif d'aboutir à une meilleure compréhension de la circulation océanique globale en tant que composante essentielle du climat général de la planète. Dans le cadre de ce programme, le navire de recherche océanographique français l'Atalante a effectué durant l'été une campagne d'exploration dans la zone de fracture Romanche de la dorsale médio-atlantique pour observer la circulation des eaux profondes et froides en provenance des régions polaires et expliquer leur cheminement.

On compte aussi beaucoup sur la contribution de satellites comme ERS-1, de l'Agence spatiale européenne, lancé le 17 juillet et placé sur une orbite polaire héliosynchrone à quelque 780 km d'altitude. Muni d'une plate-forme dérivée de celle des satellites français SPOT, il comporte, notamment, un radar à synthèse d'ouverture, un altimètre radar et un radiomètre à balayage destinés à des observations permanentes, par tous les temps, des océans, des terres émergées et des glaces polaires. L'observation de la Terre va constituer, d'ici à la fin du siècle, l'un des axes majeurs de développement des programmes spatiaux.

Philippe de la Cotardière