2 – Les cours du dollar ont plus de chance de diminuer ou de se stabiliser que de remonter dans les prochains mois, en raison de la persistance du déficit extérieur courant des États-Unis et des incertitudes sur l'échéance électorale de 1988. Les événements susceptibles de stabiliser le dollar par un regain de protectionnisme paraissent moins probables. En revanche, une inconnue subsiste : l'afflux des capitaux attirés par l'allégement substantiel des taux d'imposition sur les revenus des particuliers et des sociétés peut, si l'Europe ne s'engage pas dans la même voie, redresser le dollar à plus long terme.

3 – La libération quasi-totale des prix en France, à l'exception de ceux des livres, des médicaments et des tabacs, soulève la crainte que l'inflation ne reprenne. Cette crainte se nourrit de la croyance, infondée et constamment démentie, que le contrôle des prix réduit efficacement l'inflation. Or, celui-ci engendre toute une série d'effets pervers – limitation de la concurrence, corporatisme, rigidité des politiques commerciales et financières des entreprises, fausses innovations, etc. – qui perpétuent l'action du virus inflationniste dans le corps social. En régime de contrôle des prix, l'inflation traduit tout au plus le degré de résistance de l'État face aux revendications cumulées des professions.

Mais, comme les phénomènes économiques sont dépourvus de symétrie et que les chefs d'entreprise français, contrairement à leurs confrères et concurrents, ont été habitués à 50 ans de contrôle, certains redoutent que la libération des prix conduise à leur explosion. Cette crainte peut être démentie. En effet, la force de la concurrence mondiale, largement stimulée par les progrès techniques et la déréglementation de nombreux secteurs aux États-Unis (transports aériens, télécommunications, marchés financiers, etc.), joue fortement dans le sens de la baisse (éd. 1986). D'autre part, la liberté des prix est la seule solution durablement adéquate aux disciplines de la concurrence : elle donne enfin à l'entreprise la possibilité de moduler ses propres tarifs en fonction d'une stratégie d'ensemble, et à la concurrence le moyen puissant de corriger tout excès.

4 – La rigueur salariale continuera de s'imposer en 1987. Le nombre des chômeurs interdit de rémunérer sensiblement plus ceux qui ont l'avantage de conserver leur emploi. En outre, la France se trouve dans l'obligation de redresser des résultats extérieurs médiocres, précaires, en réduisant l'avance de la consommation intérieure sur la production : la France doit épargner et investir pour exporter et créer des emplois compétitifs avant de consommer beaucoup plus. Enfin, la rigueur salariale reflète une ambition plus vaste qui est d'améliorer le rapport qualité-prix de nos activités, qu'il s'agisse de nos produits ou de nos capacités de travail et de gestion. Seul un progrès sensible dans nos innovations, dans notre productivité et notre aptitude à saisir les occasions offertes par la croissance mondiale, pourra justifier un assouplissement global et modulé de la rigueur salariale en fin d'année 1987. Le gouvernement a assigné des objectifs de progression des masses salariales conformes à l'ambition de réduire l'inflation de 1987 à 2 p. 100.

5 – La réussite de cette politique repose en partie sur les anticipations des entreprises et des consommateurs. Ces anticipations paraissent moins délibérément orientées vers l'inflation que naguère. L'État réduit son train de vie. Il reste aux collectivités locales à modérer le leur et sans doute à la Sécurité sociale de choisir avec discernement, sans trop écouter les groupes les plus bruyants, les économies nécessaires.

Pour sa part, l'État montre globalement l'exemple. La progression prévue des dépenses publiques en 1987 est de 1,8 p. 100 en termes nominaux, soit beaucoup moins que celle du PNB en francs courants (+ 4,8 p. 100) : la diminution du nombre des fonctionnaires (17 000 personnes), des aides à l'industrie (– 14 p. 100), de la dette publique, grâce à un report d'une partie des sommes recueillies à la faveur des privatisations, en sont les principaux gages. La répartition des sacrifices entre les différents budgets, et surtout à l'intérieur de chaque budget ministériel, peut, comme de coutume, laisser à désirer. L'analyse économique des gestions ministérielles a malheureusement moins progressé que celle des politiques budgétaires globales. La diminution corrélative des déficits publics en comparaison du PIB permet d'entrevoir une baisse des taux d'intérêt et des frais financiers des entreprises, ce qui ajouterait un autre facteur favorable à la désinflation.