Le 24 août, c'est l'apothéose, une véritable catastrophe pour les services secrets de la République fédérale. Hans-Joachim Tiedge, chef de service à l'Office de protection de la Constitution (contre-espionnage allemand), dans lequel il travaillait depuis 19 ans, passe à l'Est. Tiedge connaissait le nom de tous les agents, sources et correspondants ouest-allemands en RDA ; participant à de nombreuses réunions des services alliés, il recueillait les informations transmises par ceux-ci.

L'émotion est grande en RFA. La presse ouest-allemande s'étonne que le comportement de Tiedge n'ait pas éveillé la méfiance de ses supérieurs. Couvert de dettes, joueur, ayant perdu sa femme dans des circonstances si peu claires que la rumeur laissait entendre qu'il pouvait être responsable de sa mort, Tiedge était une proie facile pour des services étrangers. Les services secrets ouest-allemands devront se réorganiser et en particulier reconstruire leurs réseaux en RDA.

Cette fréquence des affaires d'espionnage n'est pas un hasard. Elle s'explique par l'importance stratégique de la RFA et surtout par les facilités que rencontrent les Allemands de l'est à opérer dans un pays si proche du leur. L'espionnage est inter-allemand. Comment reconnaître, dans le flot des réfugiés qui passaient à l'Ouest jusqu'à la construction du mur de Berlin, ceux qui venaient travailler pour le compte de la RDA ? Selon certaines estimations, 15 000 espions est-allemands seraient implantés en RFA.

Bras de fer Thatcher-Gorbatchev

La « dame de fer » confirme sa détermination en ordonnant, le 18 avril, l'expulsion de deux Soviétiques convaincus d'espionnage, un attaché militaire adjoint, le capitaine Oleg Los, et l'un des dirigeants de l'agence de l'Aeroflot à Londres, Vyacheslav Grigorov.

Le 9 mai, le Premier ministre annonce une remise en ordre du MI 5, service britannique de contre-espionnage. Les enquêtes de sécurité avant embauche jusque-là réservées à l'encadrement sont étendues à tout le personnel. Des contrôles seront, de plus, opérés tous les cinq ans après le recrutement.

Le 14 septembre, nouveau coup de théâtre. Le gouvernement expulse 25 agents soviétiques à la suite du passage à l'Ouest du principal résident du KGB à Londres. Parmi eux, 6 diplomates, 4 journalistes et des responsables de l'agence Tass, de l'agence Novosti, de Radio Moscou et de la Pravda. L'URSS réplique par l'expulsion de 25 Britanniques, dont 11 diplomates et 5 journalistes. Margaret Thatcher réagit en déclarant indésirables 6 nouveaux ressortissants soviétiques. L'URSS ne faiblit pas et expulse encore 6 Britanniques, ce qui réduit à peu de chose la représentation de la presse anglaise à Moscou : 25 / 25 ; 6 / 6. Fin (provisoire ?) de la partie.

Espionnage en famille aux États-Unis

Le 20 mai, un ancien officier de marine, John Walker est arrêté à Washington par le FBI. Il est soupçonné d'espionnage au profit de l'URSS. John Walker a travaillé plusieurs années à Norfolk, quartier général de la flotte américaine de l'Atlantique et a servi à bord du sous-marin nucléaire Simon-Bolivar, où il aurait eu accès à des codes très secrets. Son fils Michael est bientôt interpellé. Servant sur le porte-avions Nimitz, il connaissait bien les mouvements de la flotte américaine en Méditerranée. Arthur, frère de John, est lui aussi arrêté : il a quitté la marine en 1973 après avoir servi à bord de plusieurs sous-marins et sur le Blue Ridge, vaisseau amiral de la flotte du Pacifique.

Dans ce climat, la Chambre des représentants approuve, le 26 juin, un amendement qui permet au département de la Défense de soumettre au détecteur de mensonge tous les personnels civils et militaires auxquels leurs fonctions donnent accès à des informations confidentielles.

À l'autre bout du monde...

C'est seulement le 12 juillet que les journaux français mentionnent, à une place modeste, l'attentat qui a coulé le voilier de l'organisation Greenpeace, Rainbow Warrior, dans le port d'Auckland, et tué un photographe portugais appartenant à l'organisation, Fernando Pereira. Le 17 juillet, deux « Suisses », les époux « Turenge », sont arrêtés à Auckland. Dans la discrétion naît l'affaire Greenpeace, qui prend toute son ampleur au mois d'août.