Responsabilité de l'équipage aussi dans l'accident survenu en 1984 à un Boeing 747 de la compagnie colombienne Avianca au cours d'une approche de nuit sur l'aéroport de Madrid-Barrajas (6 survivants). Un commandant de bord confirmé et compétent, mais, semble-t-il, fatigué ou préoccupé, était aux commandes, assisté d'un jeune officier pilote un peu timide. Trains et volets sortis en position d'atterrissage, l'avion a percuté une colline qu'il aurait dû passer 1 000 pieds (environ 300 mètres) plus haut. L'accident est probablement dû à une erreur de calage altimétrique (réglage des altimètres compte tenu de la pression atmosphérique au sol, indiquée par le contrôle d'aérodrome) commise par le commandant de bord, erreur que le second pilote n'a pas vue ou pas osé signaler à son supérieur.

La fatigue ou des difficultés causées par des problèmes personnels, physiques ou psychologiques, provoquant une baisse d'acuité mentale susceptible d'affecter les réactions du pilote, ont retenu depuis longtemps l'attention des compagnies et ont figuré parmi les causes de la réticence des pilotes à la suppression du poste de l'officier mécanicien navigant sur les nouveaux types d'appareils. C'est pourquoi nombre de compagnies, comme Air France, ont mis en place des entraînements spéciaux permettant à chaque pilote la reconnaissance de l'éventuelle et soudaine incapacité de son collègue et la prise immédiate des initiatives – remise des gaz, par exemple – assurant la sécurité de l'appareil.

La trop grande confiance dans les automatismes, multipliés par les constructeurs dans le but louable d'alléger la charge de travail des pilotes, mais aussi de justifier la formule de l'« équipage à deux », plus économique pour les exploitants, peut aussi paradoxalement être cause d'accident. C'est ce qui s'est produit en 1983 à New York pour un DC-10 de SAS (aucune victime) à cause d'une défaillance de fonctionnement de l'automanette réglant automatiquement la puissance des moteurs. La fiabilité de ce dispositif ayant été mise en cause lors des vols précédents, plusieurs éléments avaient été changés et, lors de l'escale à Copenhague, tout fonctionnait parfaitement. Reparti pour New York, l'équipage avait oublié le problème et programmé la vitesse d'approche à Kennedy Airport compte tenu du vent de face. Mais, de nouveau déréglée, l'automanette imprimait à l'appareil une vitesse excédentaire de 20 nœuds (environ 38 km/h), non vérifiée par l'équipage, à qui avait été affectée une piste un peu courte. En dépit d'une approche insuffisamment « plate », l'équipage n'a ni vérifié la vitesse, ni débranché l'automanette. L'avion a donc « effacé » environ 1 000 mètres de piste. Au toucher des roues, il manquait 400 mètres pour stopper. En bout de piste, les pilotes ont réussi à éviter les plots de la ligne d'approche et l'avion s'est arrêté dans le petit lac prolongeant la piste. Tout le monde a été évacué sans problème mais l'enquête a retenu le « poor judgment » du commandant de bord.

Dernier exemple récent d'une erreur commise par un équipage, là aussi sans victimes à déplorer : l'incident s'est produit en 1982, lors de la mise en service par Air Canada de ses nouveaux Boeing 767. L'un des appareils a eu un problème de jauges de carburant, dont les indicateurs se trouvent sur la planche de bord, sous les yeux de l'équipage. En cas de panne, il appartient à l'officier mécanicien navigant ou, s'il n'y en a pas, au second pilote, de vérifier au sol le niveau des réservoirs en utilisant les dripsticks (jauge à main). À Montréal, un mécanicien avait effectué l'opération et en avait communiqué le résultat aux pilotes. Mais si le dripstick était gradué, on ignorait à quoi correspondaient les traits. Au Canada, où règne le bilinguisme, on travaille généralement en Mks (milliers de kilos). Les pilotes ont refait le calcul du mécanicien en livres... et complété les pleins en divisant par deux la quantité nécessaire. Ils ont embarqué 15 000 livres de carburant au lieu de 15 tonnes, pleins complétés de la quantité consommée à la première étape, qui était courte. La suivante était longue : le carburant épuisé, les moteurs se sont arrêtés. Heureusement, l'équipage connaissait dans le secteur un aérodrome militaire désaffecté que l'expérience vélivole de l'officier pilote permit d'atteindre sans casse en vol plané. Mais l'impasse sur les jaugeurs est, depuis, jugée inacceptable sur le plan technique. Et l'échelle est désormais précisée sur les jaugeurs à main !

Catastrophes

Année noire pour l'aviation civile, mais aussi série noire pour les transports ferroviaires : cinq accidents graves, plus de 85 morts et 150 blessés au passif des chemins de fer français, qui figurent pourtant parmi les plus fiables dans e monde : à la suite des accidents de Saint-Pierre-du-Vauvray, de Flaujac, d'Argenton-sur-Creuse, le président de la SNCF, M. André Chadeau, a dû démissionner. Les erreurs humaines, qui sont à l'origine de tous ces accidents, auraient été évitables si les progrès de la sécurité n'étaient ralentis par leur coût élevé, qui conduit la SNCF à étaler leur réalisation sur les lignes à faible trafic. Le coup de grisou du puits Simon, en Lorraine, le 25 février (22 morts et 103 blessés), provient aussi de l'insuffisance des installations de sécurité. Les pertes humaines (plus de 300 morts) consécutives à la rupture de la digue de Tesero, en Italie, dans le Trentin-Haut-Adige, auraient pu vraisemblablement être réduites, si la surveillance de l'ouvrage ne s'était relâchée.