C'est donc surtout sur l'information que TF1 va rencontrer le plus d'obstacles : les téléspectateurs la jugent partiale et même partisane, et se sentent mal à l'aise dans les présentations par couples (Jean-Pierre Berthet/Francine Buchi, Françoise Kramer/Jean-Claude Narcy, après l'expérience, en fin de soirée, du couple Annick Beauchamp/Alain Chaillou). Malgré ses efforts (le magazine 7/7 est une réussite), Jean-Pierre Guérin, responsable de l'information, se trouve dans l'impasse. Ses différends avec le président de TF1 viennent bientôt sur la place publique : le 1^er juillet, le directeur de l'information est limogé, bientôt suivi par le rédacteur en chef des journaux, François Lanzenberg. Ce dernier est remplacé par Jean Lanzi, l'un des anciens du Journal télévisé, secondé par Alain Denvers, jusque-là responsable des magazines (Les mercredis de l'information). Dix jours plus tard, Michel May, P-DG de TF1, donne sa démission. Il est remplacé par Hervé Bourges, journaliste, ancien directeur de Radio France Internationale, à qui il a su donner un nouveau souffle.

L'automne sur TF1 se place donc sous le signe de la réflexion et de l'élan. Hervé Bourges veut refaire de la chaîne un lieu de divertissement et d'information accessible à tous ; tout en confirmant Jean Lanzi dans ses fonctions, il nomme, en octobre, deux rédacteurs en chef proches de sa philosophie tiers-mondiste : Jacques Decornoy et Pierre-Luc Seguillon.

Antenne 2 : le parfum de la victoire

Pierre Desgraupes a beau avoir le triomphe modeste en souhaitant le redressement de TF1, il n'en est pas moins satisfait de voir l'audience de sa chaîne dépasser les 20 millions de fidèles. De l'Académie des neuf (12 h) au journal de fin de soirée, aucun rendez-vous n'est négligé sur la grille quotidienne. Des émissions devenues classiques (Aujourd'hui la vie, Récré A2, C'est la vie, Des chiffres et des lettres), aux programmes de la soirée, où l'on retrouve les vedettes (Grand échiquier, Dossiers de l'écran, Apostrophes, Ciné-club, Champs-Élysées) aux côtés de nouvelles émissions, comme Mœurs en direct, Moi je ou le magazine Résistance.

On innove beaucoup sur A2, mais en calculant bien. En prêtant attention aux problèmes de société par exemple. Gym tonic a manifesté une certaine envie de nos concitoyens d'être physiquement bien dans leur peau. Avec Psy-show, qui débute fin octobre, la même productrice, Pascale Breugnot, souhaite mettre le bonheur à la clé d'un débat public sur les relations interindividuelles : couple, famille, enfants, travail... De la même manière, A2 a investi dans le rock, cette musique et ce style de vie qui intriguent les adultes et que les adolescents trouvaient trop absent des petits écrans. Les enfants du rock réussit sa percée en fin de soirée, le jeudi, à tel point que — suprême récompense — il est programmé à la rentrée le samedi, juste après l'émission de Michel Drucker.

Ce succès n'évite pas quelques anicroches. Sur le plan de l'information, par exemple, où l'on va assister, en plein été, à une polémique entre les deux présentateurs vedettes du journal de 20 heures, Christine Ockrent et Patrick Poivre d'Arvor. Est-ce la rapidité de l'ascension de sa consœur C. Ockrent qui conduit le célèbre PPDA à exprimer des exigences hiérarchiques ? Toujours est-il qu'à la mi-août, devant le refus de Pierre Lescure, directeur de l'information, de modifier son statut, Patrick Poivre d'Arvor renonce à présenter le 20 heures de la chaîne. Il est bientôt remplacé par Bernard Rapp, qui alterne désormais avec Christine Ockrent. Cet incident passé, on apprend au mois de novembre que P. Lescure quitte A2 pour occuper de hautes fonctions à Canal Plus, la future 4^e chaîne. Il est remplacé par Michel Thoulouze.

Enfin, c'est encore Antenne 2 qui a diffusé l'excellent feuilleton retraçant la vie et la carrière de Golda Meir, dernier rôle pour l'actrice Ingrid Bergman avant sa disparition, La veuve rouge, qui a révélé Françoise Fabian au mieux de sa forme, et la très bonne série sur Charlie Chaplin, qui se base sur les chutes des chefs-d'œuvre de Chariot. Étonnant spectacle.

FR3 : du cinéma à la musique

FR3 est de plus en plus fidèle à sa mission : chaîne vouée au cinéma, elle personnalise ses programmes selon des axes originaux. Ainsi La dernière séance, de Gérard Jourd'hui, présentée par Eddy Mitchell, s'est-elle spécialisée, avec succès, dans le western et le film policier ou fantastique des années 50. On y retrouve avec délectation les stars d'Hollywood. Avec Cinéma sans visa, Jean-Claude Guillebaud et Jean Lacouture nous font partager la découverte d'une production issue, en particulier, du tiers monde : un regard sur le monde, souvent réalisé avec talent, et qui change du schéma occidental. Enfin, avec Ciné-passion Marie-Christine Barrault présente une fois par mois un film qui représente une tendance, un style, une écriture originale. À cette palette, il faut ajouter la production des téléfims de la série Cinéma 16 et la coproduction de films destinés à l'exploitation en salles commerciales. L'argent de Robert Bresson, La mort de Mario Ricci de Claude Goretta, remarqués au festival de Cannes, sont de ceux-là.