Plusieurs grèves éclatent dans ses journaux pour exiger le respect des accords qu'il a signés, accords par lesquels il s'engageait à conserver 65 % du personnel actuel des imprimeries. Et deux de ses titres connaissent des difficultés sérieuses : à France-Soir, de nouvelles mesures d'économie sont décidées — réduction du nombre des éditions, 120 journalistes au lieu de 151 — ; à Nord-Matin, six éditions régionales sont supprimées et 58 personnes (dont 22 journalistes) sont licenciées.

Les pouvoirs publics peuvent-ils se contenter d'assister en spectateurs aux convulsions de la presse ? Le sénateur Henri Caillavet interpelle le ministre de la Culture et de la Communication, Jean-Philippe Lecat, et demande que soit constitué un groupe de travail chargé d'étudier les concentrations. Cette initiative reçoit l'approbation du président de la République. Le 27 novembre, Raymond Barre demande au Conseil économique et social de procéder à l'« étude des conditions de gestion des entreprises de presse » et d'« apprécier les diverses mesures susceptibles de maintenir et d'accentuer le pluralisme ». Georges Vedel est nommé rapporteur.

Dans ses conclusions, remises le 18 mai 1979, il remarque tout d'abord l'effondrement de la presse parisienne entre 1975 et 1978 : 1,4 million d'exemplaires en moins, l'effritement du tirage des quotidiens régionaux (moins 700 000 exemplaires en 18 ans), une baisse de 17 points des recettes publicitaires entre 1967 et 1978, alors que, pendant cette même période, la part de la télévision a augmenté de 14 points, enfin le relèvement de l'aide publique, qui est passée de 815 millions en 1970 à 2 796 millions en 1978.

Le rapport propose de modifier et de compléter les dispositions de l'ordonnance du 26 août 1944, de créer une commission des opérations de presse chargée de veiller à la transparence des capitaux investis dans les journaux, d'instaurer un contrôle des concentrations et des ententes, de procéder à la réforme des aides publiques qui devraient être plus bénéfiques pour les entreprises qui en ont le plus besoin, de substituer progressivement un système de prêts à taux réduits aux avantages accordés en matière d'investissement par l'article 39 bis du Code général des impôts, enfin d'instituer une aide spécifique aux publications d'information politique et générale à faibles annonces publicitaires. À propos de l'aide à la création de nouveaux titres, le rapporteur remarque que « le système des aides publiques à la presse aurait gagné à s'appuyer sur des formules de type coopératif ».

Le 10 avril 1978, Henri Caillavet et Jacques Thyraud déposent un projet de loi prévoyant la création d'un Institut national de la presse dont le but serait de répartir l'aide de l'État, de favoriser la naissance de journaux à idées et de surveiller les restructurations pour éviter les concentrations.

Grèves et déontologie

Les difficultés financières — que l'on a toujours tendance à résoudre par des licenciements — sont à l'origine de mouvements de grève dans plusieurs organes : le Nouvel Économiste, Elle, Sud-Radio. Plusieurs grèves perturbent le fonctionnement de l'AFP : les différends avec la direction — accusée d'actes de censure à propos de l'absence de couverture de certains événements — portent sur l'aptitude au travail sur console de visualisation, le recrutement des journalistes et le reclassement de ceux qui sont déclarés inaptes au travail sur les nouveaux matériels. Le conflit de la SFP provoque des grèves de soutien de la part des journalistes de la télévision.

Difficultés également à Rouge (qui de quotidien devient hebdomadaire), au Quotidien du peuple, à Libération. Des revendications salariales des ouvriers de l'imprimerie interrompent la parution de la Croix pendant cinq jours et empêchent la sortie de plusieurs quotidiens de province, Ouest-France, les Dernières Nouvelles d'Alsace, la Nouvelle République du Centre-Ouest.

Un conflit ancien entre les familles Brémond et Lignel pour la possession du Progrès de Lyon trouve son épilogue dans le rachat des actions — pour 115 millions de F — par Jean-Charles Lignel.