Journal de l'année Édition 1977 1977Éd. 1977

Tout au plus les Neuf parviennent-ils à donner ensemble une certaine publicité aux actions qu'ils entreprennent, chacun de leur côté, pour réduire le chômage des jeunes. Ils réussissent aussi, ce qui n'est pas rien, à se mettre d'accord sur un système commun de perception de la TVA, rendant ainsi possible la mise en place, le 1er janvier 1978, d'un budget européen fondé sur des ressources propres, c'est-à-dire des ressources que les parlements nationaux ne contrôlent plus.

Les Neuf s'efforcent de conjurer de nouvelles hausses du prix du pétrole. Dans leur manœuvre sur le plan européen et sur le plan international, la diplomatie giscardienne occupe une bonne place. Les résultats ne sont pas à la hauteur des efforts accomplis. Ainsi, au Conseil européen de La Haye, V. Giscard d'Estaing suggère que la CEE, à l'instar de la France, plafonne ses importations de pétrole et développe un plan d'économie d'énergie. Si ces bonnes idées ne germent pas, du moins ne sont-elles pas provocatrices à l'égard de l'OPEP, car elles participent de la politique du dialogue. Elles peuvent avoir contribué à maîtriser la hausse du prix du pétrole.

Quoi qu'il en soit du dialogue Nord-Sud, l'acceptation par les pays industrialisés d'un fonds commun pour l'organisation des marchés des matières premières reste un fait acquis. Le ralliement à cette solution d'un pays aussi récalcitrant que la RFA est bien le fruit du travail de persuasion conduit dans les instances européennes, notamment au Conseil européen de Rome de mars.

Comme on pouvait s'y attendre devant la persistance et l'importance du chômage, chaque pays s'efforce d'accroître ses exportations et de limiter ses importations pour faire tourner ses propres usines. Les escarmouches se multiplient sur le front du commerce international. La perspective d'une reprise des négociations du Tokyo round exacerbe les positions. L'Europe a des droits de douane (7 %) plus faibles que ceux de ses partenaires américains (7,5 %) et japonais (9,8 %). Elle subit de plus l'offensive commerciale japonaise dans des conditions qui appellent les Neuf à réagir. Autant que la poussée des ventes japonaises en Europe, c'est la difficulté de pénétrer sur le marché japonais qui inquiète les Européens.

Une première mise en garde est adressée au Japon par le Conseil européen de La Haye en novembre 1976. La Commission de la CEE passe aux mesures de sauvegarde, en décidant de surtaxer les importations de roulements à bille japonais. Le Japon décide de freiner son expansion sur le marché mondial de la construction navale, marché qu'il accapare presque totalement.

Le Conseil européen de Rome, les 25 et 26 mars 1977, prend acte des progrès accomplis, sans considérer tous les problèmes résolus. Tout en restant vigilants sur certains secteurs (le textile, l'acier), les Neuf cependant ne veulent pas céder à la tentation du protectionnisme. Le sommet de Londres début juin indique que les États-Unis sont sur la même longueur d'ondes, au niveau des principes. Cela n'exclut pas que, de part et d'autre, le contentieux demeure, voire grossit (exemple : la mise en cause par les tribunaux américains du principe du remboursement de la TVA aux exportations). La France, elle-même, prend, à la fin de juin, une décision mal vue à Bruxelles : elle fait jouer la clause de sauvegarde prévue dans les accords du GATT pour limiter les importations de certains articles textiles (sauf celles qui proviennent des pays de la Communauté). Et, le 22 juin, la Commission européenne estime même que les décisions de Paris sont illégales, tout en admettant que le textile européen est confronté à de très graves difficultés. Des décisions de caractère communautaire (prises d'ailleurs ultérieurement) auraient été préférables, affirme-t-elle, à une attitude irréfléchie et improvisée.

La rouille

« L'Europe a besoin d'institutions adaptées au stade prochain de son développement », dit Giscard d'Estaing fin janvier 1977 à Strasbourg, en inaugurant le Palais de l'Europe, qui accueille l'Assemblée européenne.