Armée

Polémiques sur le service militaire et l'arme nucléaire

La querelle ouverte, à la fin de juin 1976, par les propos de V. Giscard d'Estaing et du chef d'état-major des armées, le général Guy Méry, sur les rapports de la stratégie française avec celle des alliés occidentaux (Journal de l'année 1976-77) s'est estompée et, paradoxalement, c'est l'opposition de gauche qui a repris à son compte une large part de la doctrine gaulliste en matière de défense, privilégiant l'arme nucléaire comme l'un des garants de l'indépendance nationale. Tant le comité directeur du PS que le comité central du PCF ont été amenés à réviser l'attitude des partis de gauche sur la dissuasion et, même, sur la place ou la durée du service militaire dans le dispositif de défense.

Pérennité

Pour tenter d'apaiser les remous nés, dans la classe politique, des exposés de V. Giscard d'Estaing et du général Méry à l'Institut des hautes études de défense nationale, qui avaient alors été interprétés comme un rapprochement des thèses françaises avec celles de l'OTAN, le ministre de la Défense, Yvon Bourges, profite d'un voyage à Avord (Cher), le vendredi 9 juillet 1976 sur une base de bombardiers nucléaires Mirage IV, pour réaffirmer « la pérennité de la politique de dissuasion » et « la volonté du gouvernement de maintenir et de développer ces systèmes d'armes ».

Cette mise au point officielle apporte, provisoirement peut-être, un point final à une querelle de circonstance, engendrée principalement par des ambiguïtés ou des impropriétés de termes dans l'expression de sa doctrine militaire par le chef de l'État. On remarquera, au demeurant, que V. Giscard d'Estaing, après cet incident, n'a plus abordé, en public, les questions fondamentales de la dissuasion nucléaire et que le chef d'état-major des Armées s'est montré plus discret. Seul le Premier ministre, Raymond Barre, a pris la liberté de réaffirmer, le mardi 14 septembre, devant le même Institut des hautes études de défense nationale, que « les grandes orientations de notre politique, définies par le général de Gaulle, seront maintenues » et que « les forces nucléaires continueront à croître en potentiel et en efficacité, car elles restent l'instrument fondamental de notre défense ».

Service militaire

Après le départ du gouvernement, le 4 août 1976, du général Marcel Bigeard, qui occupait les fonctions de secrétaire d'État à la Défense (depuis février 1975), le ministre de la Défense présente, du reste, un projet de budget militaire pour 1977 qui ne modifie pas sensiblement les orientations précédentes. Toutefois, des critiques lui sont adressées, en particulier de la part de députés de la majorité qui contestent la répartition des crédits et les sacrifices financiers consentis sur les équipements ou l'infrastructure.

C'est le cas, notamment, de Jacques Cressard et de Joël Le Theule, tous deux députés RPR, qui dénoncent l'inégalité du service militaire et le poids excessif des dépenses de personnel dans le budget de la Défense. Ces critiques sont, en fait, le point de départ d'une nouvelle dissension, apparue au sein même de la majorité, entre adversaires et partisans du système de la conscription, tel qu'il est appliqué aujourd'hui. Dans cette nouvelle querelle de doctrine s'illustre, principalement, Pierre Messmer, ancien ministre des Armées du général de Gaulle et ancien Premier ministre de Georges Pompidou, devenu un partisan convaincu du volontariat, assorti ou non d'un appel de recrues sous les drapeaux pour une courte période.

Les éléments objectifs qui sont à la base de cette division de la majorité ont été fournis par une étude publique du service de recrutement. Selon cet organisme militaire, un jeune Français sur trois en âge d'être appelé sous les drapeaux échappe, en réalité, aux obligations du service militaire. Jacques Cressard considère, dans une étude rédigée au nom du RPR, que le service militaire, en devenant profondément inégalitaire, n'offre plus l'avantage de l'universalité souvent avancé par ses partisans.