Journal de l'année Édition 1977 1977Éd. 1977

Faute d'un accord sur l'énergie, les pays industrialisés ont été évidemment très prudents sur les autres chapitres où le tiers monde était demandeur : remise des dettes et stabilisation des cours des matières premières. Il n'y aura aucune remise générale des dettes ; on se contentera d'examiner, cas par cas, la situation des pays menacés de banqueroute. En revanche, les riches ont finalement accepté de mettre en place un fonds commun, destiné à garantir aux pays pauvres producteurs de matières premières une certaine stabilisation de leurs revenus. Les Américains, qui avaient longtemps bloqué (avec les Allemands) la négociation sur ce point, ont changé d'attitude après l'arrivée au pouvoir de Jimmy Carter. C'est le résultat principal de la conférence Nord-Sud.

Sommet

Le déroulement des négociations a mis en évidence, d'une part l'unité, plus forte que prévu, du tiers monde et, d'autre part, le rôle décisif des États-Unis. Du fait de leur poids spécifique, ceux-ci retrouvent très rapidement leur rôle de leader, dès que se dissipent leurs brumes politiques intérieures. L'arrivée au pouvoir de J. Carter vient de le démontrer, une fois de plus. Le président américain a fait une entrée remarquée dans le club des Grands, au sommet des grandes puissances non communistes, à Londres, en mai 1977.

À ce sommet, les Occidentaux ont constaté qu'ils sortaient difficilement de la crise économique. Il y avait encore 15 millions de chômeurs dans les pays de l'OCDE fin 1976 ; on en prévoit 16 millions, fin 1977. Et cela malgré une reprise de la production dans les grandes économies : aux États-Unis, la croissance a été de 6,1 % en 1976 et devait être de 5,2 % en 1 977 ; en Allemagne, les chiffres respectifs sont 5,6 et 4 %; au Japon, 6,4 % et 6 %. La persistance du chômage, malgré la reprise, et la réapparition de l'inflation (elle sera plus forte, dans l'ensemble occidental, en 1977 qu'en 1976) montrent que le monde n'est pas sorti complètement guéri de la crise 1973-1975. Un nouvel équilibre se cherche, qui ne se définira pas rapidement. On voit apparaître, parmi les pays sous-développés, des producteurs de biens industriels qui concurrencent ceux des pays riches. Au sommet de Londres, puis à la réunion de l'OCDE, fin juin 1977, les pays riches ont renouvelé leur serment de ne pas fermer leurs frontières pour protéger leurs emplois. Toutefois, les exceptions se multiplient, et la France elle-même a fait jouer, en juin 1977, une clause de sauvegarde des accords du GATT sur le commerce international, pour protéger son industrie textile contre les chemises, les pantalons et autres produits textiles en provenance d'Asie et d'Afrique.

Or, il est évident que l'Occident ne peut pas, à la fois, se protéger contre ce genre de produits et continuer d'exporter des usines dans ces mêmes pays, puisque ce sont les biens qui sortent de ces usines qui arrivent ensuite chez nous. L'industrialisation du tiers monde est inéluctable et souhaitable. Elle nous imposera de renoncer à certaines activités et d'en développer d'autres. C'est-à-dire d'être plus mobiles, au moment où chacun cherche au contraire une plus grande sécurité dans la stabilité de son emploi. Cette contradiction explique, pour une part, le bilan décevant du plan Barre et annonce les difficultés que tout gouvernement, de droite ou de gauche, devra résoudre dans l'avenir.