L'article 84 du code pénal permet de punir de détention criminelle (cinq à dix ans) quiconque, en temps de paix, aura participé en connaissance de cause à une entreprise de démoralisation de l'armée.

Agitation

Dans l'opposition de gauche, la CFDT, qui a soutenu avec des réserves l'initiative de Besançon, se trouve assez vite isolée et elle estime que le gouvernement s'est livré à une diversion pour masquer les difficultés économiques et sociales de l'heure.

Pour sa part, la CGT considère que, si un syndicat de soldats ne se justifie pas pour plusieurs raisons, le droit d'association doit être reconnu aux appelés, avec la constitution de commissions de délégués et de cadres du commandement.

Le parti communiste propose d'instituer une commission régimentaire, pour associer les représentants des appelés aux décisions les concernant, mais il rejette ce qu'il estime être l'antimilitarisme des comités de soldats, soutenus par des organisations gauchistes et accusés de faire le jeu du gouvernement en faveur de l'éventualité de l'instauration en France d'une armée de métier.

Le PS demande, de son côté la stricte application du règlement de discipline générale sur l'instauration de commissions consultatives dans les unités. Réunis à Cachan (Val-de-Marne) en une branche-soldats du contingent de la convention pour l'armée nouvelle, des appelés socialistes ont réclamé « une représentation démocratique par voie d'élection au sein de comités consultatifs de soldats ».

Mais, d'une manière générale, les dirigeants socialistes considèrent que l'initiative de Besançon affaiblit l'outil de défense, et le soutien qu'ils apportent au mouvement vise d'abord les inculpés, civils et militaires, après l'information ouverte par la Cour de sûreté.

Poursuites

Au total, 53 personnes (des appelés et des militants du PSU ou de la CFDT, pour la plupart) sont poursuivies pour tentative de démoralisation de l'armée et elles sont progressivement placées sous mandat de dépôt. Les 22 défenseurs de ces inculpés estiment que la Cour de sûreté ne dispose pas d'éléments déterminants et que les poursuites actuelles servent d'alibi à « une véritable chasse aux sorcières ». Il faudra attendre le 5 mars 1976 pour que le dernier inculpé, incarcéré en décembre 1975, soit mis en liberté.

« En matière de défense, explique le chef de l'État qui a, lui-même, pris la décision d'en appeler à la Cour de sûreté de l'État, je souhaiterais que s'instaure un consensus national. Pratiquement, toutes les familles politiques françaises insistent sur la nécessité pour la France d'avoir une défense indépendante. (...) Je crois que la France pourrait dégager une unanimité sur la nécessité d'assurer elle-même, par des moyens modernes, sa défense dans un esprit pacifique. »

Malgré ces déclarations de V. Giscard d'Estaing en prélude au vote par le Parlement des crédits militaires, qui s'élèvent à 50 milliards de F pour 1976, les problèmes de défense vont continuer d'agiter la classe politique. En particulier, la programmation militaire que présente Yvon Bourges, ministre de la Défense, sur l'équipement des forces armées entre 1977 et 1982 va relancer le débat à l'intérieur même de la majorité et, plus spécialement, du parti de Jacques Chirac.

Dépenses

L'Assemblée nationale, le 25 mai 1976, puis le Sénat, le 8 juin, approuvent un document d'une cinquantaine de pages, dont le chef de l'État a corrigé l'avant-propos et qui est un engagement du gouvernement à consacrer, pour les six années prochaines, l'équivalent, au total, de 502 milliards de F pour les dépenses de fonctionnement et d'équipement des armées.

En son principe, cette programmation militaire maintient le service militaire d'un an, diminue de 21 600 hommes les effectifs de l'armée de terre, qui s'élèvent actuellement à 331 600 hommes, et elle garantit que la part des crédits de la défense dans les dépenses publiques cessera de diminuer. C'est ainsi que, selon les directives gouvernementales, le budget de la défense (il représente en 1976 environ 17,1 % du budget de l'État) sera supérieur à 58 milliards de F en 1977, pour atteindre, en 1982, environ 20 % des dépenses publiques.