En face des services publics, le consommateur est encore plus désarmé : les factures de gaz, d'électricité ou de téléphone sont tout aussi impératives qu'ésotériques. Et bien des locataires d'offices d'HLM savent combien il est difficile d'obtenir le détail des charges locatives : les recommandations de la commission Delmon, chargée de trouver des solutions à ces épineux problèmes, sont loin d'être encore scrupuleusement appliquées.

Lorsqu'un conflit s'élève entre un locataire et son propriétaire (une société, bien souvent, qu'elle soit privée ou publique), ce dernier a bien sûr tendance à faire jouer immédiatement les clauses d'expulsion du contrat.

Protection

De l'autre colloque sur la responsabilité des fabricants et distributeurs de produits, organisé par X. Ghestin, professeur de droit à l'université de Paris-I au début de l'année 1975, un assez large consensus s'est dégagé pour constater que le Code est aujourd'hui tout à fait insuffisant pour répondre aux besoins de justice des consommateurs.

Il est relativement simple d'admettre que le producteur est responsable, mais beaucoup plus difficile d'appliquer cette règle simple : lorsqu'un avion s'écrase, à cause d'un incendie provoqué par un chauffe-eau qui a enflammé un rideau de matière plastique, qui sera le producteur responsable ?

D'autre part, pour les garanties offertes par un contrat, les participants ont très largement admis qu'il faut distinguer entre le consommateur et l'acheteur industriel d'un bien d'équipement : les clauses limitatives de garantie devraient pouvoir être négociées dans ce dernier cas, et proscrites quand il s'agit d'un consommateur individuel.

Mais cette protection du consommateur pose d'épineux problèmes d'assurances pour l'industriel, si sa responsabilité totale est reconnue. Les problèmes se posent de manière insistante et leur traduction est inextricable avec le développement des échanges internationaux et le nombre des firmes multinationales.

Pour qu'un droit de la consommation sorte des limbes comme naguère le droit du travail, il faut que les organisations de consommateurs soient de plus en plus aptes à en défendre la nécessité. La loi leur a donné le droit d'ester en justice, mais a assorti ce droit de conditions telles que l'Union fédérale des consommateurs (UFC), éditrice de la revue Que choisir ?, s'est vu refuser l'agrément nécessaire. À peine adoptée, la loi a besoin d'être améliorée.

Les ministres des Affaires étrangères des Neuf adoptent en avril 1975 un Programme pour une politique de protection et d'information des consommateurs. Cette prise de conscience à l'échelle gouvernementale sera-t-elle bientôt suivie de mesures concrètes ?

Les organisations de consommateurs, tout en progressant, n'ont pas encore conquis l'audience qui devrait être la leur. Et les remous qui ont secoué au cours de cette année les organes dirigeants de la revue Que choisir ?, spécialisée dans la publication de tests comparatifs, ont mis un instant en danger cette forme d'action.

Dès la fin de 1973, des dissensions se sont fait jour au sein du conseil d'administration au sujet des accords passés en juin 1969 avec l'association des consommateurs belges, qui édite la revue Test-Achats. Un seul directeur, belge, Gilbert Castelain. Un contenu presque identique pour les deux revues.

La collaboration était si étroite que la comptabilité, la gestion du fichier des abonnés, la promotion, la rédaction étaient assurées en Belgique. Après bien des discussions, tout au long de l'année, la rupture est consommée en octobre 1974. Depuis, les responsables nouveaux de Que choisir ? ont établi leurs relations avec l'association belge sur des bases plus saines, et la revue commence à sortir de l'ornière.

Il aurait été grave que cette crise interne prive nos concitoyens d'une revue telle que Que choisir ? Les tests comparatifs et les études qu'elle publie restent une forme d'action indispensable à la défense des consommateurs.