Les cadres de carrière ne sont pas les seuls à protester contre les conditions matérielles dans lesquelles ils exercent leur vocation. Les appelés du contingent, eux aussi, font valoir des revendications. Une centaine d'entre eux, pour la première fois, adressent une lettre collective aux candidats au second tour de l'élection présidentielle, dans laquelle ils réclament notamment « une solde égale au SMIC et la gratuité des transports », la « suppression des brimades sous toutes leurs formes », « la liberté totale d'expression et d'information ». Ni François Mitterrand ni Valéry Giscard d'Estaing ne répondront à cet appel, qui marque cependant une révolution dans les mœurs militaires.

Accidents

La mort de huit militaires écrasés par un train sous le tunnel de Chézy-sur-Marne (Aisne), dans la nuit du 22 au 23 janvier 1974, a provoqué une intense émotion en France. Plusieurs personnalités ont formé une commission d'enquête populaire et, pour la première fois, les armées ont dû publier le nombre des accidents par mort violente (accidents, traumatismes et empoisonnements) dans le contingent : 213 hommes en 1971 et 254 en 1972, pour arrêter les rumeurs circulant dans les casernes sur le taux des pertes admises.

À plusieurs reprises, le ministre des Armées a dû s'engager publiquement à améliorer la condition militaire par des mesures financières catégorielles et par l'annonce de dispositions nouvelles relatives au sort du contingent ou à l'avenir professionnel de certains spécialistes militaires, tels les médecins du service de santé. Des projets de réforme du statut des uns et des autres sont élaborés et soumis pour avis au conseil supérieur de la fonction militaire. Mais la disparition brutale de Georges Pompidou et l'élection présidentielle qui s'ensuit retardent la rédaction définitive de ces textes.

Sur ce point précis, Valéry Giscard d'Estaing et François Mitterrand ont indiqué, durant la campagne, qu'ils s'attacheraient à cette revalorisation de la fonction militaire. Cette politique passe par un accroissement, au sein du budget de la défense, des dépenses de fonctionnement et par une augmentation des crédits d'équipement nucléaire ou classique. Du reste, le 8 juin 1974, le président de la République, Valéry Giscard d'Estaing, autorise de nouveaux tirs nucléaires, en Polynésie, en précisant qu'il s'agit « normalement » de la dernière campagne d'essais atmosphériques et que la France passerait, dès 1975, à des expériences souterraines.

En revanche, sur les ventes d'armes, qui se sont élevées en 1973 à 7 ou 8 milliards de francs (dont 5 500 millions de francs pour les seuls matériels aéronautiques), le nouveau chef de l'État a précisé sa position : « Tous les grands pays industriels, quel que soit leur régime politique, fabriquent des armes et en exportent. La France serait prête à réduire ses propres ventes à l'étranger si un accord international était possible. À l'inverse d'autres grandes puissances, elle évite de fournir des armes aux belligérants. »