Quels sont les exportateurs déjà organisés ou en passe de l'être ?
– Cuivre : les producteurs, groupés au sein du Conseil intergouvernemental des pays exportateurs de cuivre (Chili, Pérou, Zaïre et Zambie), vont élever la voix. Mais ils ne détiennent pas le monopole de la production et se heurtent aux États-Unis, à l'URSS et au Canada, autres gros producteurs.
– Étain : Malaisie, Bolivie, Thaïlande, Indonésie, Australie, Nigeria, Zaïre régularisent déjà le marché à travers le Conseil international de l'étain ; forts de leur expérience, ils ne se laisseront pas déborder par l'inflation.
– Phosphates : Maroc et Tunisie pourraient accentuer leur pression sur les pays consommateurs après avoir déjà considérablement augmenté leurs prix. Les États-Unis restent néanmoins les premiers producteurs mondiaux.
– Caoutchouc : premier producteur mondial, la Malaisie s'organise pour mieux contrôler sa commercialisation (le synthétique va devenir plus cher en raison du renchérissement du pétrole).
– Arachide : Sénégal et Nigeria dirigent le Conseil africain de l'arachide et entendent bien se servir de cette institution de régularisation des cours.
– Café : Brésil, Angola, Colombie, Côte-d'Ivoire soutiennent les cours par l'entremise d'un comité international récemment créé.
– Cacao : l'alliance des pays producteurs surveille de près l'évolution des cours et retient les exportations lorsqu'elle le juge nécessaire. L'accord international, laborieusement élaboré, n'est jamais entré en vigueur en raison du haut niveau actuel des prix.
– Riz : la hausse devrait être très forte en raison des besoins élevés des importateurs. Les experts de la CNUCED estiment que le cours du riz thaïlandais, par exemple, pourrait passer de 350 dollars la tonne en 1973 à 550 dollars la tonne en 1974 (+ 57,14 %).

Record

L'ampleur de la hausse a dépassé de loin les prévisions, même les plus hardies. L'inflation des prix a fait penser à la situation de 1950-1951, lors de la crise de Corée, où les prix avaient grimpés de quelque 140 % en vingt et un mois. Depuis fin 1971 jusqu'en avril 1974, l'indice Reuter des matières premières a marqué une progression de 300 % environ. Bien que la quasi-totalité des matières premières aient accusé des hausses de prix, l'indice a été particulièrement influencé par la hausse des prix des produits minéraux (notamment le cuivre et le zinc plus élevée que celle des produits agricoles en général).

Les causes de ces hausses sont dues à de nombreux facteurs, analysés, comme chaque année, par les experts de la Kredietbank, à Bruxelles :
– les réserves mondiales de matières premières ne sont pas inépuisables ;
– les stocks sont tombés à un niveau bas record ;
– le risque de pénuries réelles et la propagation d'une certaine psychose de rareté se manifestent plus fréquemment.

Cette évolution a accentué les tensions entre l'offre et la demande de diverses matières premières, notamment sous l'influence d'un certain nombre d'événements spécifiques.

D'une part, la demande a été stimulée par une conjoncture économique favorable à la fois aux États-Unis, au Japon et à l'Europe occidentale. Une croissance de 13 % environ du commerce mondial (en volume) peut être escomptée. Mais d'autres éléments ont favorisé l'expansion de la demande :
– les achats considérables, surtout de produits agricoles, par l'URSS et la Chine ;
– l'accroissement des stocks dans les industries manufacturières et chez les consommateurs (par exemple les achats importants de laine par le Japon) ;
– les nombreuses opérations spéculatives des investisseurs industriels, dues au malaise monétaire.

Dollar

D'autre part, cette forte demande a coïncidé avec un accroissement moins rapide, voire une réduction de l'offre, par suite de difficultés de production, du malaise social et politique dans certains pays producteurs (Chili), de récoltes défavorables, de limitations volontaires de la production et des exportations dans d'autres pays et, surtout, de la guerre du Proche-Orient et de la crise du pétrole.