Il est vrai que dans ce secteur prioritaire de l'économie le retard semble considérable. Il est acquis, d'ores et déjà, que le 9e plan quinquennal (1971-1975) ne sera pas réalisé, dans l'industrie légère en tout cas. Ces difficultés découlent à la fois de la lourdeur de l'appareil économique et du retard accumulé dans ce domaine lors des précédents plans quinquennaux.

Autre déception pour Moscou, plus grave : l'agriculture. Au printemps 1974, la presse fait état d'inquiétantes difficultés dans les travaux agricoles.

Le 22 avril, 28,7 millions d'hectares seulement avaient été ensemencés (contre 43 millions l'année précédente, année record il est vrai). La situation préoccupe beaucoup les dirigeants de Moscou, qui s'apprêtent à lancer une vaste campagne nationale et qui, en tout état de cause, ont décidé de consacrer à l'agriculture 27 % de tous les investissements prévus cette année. Ces sommes sont destinées à l'accélération des travaux de bonification des sols et à la construction de matériel agricole.

Un plénum du Comité central (décembre 1973) et un important discours de Brejnev à Alma-Ata (mars 1974) témoignent de l'intérêt constant du Kremlin pour l'agriculture. Le secrétaire général du PC soviétique annonce des réformes radicales, et notamment l'intéressement et l'amélioration des conditions de travail et de rémunération des ouvriers agricoles, afin d'augmenter la productivité et de ralentir l'exode rural.

Échanges

Dans les domaines de l'agriculture et de l'industrie, les échecs relatifs de l'Union soviétique sont liés, dans une certaine mesure, au ralentissement du rythme de développement de la coopération économique avec le monde occidental. En effet, en dépit de perspectives politiques très favorables, l'essor des échanges commerciaux reste très en deçà des espérances des dirigeants soviétiques.

Fin 1973, la part des échanges avec les pays capitalistes représente 27 % du commerce extérieur soviétique. C'est beaucoup par rapport au passé, mais c'est encore insuffisant pour permettre à l'économie soviétique de prendre un nouveau départ.

Sur les nombreux projets (gigantesques) se chiffrant en milliards de dollars, seuls quelques-uns ont été menés à terme ou ont reçu un début de réalisation : le complexe de traitement de gaz d'Orenbourg (le plus gros du monde, réalisé par les Français) ou le complexe sidérurgique de Koursk (confié aux Allemands).

Les Soviétiques ont réussi à rétablir la balance de leur commerce extérieur. Mais pour cela il leur a fallu augmenter leurs ventes d'or et de diamants sur les places internationales (on estime généralement à environ 2 milliards de dollars le volume des ventes occultes de l'URSS en 1973). Ils ont également bénéficié de la crise pétrolière. Les ventes de pétrole soviétique sur les marchés occidentaux, évaluées à 50 millions de tonnes par an, devraient permettre à Moscou d'encaisser plus de 3 milliards de dollars, contre 800 millions auparavant.

En 1973, les principaux partenaires de l'URSS étaient, dans l'ordre : l'Allemagne fédérale, le Japon, les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, la Finlande et l'Italie. Cet ordre pourrait être modifié si les grands projets élaborés par les dirigeants soviétiques étaient réalisés. C'est ainsi que le Kremlin a proposé au Japon de participer à la construction d'un oléoduc de 4 000 km (destiné à acheminer le pétrole sibérien vers la côte de la mer du Japon) et surtout d'un deuxième Transsibérien.

Après avoir longtemps hésité, compte tenu des implications stratégiques de ces deux projets et des répercussions qu'ils ne manqueraient pas d'avoir sur leurs relations avec Pékin, les Japonais semblent avoir pris le parti d'accepter. En tout état de cause, ils ont accordé des crédits d'un montant de 1 milliard de dollars.

Aux Français, les dirigeants soviétiques demandent des usines de liquéfaction du gaz et des méthaniers. Aux Allemands, ils souhaitent commander, en plus du complexe de Koursk, des aciéries et des usines métallurgiques.

États-Unis

Mais c'est bien sûr des Américains que Moscou attend le plus. Or, les États-Unis font preuve de peu d'empressement, ce qui irrite l'Union soviétique. Alors que Washington est devenu le premier fournisseur de Moscou (1 190 millions de dollars en 1973), le solde est largement déficitaire pour l'URSS (– 976,3 millions de dollars). Ce déficit pèse d'autant plus aux yeux des dirigeants du Kremlin que la balance du commerce extérieur soviétique est à nouveau positive après le déficit de 1972. Mais Washington refuse toujours d'accorder à l'Union soviétique la clause de la nation la plus favorisée, et les crédits sont bloqués.