Un grand nombre de rencontres théologiques se sont tenues : à Louvain pour la 42e Semaine de missiologie (août 1972), de nombreux séminaires au Centre luthérien d'études œcuméniques de Strasbourg, en Afrique pour la recherche d'une théologie africaine, en Allemagne, aux USA, etc. On pourrait encore faire mention de rapprochements d'Églises séparées ici ou là ; d'entrées de l'Église romaine dans des Conseils nationaux chrétiens ; de la réunion tenue à Francfort (janvier 1973) entre les présidents des Conférences épiscopales catholiques et des Églises protestantes ou orthodoxes d'Europe ; de l'appel lancé par les responsables ecclésiastiques belges (février 1973) aux responsables ecclésiastiques de l'Europe des Neuf pour une action commune...

Il faudrait surtout signaler l'intensification des relations débutantes entre chrétiens d'une part, musulmans, juifs, bouddhistes ou hindouistes d'autre part. Signalons, comme faits significatifs : le Congrès mondial islamique à Beyrouth (janvier 1973) qui, pour la première fois depuis Mahomet, traita du dialogue islamo-chrétien ; les rencontres internationales organisées par le Vatican avec l'islam ou le bouddhisme, par le COE avec le judaïsme, l'islam ou l'hindouisme. Signalons qu'en France, par exemple, l'Église catholique comme l'Église protestante ont des commissions d'étude mixtes avec l'islam ou le judaïsme. Il est donc manifeste qu'à ce seul niveau l'œcuménisme a pris depuis peu une dimension qu'il n'avait pas jusqu'à présent.

Pratique

À ce niveau les progrès ont parfois été grands, parfois très relatifs. Mme Golda Meir a rendu visite au pape Paul VI (janvier 1973), et cette entrevue, plutôt fraîche en raison du contexte politique, fut tout de même un événement. De même, la venue en France du primat de Cantorbéry au moment de la Semaine de prières pour l'unité, a consacré un rapprochement certain des Églises romaine et anglicane. On a constaté, pour la première fois dans l'histoire des congrès eucharistiques catholiques, une participation œcuménique active à celui de Melbourne (février 1973), avec notamment les interventions du pasteur Lukas Vischer, du COE, du théologien réformé allemand Jürgen Moltmann ou du cardinal Jan Willebrands.

Progrès

Sur le plan socio-politique, les progrès d'actions communes auront été grands. C'est ainsi qu'après la divulgation dans la presse, avant les élections françaises, d'une déclaration catholique-protestante contre la vente d'armes, un nouveau texte préparé par des experts a été diffusé en avril 1973.

Dans le même ordre d'idée, l'unité ecclésiastique a été réelle sinon efficace pour lutter contre la terreur en Irlande du Nord, grâce notamment à la Communauté œcuménique de Corrymeela, près de Belfast. Cette unité s'est également manifestée pour porter secours aux victimes du tremblement de terre de Managua au Nicaragua (Noël 1972), à celles des deux Viêt-nam, dès la cessation des hostilités, aux pays en voie de développement avec, par exemple, des actions communes d'envergure comme en Suisse ou au Canada durant le carême 1973, contre le racisme avec la longue marche d'ecclésiastiques de toutes dénominations en Afrique du Sud...

On doit encore citer à ce niveau la 2e Conférence des chrétiens pour la Palestine, tenue à Cantorbéry (septembre 1972), dénonçant à la fois l'antisémitisme et le sionisme ; la première s'était tenue à Beyrouth en 1970. Il est piquant de noter que cette assemblée, très sévère à l'égard de la politique d'Israël, avait pour voisine à Londres, au même moment, l'Assemblée mondiale des rabbins !

Sur le plan éthique, en revanche, les progrès auront été à peu près nuls. Il y a bien eu à Madrid (décembre 1972) une rencontre internationale sur le mariage et d'autres colloques concernant des problèmes éthiques tels que le divorce, la limitation des naissances, la sexualité de la jeunesse, l'avortement..., mais on peut dire que ces problèmes, soulevés partout – sauf peut-être à l'Est – par l'État ou tels organismes profanes, ont sans doute interpellé les Églises ; ils les ont même secouées mais n'ont pas rapproché leurs positions divergentes. En France, en Suisse, aux USA, en Allemagne, etc., des procès, des déclarations de médecins ont suscité des réactions catholiques, protestantes ou orthodoxes qui paraissent jusqu'à présent parfaitement inconciliables. Ce fait est d'autant plus grave que c'est sur ce plan-là que les hommes d'aujourd'hui attendent encore quelque chose des chrétiens. On peut seulement répondre à cela qu'il n'y aura pas de progrès dans ce domaine sans un sérieux et nécessaire renouveau théologique.

Sauvage

On ne saurait épiloguer sur cet œcuménisme-là pour la simple raison que, le plus souvent, il s'agit de réflexions, d'actions quasi clandestines. Il n'en existe pas moins et donne une coloration nouvelle à l'œcuménisme officiel. On sait que la majorité des jeunes venus à Taizé ou dans d'autres lieux de rassemblements identiques ont déserté l'institution ecclésiastique. Ainsi en est-il de ceux qui vivent la Jesus Revolution. Ils ne manifestent aucune hostilité à l'égard de ces institutions, mais mènent déjà une vie communautaire tout autre, qui préfigure peut-être l'Église de demain. Cela est tout aussi vrai de groupes d'action politique composés de jeunes chrétiens et, très souvent aussi, de jeunes gauchistes. Leur référence à l'Évangile est parfois bien limitée, notamment en Amérique latine, mais ils poursuivent des combats altruistes risqués qu'ils reprochent à l'Église établie de fuir ou même de réfuter par prudence.

Utrecht

Chaque année, le COE réunit en session de travail son organe suprême, qui est son comité central, composé de 120 membres. Ce comité examine l'activité passée et donne des orientations pour l'activité à venir. La quasi-totalité de la chrétienté collabore avec le COE, y compris, à tous les niveaux, l'Église catholique qui n'en est pas encore officiellement membre.