Si l'on extrapole les besoins en fonction des programmes d'équipement nucléaire du monde occidental (environ 40 millions d'UTS par an à partir de 1980), on voit la nécessité d'une ou plusieurs installations nouvelles d'enrichissement pour cette date, soit aux États-Unis, soit en Europe, installations qui devront être décidées au plus tard d'ici deux ans, (compte tenu des très longs délais de construction et de mise en route). L'Angleterre, l'Allemagne et les Pays-Bas, partenaires de l'accord tripartite pour l'enrichissement par centrifugation, ont poursuivi leurs études et la construction de leurs usines pilotes. Mais, en mars 1971, la France a pris l'initiative de lancer l'étude d'implantation, soit dans la vallée du Rhône, soit dans la plaine d'Alsace, d'une usine civile de dimension européenne pour l'enrichissement de l'uranium par diffusion gazeuse. La France a offert à ses partenaires européens de se joindre à ce projet dans le plus large esprit de coopération scientifique, technique et industrielle. On aura une idée de l'importance d'un tel projet, d'une capacité de 6 millions d'UTS par an, par la première estimation de son coût : de l'ordre de 3 milliards de francs (auxquels il faut ajouter au moins un milliard pour les centrales électriques d'alimentation).

En mars 1971, la France et l'URSS ont signé un contrat pour l'enrichissement à façon, par les Soviétiques, du combustible nécessaire à la centrale de Fessenheim. Il est encore trop tôt pour savoir si ce contrat n'est qu'un épisode de la politique de la France pour son indépendance nucléaire, ou s'il annonce l'arrivée sur le marché international de l'enrichissement (estimé à plus d'un milliard de dollars par an à partir de 1980) d'un nouveau fournisseur qui pourrait en modifier profondément les données.

Le tokamak de Fontenay-aux-Roses

Le Commissariat à l'Énergie atomique a entrepris la construction, à Fontenay-aux-Roses, d'une machine du type Tokamak, destinée à pousser plus avant les recherches sur la fusion thermonucléaire contrôlée. On sait que pour amorcer et entretenir la fusion des noyaux légers il faut porter l'isotope d'hydrogène utilisé (du deutérium ou du tritium) à une température de 50 millions de degrés, maintenir ce plasma à une densité suffisante et le garder stable dans l'espace durant un certain temps.

Jusqu'ici ce sont les chercheurs soviétiques qui ont obtenu les résultats les plus proches de ces conditions, avec les machines dites Tokamak, anneaux creux dans lesquels l'hydrogène est chauffé par un courant électrique et contenu au centre de l'anneau par des courants magnétiques.

Il est peu probable que la machine de Fontenay-aux-Roses réalise directement la fusion thermonucléaire contrôlée, mais elle explorera les propriétés des plasmas à haute température, et la nature des phénomènes perturbateurs qui jusqu'ici en ont empêché le confinement au-delà de quelques fractions de seconde.

La première centrale MHD en URSS

La cinquième conférence internationale sur la production magnétohydrodynamique d'électricité, réunie à Munich en avril, a enregistré le départ de la première réalisation à l'échelle industrielle dans ce domaine : une centrale de 25 MWé, entrée en fonctionnement quelques semaines auparavant en URSS.

La production magnétohydrodynamique — en abrégé MHD — est un procédé de conversion directe de la chaleur en énergie électrique (Journal de l'année 1966-67). Un gaz chauffé à très haute température, donc ionisé et rendu conducteur de l'électricité (ce qu'on appelle un plasma), circule à grande vitesse dans un champ magnétique. Comme tout conducteur en mouvement dans un tel champ, il est alors parcouru par un courant électrique, que l'on recueille sur des électrodes qui jouent le même rôle que les balais d'une dynamo. Mais, dans un générateur MHD, il n'y a aucun mécanisme mobile, pas de pièce tournante, d'où un rendement élevé.

Calories résiduelles

Le principe de la MHD est connu depuis longtemps, mais sa réalisation s'est heurtée à de grosses difficultés techniques. Le plasma, chauffé à plusieurs milliers de degrés, ne laisse pas vivre longtemps les matériaux de la tuyère et surtout les électrodes. Les ingénieurs soviétiques semblent avoir réussi à fabriquer des électrodes fonctionnant pendant plusieurs milliers d'heures. C'est ainsi qu'ils ont fait démarrer il y a cinq ans une installation expérimentale de 2 MWé. L'usine qui vient d'être inaugurée a une puissance de 25 MWé, produits par la conversion MHD, plus 50 MWé par le cycle vapeur classique. En effet, le gaz, au sortir de la tuyère, est encore à une température pouvant être utilisée par une chaudière. À une centrale MHD à cycle ouvert (où les gaz ne sont pas récupérés) est normalement associée une centrale thermique ordinaire, qui récupère des calories résiduelles.

Recherches dans le monde

Une installation expérimentale, à Kiev, essaie des matériaux de longue durée (électrodes fonctionnant pendant 5 000 heures). Des plans sont en cours pour une deuxième centrale industrielle soviétique de 1 500 MWé, partie MHD, partie vapeur, avec un rendement global de 50 %. Ces installations fonctionnent au gaz naturel, chauffé par sa propre combustion, et ensemencé de substances qui améliorent sa conductivité thermique.