Le 9, à 22 h 4 mn 58 s, la capsule se pose sur les eaux du Pacifique à 7 km du porte-avions New Orleans.

L'Europe spatiale et la coopération internationale

Les deux organisations européennes CECLES, ou ELDO (chargée des lanceurs), et CERS, ou ESRO (chargée des satellites), ont traversé des crises que le vote de leur budget pour 1971 a palliées en décembre 1970. À l'arrière-plan des réticences et des oppositions se profilent deux raisons évidentes : le parti pris de certains de ne pas entrer en concurrence avec les États-Unis, la répugnance pour d'autres à voir la France jouer un rôle trop important (elle est le seul partenaire à disposer d'un cosmodrome et de moyens lui permettant de réaliser dans les plus brefs délais de grosses fusées très fiables).

La situation s'est éclaircie lorsque la France et l'Allemagne, suivies par la Belgique, ont décidé d'aller — au besoin sans le concours des autres pays membres — vers une phase nouvelle pour l'Europe spatiale : celle des satellites utilitaires (télécommunications, radionavigation, météorologie). Début janvier 1971, le CNES français, l'organisme homologue allemand et le CIFAS (Consortium industriel franco-allemand pour Symphonie) signent le contrat définitif pour la construction des deux satellites de télécommunications géostationnaires Symphonie, qui, à partir de 1973, doivent mettre une fin au monopole de fait des USA en matière de télécommunications par satellite. Placés au-dessus de l'océan Atlantique, les deux relais franco-allemands relieront l'Europe, l'Afrique, le Proche-Orient et les deux Amériques.

Les 17 et 18 décembre, la rupture avait été évitée à la CECLES-ELDO. Le budget approuvé prévoit, outre la poursuite du programme Europa I, la construction des fusées Europa II nécessaires pour le lancement des satellites Symphonie.

Le 22 décembre, c'était l'approbation du budget de la CERS-ESRO, qui, jusqu'ici, n'a fait construire et lancer que des satellites de recherche scientifique. Usant du fait que les engagements pris initialement pour huit ans par les pays membres seront caducs à la fin de 1970, la France a dénoncé ces accords, afin de pouvoir quitter l'organisation si celle-ci ne porte pas son effort sur les satellites utilitaires.

NASA et Soviétiques

Après des réunions d'experts à Moscou en octobre 1970, des discussions au sommet ont eu lieu dans la même ville du 18 au 24 janvier 1971, avec la participation du Dr George Low, directeur de la NASA, et du professeur Mstislav Keldych, président de l'Académie des sciences de l'URSS. Le rapprochement entre les deux patrons de la recherche spatiale porte principalement sur quatre points :
– normalisation envisagée des éléments servant à l'accostage des vaisseaux spatiaux, afin que tout engin puisse assurer une mission de sauvetage, quelle que soit la nationalité des cosmonautes en détresse ;
– collaboration accrue dans le domaine de la prévision du temps à longue échéance (profitant des possibilités qu'offrent les nouveaux satellites, Meteor soviétiques et ITOS et NOAA américains) ;
– échange d'informations sur les expériences faites de part et d'autre en matière de biologie et de médecine spatiales ;
– recherche spatiale en général.

Les Soviétiques collaborent aussi avec d'autres pays. Les satellites Intercosmos 3 et 4, lancés respectivement le 28 juillet et le 14 octobre 1970, sont munis d'instruments fournis par des équipes scientifiques des pays socialistes ; Lunakhod est porteur d'un réflecteur laser français.

L'emprise militaire

Les douze mois écoulés ont révélé quels insurmontables obstacles s'opposent à l'essor d'une large coopération dans le domaine spatial. L'un des faits qui sont à l'origine des difficultés rencontrées a toujours paru évident à quiconque suit de près les choses de l'espace, mais il vient seulement d'être découvert, avec un mélange d'étonnement et d'amertume, par les diplomates et les politiciens : pour 50 % la recherche spatiale, même lorsqu'elle est conduite par des organismes civils, est d'intérêt militaire.