Au début beaucoup de pages restèrent blanches sur leur carnet de rendez-vous. Mais, peu à peu, les contrats viennent.

Les Olympiades se seraient disputées aux États-Unis, comme en 1964, elles auraient probablement été boycottées par toutes les équipes européennes. Par solidarité envers les Britanniques.

La Fédération anglaise a en effet blanchi ses joueurs Reese et Schapiro, accusés par les Américains d'avoir triché lors des championnats du monde de San Francisco. Mais la Fédération mondiale, à prédominance américaine, s'est refusée à enregistrer ce non-lieu. Elle l'estime de complaisance. Pour elle, Reese et Schapiro sont coupables et ne peuvent jouer dans aucune compétition officielle.

Reese devant faire partie de son équipe pour Deauville, l'Angleterre a déclaré forfait. Beaucoup plus en signe de protestation (l'équipe féminine a d'ailleurs fait de même) qu'à cause de l'embarras où elle se trouvait de lui trouver un remplaçant.

Derrière l'intransigeance américaine, il y a sans aucun doute des arrière-plans mercantiles. Le bridge est une véritable industrie aux États-Unis et il fait sa publicité à coups de titres, tout comme les sports athlétiques. Se débarrasser de Reese, c'était éliminer un gros obstacle sur la route du titre olympique. Seuls les Italiens demeuraient, mais il pouvait leur arriver un accident sur un aussi long parcours.

La saison 1968 a vu incontestablement grandir le prestige du bridge français dans le monde. Mais ce fut uniquement grâce à l'organisation impeccable des Olympiades qui se disputèrent à Deauville, en juin.

Étant donné les circonstances dans les jours qui précédèrent l'ouverture des jeux, le mérite de notre Fédération n'est pas mince d'avoir ainsi atteint la perfection. Affolé par la crise française, le président de la Fédération mondiale, l'Américain Salomon, envisagea même le transfert des Olympiades à Genève. Les Suisses, heureusement, ne surent pas improviser. Car il aurait été dommage de priver 34 pays de l'accueil de Deauville.

Grands favoris de l'épreuve, les Italiens sans avoir à forcer leur talent outre mesure, ont remporté le titre. Dans la poule éliminatoire, ils prirent rapidement une marge confortable de points de victoire et leur qualification ne fut jamais douteuse. Dans la phase finale, ils commencèrent par dominer complètement les Canadiens, puis, dans le match pour le titre, ils eurent toujours l'avantage au score sur les Américains, battus, en fin de compte, par 49 points. Ce qui est sans appel.