Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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orgue (suite)

L’extérieur d’un orgue

Il comprend le meuble, ou buffet, et l’instrument sonore.

• Le meuble a pris place sur une tribune, entre sol et voûte. On y observe un soubassement, dans lequel le facteur a placé une console groupant claviers et registres. Au-dessus de ce soubassement, l’architecte a dessiné une façade découpée en secteurs qui sont soit plats (plates-faces), soit en demi-lunes (tourelles). Des tuyaux de façade en étain rehaussent de leur éclat la silhouette de ce buffet, et un grand entablement avec corniches souvent surmontées de statues vient fermer cette immense niche de bois, dans laquelle se trouvent comprimés tous les organes mécaniques et sonores de l’instrument. Il est très fréquent qu’un grand orgue comprenne deux buffets. Le plus petit, placé à même la tribune et portant le nom de positif de dos, répond au meuble principal, dont il reproduit parfois l’articulation en plates-faces et en tourelles.

Le décor de ces buffets a évolué en fonction de l’architecture et de la culture d’une époque. Il n’existe plus en Europe que quelques buffets du Moyen Âge, tel celui de Levroux (Indre) ; l’époque de la Renaissance est représentée par une cinquantaine de meubles dont l’ornementation somptueuse évoque la gouge des huchiers italiens ; le xviie s. a donné une grandeur noble aux boiseries, désormais plus équilibrées par une simple recherche de lignes, de moulurations et de corniches ; le xviiie s., par ses galbes, ses lignes sinueuses a rendu plus aimable le décor de l’époque précédente ; quant au xixe s., il n’a fait que copier des meubles Renaissance, ou des boiseries classiques ; le xxe s. tend à supprimer le buffet. Pour les architectes d’autrefois, le décor dont on parait un buffet devait compter parmi les éléments les plus séduisants d’un édifice.

Les boiseries étaient souvent peintes en blanc, en argent et en or ; de grandes cariatides soutenaient de leurs bras robustes les lourdes tourelles latérales, remplacées au siècle des lumières par des têtes de chérubins souriants.

• L’instrument sonore suppose de celui qui le fabrique — l’organier — des connaissances multiples ; cet artisan doit être en même temps menuisier, serrurier et acousticien, doit savoir travailler le bois, le plomb, l’étain, le cuivre, adapter son instrument à un édifice donné et l’ériger en fonction des proportions qu’offre ce dernier, car, contrairement aux autres instruments de musique, l’orgue ne peut être construit en série.

L’orgue n’a cessé de se transformer de génération en génération, mais il obéit à un certain nombre de principes intangibles, dont nous énumérerons quelques-uns ici.

Touché par les mains et par les pieds, l’orgue comporte une console, qui groupe de un à cinq claviers manuels, aujourd’hui de soixante et une notes, et un clavier de pédales de trente-deux notes. Ces claviers manuels correspondent à un certain nombre de plans sonores, qui portent chacun un nom : grand-orgue, positif, récit, écho, solo. Chacun de ces claviers fait parler un nombre de registres, ou jeux, mis en action soit par des tirettes de bois si l’orgue est mécanique, soit par des dominos à bascules si la traction des jeux est électrique. Au-dessus des touches du pédalier, l’organier a groupé, notamment depuis le xixe s., des tirasses, des champignons et des poussoirs, qui ont chacun une action déterminée, soit qu’ils permettent d’utiliser certains jeux au pied si les mains ne sont pas libres, soit qu’ils autorisent des accouplements entre claviers manuels ou entre le pédalier et un clavier manuel.

Au centre de ces pédales, dans un orgue moderne, l’organier a placé une pédale dite « d’expression » qui ouvre à volonté les jalousies d’une chambre dans laquelle se trouvent enfermés les tuyaux d’un ou de deux claviers.


L’intérieur d’un orgue

Les touches de tout clavier manuel, qui pivotent autour d’un axe, sont reliées à des vergettes ou à des fils d’acier qui aboutissent à l’abrégé ; ce mécanisme permet de ramener ou de réduire à la largeur d’un clavier normal (78 cm) celle d’un ou plutôt de deux sommiers mis bout à bout, et qui mesurent 6 m. Cet objet, de forme trapézoïdale, reçoit des rouleaux de bois dans un ordre décroissant, à chaque extrémité desquels un levier vissé s’adapte d’une part à la vergette qui correspond à la touche de la console et d’autre part à un système d’équerres transmettant le mouvement à différentes soupapes qui se trouvent dans le sommier. C’est là tout le « secret » de l’orgue, car le reste se comprend plus aisément.

À chaque clavier manuel, comme au pédalier, correspond un même système de tirage mécanique aboutissant au sommier. Depuis le milieu du xixe s., toute cette traction mécanique groupant vergettes de bois, fils ou ruban d’acier, abrégés et leviers peut être remplacée par une transmission électrique. Celle-ci est faite de centaines ou de milliers de kilomètres de câbles extra-souples, qui aboutissent à des électro-aimants permettant une infinité de combinaisons et facilitant considérablement l’utilisation d’une console d’orgue.

Le sommier constitue l’organe essentiel de tout instrument. Le type le plus connu en est le sommier à gravures : grande caisse de bois qui emmagasine l’air venu de la soufflerie et supporte la tuyauterie.

Cette caisse comporte plusieurs étages, que nous décrirons succinctement de bas en haut : un plancher, percé d’autant de trous qu’il y a de notes au clavier, ces trous laissant passer les vergettes, ou fils de laiton, qui transmettent le mouvement de la touche ; un jeu de vergettes, ou fils de laiton, d’acier, dont chaque individu est attaché à la tête d’une soupape ; un jeu de soupapes, ou clapets, qui reviennent à leur place primitive sous l’action d’un ressort et qui se trouvent enfermées dans la laye ; une manière de grand peigne de bois, le barrage, dont les cloisons parallèles délimitent des cavités qui portent le nom de gravures obturées chacune par une soupape. Le tout est recouvert d’une grande table, percée d’autant de trous qu’il y a de tuyaux correspondant aux jeux du clavier. Sur la table a été fixé un jeu alterné de minces réglettes horizontales, dont les unes sont fixes et dont les autres coulissent de quelques centimètres pour mettre en liaison directe les trous de la réglette et ceux de la table. Cette réglette porte également le nom de registre. Le dernier étage du sommier est représenté par des chapes vissées sur le sommier, qui reçoivent extérieurement le pied du tuyau. Le vent est envoyé aux différents sommiers d’un orgue par l’intermédiaire d’un grand soufflet primaire, puis de canaux de section carrée ou ronde, appelés porte-vent. Ce soufflet primaire est alimenté par un ventilateur, aujourd’hui électrique ; le tout peut trouver place soit à l’intérieur du meuble, derrière le soubassement, soit à l’extérieur, dans une pièce ou un réduit adapté à cet usage. La pression de l’air envoyé aux différents sommiers peut varier entre 80 et 120 mm.