Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
O

œuf (suite)

Œufs « en mosaïque » et œufs « à régulation »

Nous ne saurions négliger deux autres catégories d’œufs, mais, cette fois, il s’agit d’œufs fécondés. Tous les œufs fécondés ne se comportent pas rigoureusement de la même façon au cours du développement ontogénétique.

Une lésion, l’ablation d’un blastomère défini, dans certains œufs (Mollusques, Annélides, Ascidies), entraînent toujours la même déficience ou la même malformation. Ainsi la destruction au stade no 2 de l’un des deux blastomères de l’œuf d’Ascidie provoque la formation d’un hémi-embryon (expérience de Chabry, 1887). L’enlèvement de quatre blastomères végétatifs (2A à 2D selon la nomenclature habituelle) dans l’œuf d’une Némerte au stade no 16 empêche tout développement de l’intestin ; chez les Mollusques et les Annélides, le blastomère 4d conditionne la formation des sacs cœlomiques et de la musculature. Ces œufs anisotropes comportent une mosaïque d’ébauches bien déterminées, de localisations germinales ; ces ébauches territoriales ne sauraient être modifiées dans leur destinée.

Au contraire, d’autres œufs (Oursins, Amphibiens Urodèles) compensent leur perte jusqu’à un certain stade du développement ontogénétique ; un œuf d’Oursin amputé d’un ou de plusieurs blastomères donne naissance à un organisme complet ; ces œufs isotropes sont capables de réparer leurs pertes, d’effectuer une régulation.

Ces deux types d’œufs fécondés existent-ils vraiment ou l’œuf fécondé manifeste-t-il à des degrés différents une tendance à l’anisotropie et une tendance à la régulation ?

Les œufs de Vertébrés possèdent un pouvoir élevé de régulation, notamment ceux des Oiseaux, chez lesquels une portion quelconque du disque germinatif peut produire un embryon complet. Les cas de polyembryonie naturelle (Tatous) donnent un exemple de régulation, puisqu’un œuf unique engendre quatre, huit ou douze individus parfaitement constitués. Il en est de même chez certains Hyménoptères et Bryozoaires. Dans d’autres groupes, les œufs sont déterminés à un stade précoce. Cela ne signifie pas qu’ils sont inaptes à la régulation, mais celle-ci n’est possible que très précocement. Parallèlement, à partir d’un stade plus ou moins tardif, les œufs à régulation présentent une mosaïque de territoires déterminés qui ne peuvent plus être modifiés (embryons de Vertébrés à la fin de la gastrulation).

En conclusion, on ne peut distinguer, de façon tranchée, deux catégories d’œufs fécondés correspondant aux anciennes théories préformiste et épigénétique ; les deux propriétés affectent tous les œufs, mais d’une façon différente ; l’une se manifeste plus ou moins précocement et l’autre se maintient plus ou moins longtemps.

A. T.

 L. Gallien, Problèmes et concepts de l’embryologie expérimentale (Gallimard, 1958) ; « l’Embryologie » dans Biologie sous la dir. de J. Rostand et A. Tétry (Gallimard, « Encyclopédie de la Pléiade », 1965). / E. Wolff, « l’Embryologie causale » dans Précis de biologie générale (Masson, 1966). / C. Houillon, Introduction à la biologie, t. IV : Sexualité (Hermann, 1967).


L’œuf humain

L’œuf humain est constitué dès la fusion du spermatozoïde et de l’ovule. Cette fusion, ou fécondation*, a lieu normalement dans la portion ampullaire de la trompe. Elle se produit généralement entre le douzième et quatorzième jour après le début des règles.

L’œuf fécondé connaît deux périodes de durées très inégales : l’œuf libre et l’œuf fixé dans l’utérus.


L’œuf libre, migration et nidation

La première période est celle de la vie libre, ou migration de l’œuf. Cette migration s’étale sur cinq à sept jours, dont trois ou quatre pour le trajet tubaire et deux ou trois pour le séjour libre dans l’utérus, avant qu’il ne se fixe définitivement. Dans la trompe, c’est la combinaison des mouvements des cils vibratiles qui tapissent la muqueuse, des mouvements péristaltiques de la musculeuse et des courants séreux intracanalaires qui assure cette progression de l’œuf. Les enclaves glycogéniques des cellules non ciliées de l’épithélium de la trompe assurent la nutrition de l’œuf en migration.

Au niveau de l’utérus, les manifestations musculaires sont inverses de celles de la trompe et sont caractérisées par une hypotonie du myomètre s’associant à une hypertonie du sphincter isthmique. Entre-temps, sans beaucoup grossir, l’œuf a commencé ses divisions. Divisé en deux blastomères, quarante-huit heures après la fécondation, l’œuf en comptera huit à la sortie de la trompe. Trois jours de vie libre et de divisions dans l’utérus (prénidation) vont faire de lui le blastocyste formé d’un massif cellulaire, le bouton embryonnaire, et d’une assise cellulaire, le futur trophoblaste.

Au septième jour, il va commencer sa seconde période, celle de sa vie fixe, en réalisant avec l’utérus l’acte complexe et minutieux de la nidation.

Cette nidation se fait par effraction. Elle est le résultat de deux facteurs : l’activité propre du trophoblaste (enveloppe externe) de l’œuf qui en fait un véritable parasite capable de se greffer sur la muqueuse et de la détruire pour y pénétrer ; la transformation sécrétoire de la muqueuse utérine sous l’action de l’activité du corps jaune de l’ovaire. Le lieu de la nidation est généralement situé au voisinage du fond utérin, sur l’une des faces de l’utérus, le plus souvent la postérieure. Elle peut s’effectuer aussi dans un des angles de l’utérus (grossesse angulaire) ou très bas dans la cavité (grossesse praevia). Dans certaines conditions pathologiques, l’œuf peut se nider avant même de pénétrer dans l’utérus (grossesse ovarienne, péritonéale et tubaire), réalisant une grossesse* extra-utérine.


L’œuf fixé dans l’utérus

Dès les premiers stades, l’œuf humain va s’organiser de façon à aboutir progressivement à sa constitution définitive.