Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

noblesse (suite)

Privilèges de service

• Privilèges militaires : obligation générale de « servir » ; service dans des régiments d’élite, tels les gardes du corps ; réservation de postes dans presque tous les autres régiments ; réservation des grades du « Grand Corps » de la marine de guerre.

• Privilèges de cour : réservation des grands offices de la « maison du roi » ; réservation des postes d’écuyers et de pages ; réservation de corps ou d’institutions proches du roi aux nobles à quatre quartiers de noblesse.

• Privilèges dans l’Église : réservation pratiquement exclusive par le roi des bénéfices majeurs depuis le concordat de Bologne de 1516.

Privilèges fiscaux

Exemption du paiement de l’impôt (surtout direct) [taille, crus de la taille, etc.], sauf dans le Midi, où les nobles paient l’impôt sur leurs terres roturières, et à l’exception de la capitation, qui les frappe à partir de 1695.

Privilèges seigneuriaux

La noblesse les partage en fait avec les seigneurs roturiers.

• Droits en argent : cens, champart, banalités, etc.

• Droits honorifiques : attachés à la résidence (girouettes, colombiers) ou attachés à l’Église (banc d’œuvres du côté de l’Évangile, tombeau dans le chœur).

P. T.

➙ Chevalerie / Féodalité / Monarchie d’Ancien Régime.

 M. Bloch, la Société féodale (A. Michel, coll. « Évol. de l’humanité », 1939-40 ; 2 vol.). / C. Germain, Court Traité de la noblesse (Gallimard, 1952). / R. Brun La Valette, Index de la noblesse française subsistante (Sauvegarde historique, Lyon, 1956). / F. Bluche, les Honneurs de la Cour (les Cahiers nobles, 1958 ; 2 vol.) ; la Vie quotidienne de la noblesse française au xviiie siècle (Hachette, 1973). / J. Descheemaeker, les Titres de noblesse en France et dans les pays étrangers (les Cahiers nobles, 1958 ; 2 vol.). / R. Boutruche, Seigneurie et féodalité (Aubier, 1959-1970 ; 2 vol.). / P. Du Puy de Clinchamps, la Noblesse (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1959 ; 2e éd., 1962). / R. Valette, Catalogue de la noblesse française contemporaine (les Cahiers nobles, 1959). / L. Verriest, Noblesse, chevalerie, lignages. Condition des biens et des personnes, seigneurie, ministérialité, bourgeoisie, échevinages (l’Auteur, Bruxelles, 1960). / G. Guérin, Législation et jurisprudence nobiliaires (G. Chatteleyn, Lille, 1962). / F. Bluche et P. Durye, l’Anoblissement par charges avant 1789 (les Cahiers nobles, 1963 ; 2 vol.). / J. Meyer, la Noblesse bretonne du xviiie siècle (S. E. V. P. E. N., 1967 ; 2 vol.) ; Noblesse et pouvoirs dans l’Europe de l’Ancien Régime (Hachette, 1973).

noëls musicaux

Genre musical englobant des œuvres de nature et d’origine différentes, inspirées par le mystère de la Nativité.


Les historiens ont cru pouvoir faire remonter la source de ces noëls aux fêtes des sous-diacres (ou fêtes des Fous) qui se déroulaient au xiie s. pour la célébration de l’Épiphanie (6 janv.) ou de la Circoncision (1er janv.). Il semble bien, cependant, que, dès le ixe s., l’usage des tropes s’applique d’une manière privilégiée aux temps de l’Avent et de la Nativité. Les hymnes et les séquences de technique similaire ont vraisemblablement donné naissance aux plus anciens noëls, dont le texte, en langue vulgaire, apparaît comme une adaptation ou une parodie du texte latin initial. Lorsque, au xiiie s., le style de la chanson populaire pénètre les formes liturgiques et paraliturgiques, la Nativité devient l’un des thèmes favoris des auteurs de ce temps ; le drame liturgique s’en empare de même, et certain rondeau à trois voix d’Adam* le Bossu évoque dans le tour populaire les coutumes d’alors, et notamment les « quêtes » que l’on pratiqua longtemps dans les campagnes à Noël et à Pâques.

Mais le véritable noël populaire écrit en langue vulgaire, voire en patois, sur des airs de chansons profanes, n’apparaît guère avant le xve s. On le chante à l’origine dans les soirées familiales, mais cette coutume disparaît assez rapidement, selon Étienne Pasquier, qui, en 1571, note qu’on fait encore entendre ce genre de chant pendant l’offertoire de la grand-messe de Noël en plusieurs églises. Au cours de la première moitié du xvie s., on imprime quelques recueils de noëls, sans en noter la musique, car ils sont, selon leur titre, « réduits sur le chant de plusieurs chansons nouvelles » ou « composés sur plusieurs chansons tant vieilles que nouvelles ». Les auteurs de ces textes se nomment alors Lucas Le Moigne, Barthélemy Aneau, Jean-Daniel, dit « Maître Mithou », dont les noëls connurent pendant deux siècles un succès considérable, et Nicolas Denisot, qui s’efforça de rendre à ces chants une gravité que leur popularité leur avait fait progressivement perdre. La réaction contre le caractère familier, satirique et quelquefois bouffon des noëls primitifs s’accentue aux xviie et xviiie s. avec Colletet, P. Binard, Grignion de Montfort et l’abbé Pellegrin. La préciosité prétentieuse de ces œuvres ne put éclipser le succès populaire des noëls de Nicolas Saboly (1614-1675), dont la naïveté malicieuse et l’humour délicat firent longtemps la joie des multitudes qui les chantèrent. Ces noëls ne peuvent, ni par leur aspect littéraire ni par leur structure musicale, être apparentés à la méditation ou à la prière ; ce sont, comme l’a très justement remarqué Michel Brenet, « des chansons profanes, très profanes, des airs de danse, des airs à boire, des vaudevilles : des chants de réveillons, non d’église ».

L’esprit théâtral du romantisme accentuera au xixe s. la décadence du genre, notamment avec le célèbre noël d’A. Adam Minuit, chrétiens, dont la médiocrité notoire fut longtemps l’objet d’un engouement incompréhensible. Le véritable noël populaire s’est toutefois maintenu de nos jours grâce à certains chants, le plus souvent d’origine provençale, tel Il est né le divin enfant. Les traditions du villancico en Espagne et au Portugal, du carol anglais, de la pastorella italienne ou du Weihnachtslied allemand sont encore bien vivantes, et certaines œuvres germaniques comme Stille Nacht ou Tannenbaum ont acquis une célébrité européenne. Le sommeil de l’Enfant Jésus, l’adoration des bergers et des Rois mages forment souvent la figure centrale du noël populaire, qui s’accompagne généralement du sentiment pastoral.

Mais, auprès de ces chants populaires qui les inspireront fréquemment, vont naître des œuvres instrumentales dont les organistes seront les principaux instigateurs. Tels sont par exemple en 1610 les Meslanges de E. Du Caurroy, rassemblant des noëls polyphoniques à quatre voix, et en 1655 les deux livres de noëls et de cantiques spirituels avec basse continue d’A. Auxcousteaux.