navigation fluviale (suite)
En Europe occidentale, la grande réussite est celle de la voie rhénane. Elle tient à la puissance du fleuve, mais aussi à son statut international, qui a créé un climat de concurrence favorable aux initiatives, aux modernisations incessantes. Le charbon de la Ruhr a fait le reste. Vers l’aval, les Pays-Bas et la Belgique ont adopté le gabarit rhénan, cependant que, vers l’amont, la canalisation du Main, du Neckar, de la Moselle élargit la zone drainée, ouvre la Suisse, la France de l’Est et, avec la jonction Rhin-Danube, l’Allemagne du Sud à ces modes puissants de transports. Le ralentissement de l’activité minière, au niveau de la Ruhr, a certainement contribué au tassement qu’on note depuis quelque temps dans le rythme de croissance du trafic, mais celui-ci se diversifie maintenant. Au-delà de ces effets économiques, l’exemple du Rhin a fait naître, en matière d’aménagement régional, une mystique de la voie d’eau.
En France, il n’existe encore que des tronçons à grand gabarit : la Seine du Havre à Paris et à Montereau, le Nord depuis Dunkerque jusqu’à Valenciennes, la vallée du Rhône et celle de la Saône jusqu’à Chalon-sur-Saône. En attendant la fin de la régularisation du Rhône, le coût de la remontée demeure relativement élevé sur ce fleuve. Dans l’ensemble, les échanges ne sont vraiment actifs qu’autour de Paris et dans la région du Nord.
En Europe de l’Est, les équipements progressent. L’aménagement du cours du Danube, dans la région des Portes de Fer, transformera peut-être ce fleuve, jusqu’ici assez peu utilisé. En Pologne, la Vistule n’est guère employée. En U. R. S. S., il n’en va pas de même ; on a dépensé des sommes considérables pour développer les réseaux : le moins important, au sud-ouest, est constitué par le Dniepr et ses affluents. Un second, très étendu, mais mal disposé par rapport aux courants de trafic, est formé par les fleuves de Sibérie occidentale et centrale. La pièce essentielle est articulée autour de la Volga, reliée aux « cinq mers » et qui offre à Moscou des relations faciles aussi bien avec la Caspienne qu’avec la mer Noire, la mer Blanche et la Baltique. Les trafics sont très importants, mais ils perdent petit à petit de leur poids relatif. La longueur de la saison de gel diminue, il est vrai, l’intérêt économique de ces réseaux.
La navigation fluviale a dû se transformer profondément pour s’adapter à la concurrence accrue des moyens terrestres de transport. Elle s’est spécialisée, mais a réussi à garder un rôle décisif dans certains domaines, puisqu’elle est seule capable de réduire les distances économiques, un peu comme le font les navires modernes. Elle est devenue ainsi un des facteurs de localisation important des activités lourdes un peu partout dans le monde industriel.
P. C.
➙ Danube / Mississippi / Rhin / Rhône / Volga.
R. Clozier, l’Économie des transports terrestres, rail, route, eau, t. I de Géographie économique et sociale sous la dir. de A. Cholley (Génin, 1963). / L. Morice, les Transports fluviaux (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1968). / J. Ritter, Géographie des transports (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1971).