Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Moyen Empire (suite)

Vers l’est, des expéditions royales exploitent systématiquement les mines de cuivre et de pierres précieuses (malachite, turquoise) ainsi que les gisements de quartz aurifère du Sinaï. La tradition des missions vers le pays de Pount (en quête d’arbres à encens, de myrrhe, d’électrum, notamment) est reprise dès Mentouhotep II. Sésostris Ier remet en valeur les mines et les carrières du Ouadi Hammamat (particulièrement les mines d’or) ; sur cette longue piste (lit d’un oued desséché), qui, à travers un désert aride, mène les caravanes, en quatre jours de marche, de Coptos (sur le Nil) à Kosseir (sur la mer Rouge), il crée de place en place des points d’eau, dont la présence va permettre de développer les échanges avec l’Orient.

Il y a là une politique concertée, intelligente d’une monarchie qui a su rendre prospérité et sécurité à son royaume.


Arts et littérature

Sécurité et prospérité restaurées s’accompagnent naturellement d’un renouveau original dans tous les domaines de l’expression artistique et littéraire.

Si l’architecture ne retrouve pas sa forme colossale, c’est que la remise en ordre du royaume nécessite encore quelque épargne ; on utilise des matériaux peu coûteux, plus légers (calcaire, brique). Le pavillon de la fête jubilaire de Sésostris Ier (Karnak) est de taille réduite, mais l’élégante justesse de ses proportions en fait une œuvre admirablement achevée. D’une conception nouvelle (dont s’inspirera l’architecte de la reine Hatshepsout), le temple funéraire des Mentouhotep II et III constitue à Deir el-Bahari la première architecture en terrasses, parfaitement adaptée au site naturel. Avec l’apport thébain, une école de sculpture plus durement réaliste, plus énergique prend alors naissance, opposant sa jeune vigueur aux traditions de l’école memphite, plus idéaliste, plus académique : voir la statue massive et brutale de Mentouhotep Ier (trouvée à Deir el-Bahari ; Musée égyptien, Le Caire), le visage anguleux et tourmenté de Sésostris III (Médamoud, Le Caire) et les portraits souriants, à l’expression douce, presque efféminée, d’Amenemhat III (Hawara, Le Caire). D’une conception architecturale par sa structure et ses lignes, la statue-cube apparaît à ce moment. Les bas-reliefs témoignent du même contraste d’écoles : scènes religieuses, d’un traitement froid et lisse, sculptées sur les parois du pavillon de Sésostris Ier ; scènes animées, d’un réalisme plein d’humour, des tombes de Meir. La grande nouveauté est le développement de la peinture pure dans les tombes : notamment à Beni-Hassan. Le Moyen Empire marque aussi le triomphe de la joaillerie égyptienne : pectoraux, colliers, diadèmes, bagues, bijoux, d’or et de pierres précieuses, constituent un admirable trésor.

L’expression écrite est florissante : les instructions royales, les hymnes royaux, les contes et les romans (le Paysan, Contes du papyrus Westcar, les Aventures de Sinouhé, Conte du naufragé), où se retrouvent les grands mythes méditerranéens, les textes satiriques révèlent l’existence d’une langue harmonieuse, au vocabulaire varié et riche, à la syntaxe rigoureuse et équilibrée, et témoignent aussi de la pleine maturité intellectuelle à laquelle est parvenu le peuple de la vallée.

L’un des derniers rois de la XIIe dynastie (le dernier réellement connu), Amenemhat III, est un souverain pacifique. La prospérité intérieure est rétablie, la garde aux frontières efficace, la monarchie semble assurée (surtout depuis que Sésostris Ier a instauré la tradition d’associer au pouvoir l’héritier présomptif du trône). Aussi, reprenant la politique déjà inaugurée par Sésostris II, Amenemhat III se consacre essentiellement à la mise en valeur du Fayoum (oasis entretenue par un bras du Nil, au sud-ouest de Licht) ; il fait construire à Hawara (entrée du Fayoum) un palais dont la grandeur et la multiplicité des salles étonneront les Grecs naïfs, qui lui donneront le nom de Labyrinthe.

Mais Amenemhat IV, puis la reine Sebeknefrourê paraissent être des souverains peu brillants, sans énergie, qui contribuent à faire déchoir la dynastie.

Surtout à ce moment, les mouvements de peuples indo-européens, venus du nord et qui, depuis le début du IIe millénaire, modifient totalement la « carte » de l’Asie antérieure, vont refluer jusqu’aux abords de la vallée du Nil. Une nouvelle et grave menace d’invasion se lève, bientôt concrétisée par les Hyksos. Une seconde période intermédiaire va brutalement interrompre la brillante reprise monarchique du Moyen Empire.

Celui-ci constitue une période charnière dans le développement historique continu de l’Égypte. Il affirme les principes de gestion monarchique ; il précise, développe ou construit les traditions d’une politique extérieure réaliste ; l’idéologie religieuse se diversifie, offre à tous les possibilités d’une survie éternelle ; Thèbes et Memphis, Thèbes et Héliopolis s’affrontent ; les arts trouvent leurs expressions originales ; une conscience commune, dénoncée par les images et les thèmes mythiques, unit l’Égypte aux peuples méditerranéens et asiatiques (que fréquentent ses marchands, ses marins, ses voyageurs). Bientôt se produira l’inévitable contact politique, et le petit royaume, contraint, poussé par les événements, deviendra le plus grand empire d’Orient (v. Nouvel Empire).

C. L.

➙ Égypte.

Moyen-Orient

Partie de l’Asie.


Le terme de Moyen-Orient, comme celui de Proche-Orient, est employé par les géographes dans des acceptions très diverses, englobant parfois tous les pays depuis la Méditerranée orientale jusqu’à l’Iran et l’Afghānistān ou même jusqu’au subcontinent indien. On l’entendra ici dans son sens restreint, celui des pays situés entre la Méditerranée à l’ouest et le golfe Persique à l’est, les hauts pays de Turquie et d’Iran au nord, et la péninsule arabique au sud. Ainsi limité, le Moyen-Orient coïncide avec ce qu’on appelle souvent les pays du Croissant fertile. Il comporte les pays de la façade méditerranéenne, ou Levant (Liban, Syrie, Israël, Jordanie), et l’Iraq, centré sur la cuvette mésopotamienne.