Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Moscou (suite)

Au milieu du xixe s. se développe un style nouveau, inspiré par l’architecture russe médiévale, à laquelle il emprunte de nombreux éléments décoratifs. C’est dans ce style « vieux russe » qu’ont été édifiés par C. Thon (Konstantine Andreïevitch Ton [1794-1881]) le Grand Palais (1838-1849) et le palais des Armures (1849-1851), à l’intérieur du Kremlin ; de même, le Musée historique (1875-1881), dont la décoration extérieure est due à V. Sherwood (Vladimir Ossipovitch Chervoud [1833-1897]), les galeries marchandes (1888-1894), qui abritent aujourd’hui le magasin Goum, et la galerie de peinture Tretiakov, dont la façade a été dessinée par le peintre Viktor Mikhaïlovitch Vasnetsov (1848-1926).

Après la révolution d’Octobre, Moscou redevient la capitale. Comme dans les autres domaines de l’art, des tentatives se font jour pour créer une architecture rompant résolument avec celle du passé. Au début des années 1920, les architectes recherchent surtout des formes nouvelles, méprisant les aspects fonctionnels et les problèmes de construction. De nombreux projets, sans doute irréalisables, sont d’ailleurs dus à des peintres ou à des sculpteurs, tel celui de Tatline* pour un monument à la IIIe Internationale. Par la suite, les architectes s’efforcent de concilier les recherches formelles et les nécessités d’une architecture fonctionnellement adaptée au nouveau genre de vie. C’est dans cet esprit, par exemple, que Konstantine Melnikov construit plusieurs clubs à Moscou, notamment le club Roussakov, auquel il applique le principe des volumes transformables (salle adaptable aux différents besoins).

Cette synthèse entre expression formelle et fonctionnalisme est parfaitement atteinte dans les projets d’Ivan Leonidov à la fin des années 1920. Cependant, ils ne furent pas pris en considération, car alors commençaient à s’imposer les partisans d’un style monumental empruntant ses éléments composites à l’architecture du passé. Ce style triomphera au milieu des années 1930. Qualifié parfois de « stalinien », il est caractérisé par la massivité et la surabondance des éléments décoratifs, colonnes, corniches, etc. Les gratte-ciel de Moscou, tel celui de l’université Lomonossov (1949-1953), en offrent un exemple typique. Après 1956, l’architecture devient beaucoup plus sobre. On édifie des bâtiments de verre et de béton aux formes parallélépipédiques, tels le palais des Congrès (dans l’ensemble du Kremlin), dont le projet a été établi sous la direction de Mikhaïl Vassilievitch Possokhine (né en 1910), le cinéma Russie sur la place Pouchkine, plus récemment l’hôtel Russie ou encore les immeubles du « nouvel Arbat ».

S. T.

 P. Sytine, Histoire de l’urbanisme et de la construction de Moscou (en russe, Moscou, 1954). / Les Monuments du Kremlin de Moscou (en russe, Moscou, 1956). / Around the Kremlin (Moscou, 1962). / I. Antonova et coll., Musées de Moscou (trad. du russe, Cercle d’art, 1963). / M. Ilin, Moscou (en russe, Moscou, 1963). / A. Kopp, Architecture et urbanisme soviétiques des années 20. Ville et révolution (Anthropos, 1967).

Moscovie

Région historique de la Russie.



Du xiiie au xve s.

La principauté de Moscovie naît en 1263 quand le prince de Souzdal Alexandre Nevski lègue à son fils cadet Daniel, par testament, la ville de Moscou et son territoire limitrophe : au total 10 000 km2.

Le nom de Moscou n’apparaît dans les chroniques qu’en 1147 quand Iouri Dolgorouki prince de Rostov-Souzdal (1125-1157) s’empare de ce petit village construit vers 1140 ; en 1156 Iouri Dolgorouki construit sur une colline qui domine la Moskova (Moskva) une forteresse, le Kreml (ou Kremlin). La ville végète au xiie s. dans la dépendance de Souzdal et au début du xiiie s. Cependant, les Mongols envahissent les territoires russes et soumettent la Russie à leur domination. Moscou est brûlée en 1237 et, à partir de 1240, toutes les principautés russes doivent payer tribut au khān de la Horde d’Or installé à Saray (ou Saraï) sur la basse Volga.

La principauté de Moscou se développe à partir de la seconde moitié du xiiie s., grâce à l’adroite politique de Daniel Nevski et de ses successeurs, qui, face aux autres principautés russes (Tver, Riazan, Rostov, Nijni-Novgorod), jouent la carte mongole.

Descendant des princes de Kiev, Daniel Nevski réussit pendant son long règne (1263-1303) à reconstruire Moscou, à doubler la superficie de sa principauté (20 000 km2) et à ranimer l’économie grâce au commerce.

Son fils Iouri (1303-1325) épouse la sœur du khān Ouzbek et prépare la politique de son frère et successeur Ivan.

À la mort de Iouri, Ivan Ier Danilovitch (1325-1340) poursuit cette politique et réussit à tripler la superficie de la principauté, qui atteint 60 000 km2. Par le Iarlyk (Charte selon laquelle la Horde d’Or régit l’administration de la « terre russe » par l’intermédiaire des princes des différentes régions) de 1328, la Horde d’Or lui confère le titre de grand-prince de Moscou et le charge de collecter le tribut perçu par les Mongols sur toutes les principautés russes au détriment du prince de Tver. Il réussit ainsi à accroître considérablement ses ressources, car il prélève une part du tribut perçu par les Mongols, d’où son surnom d’Ivan « Kalita » (Ivan « la Bourse »). Moscou est devenue une capitale politique. Elle est aussi une capitale religieuse : le métropolite orthodoxe, installé depuis la ruine de Kiev à Vladimir, décide en 1326 d’établir son siège à l’intérieur de l’enceinte en bois du Kremlin de Moscou.

Après une trentaine d’années de difficultés dues à la médiocrité des princes moscovites ou à leur jeune âge, la principauté de Moscou connaît un nouvel essor grâce à Dimitri Donskoï (1359-1389). Avec la bénédiction de l’Église orthodoxe, Dimitri va, pour la première fois, combattre les Mongols, affaiblis il est vrai par des querelles dynastiques. Il remporte ainsi contre le général Mamaï, le 8 septembre 1380, la bataille de Koulikovo Pole près du Don, d’où son surnom de « Donskoï ». Cependant, les Mongols prennent leur revanche en 1382 et incendient Moscou.

Sous le règne de Basile (Vassili) Ier (1389-1425), Tamerlan (Tīmūr Lang) menace Moscou en 1395, mais il renonce à son entreprise pour des conquêtes orientales. En 1408, une dernière tentative mongole connaît un nouvel échec.

Pendant tout le xive s., et malgré les combats contre les Mongols, le développement économique de la Moscovie est réel. Moscou elle-même s’agrandit et s’étend sur la rive gauche de la Moskova. La ville devient un centre commercial important pour le commerce est-ouest.