Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

modernisme (suite)

 A. Houtin, Histoire du modernisme catholique (Nourry, 1912). / J. Rivière, le Modernisme dans L’Église (Letouzey et Ané, 1929). / F. Heiler, Der Vater des katholischen Modernismus, Alfred Loisy, 1857-1940 (Munich, 1947). / V. Vinay, Ernesto Buonaiuti e l’Italia religiosa del suo tempo (Torre Pellice, 1956). / R. Marlé, Au cœur de la crise moderniste (Montaigne, 1960). / A. Houtin et F. Sartiaux, Alfred Loisy. Sa vie, son œuvre (C. N. R. S., 1961). / P. Scoppola, Crisi modernista e rinnovamento cattolico in Italia (Bologne, 1961). / E. Poulat, Histoire, dogme et critique dans la crise moderniste (Casterman, 1962) ; Intégrisme et catholicisme intégral, l’affaire de la Sapinière (Casterman, 1969) ; Une œuvre clandestine d’Henri Bremond, « Sylvain Leblanc, un clerc qui n’a pas trahi » (Rome, 1972). / J. Steinmann, Friedrich von Hügel, sa vie, son œuvre et ses amitiés (Montaigne, 1962). / L. Bedeschi, Il Modernismo e Romolo Murri in Emilia e Romagna (Parme, 1967). / J. J. Heaney, The Modernist Crisis : von Hügel (Londres, 1969). / A. R. Vidler, A Variety of Catholic Modernists (Cambridge, 1970).

Modigliani (Amedeo)

Peintre italien (Livourne 1884 - Paris 1920).


La légende s’est emparée de Modigliani plus que de tout autre, exagérant le désordre et la bohème pittoresque d’une vie passionnée, mais jamais à l’abri de la misère. C’est que l’intensité de son existence et de son œuvre s’inscrit dans un moment de transformations sociales et de révolutions picturales (le fauvisme* en 1905, le cubisme* en 1907) qui font de Paris un foyer d’avant-garde, où le jeune peintre viendra, en 1906, chercher la confirmation de ses intuitions.

Né d’un modeste courtier de Livourne et d’une mère juive (d’origine marseillaise), Modigliani fait très vite preuve de brillantes qualités dans ses études, mais une pleurésie, puis une affection typhoïdique suivie de complications pulmonaires interrompent ces études en 1898 : c’est la première atteinte du mal qui tourmentera toute sa vie. Sa passion pour la peinture, apparue durant sa convalescence, le mène dans l’atelier du paysagiste livournais Gugliemo Micheli. Mais Modigliani aspire à d’autres expériences et, après une rechute de tuberculose en 1900, il entreprend un voyage vers Capri, Amalfi, Naples, Rome ; sa personnalité s’affirme, particulièrement au contact de l’œuvre de Nietzsche : « Je sens maintenant germer en moi une infinité de possibilités, et j’ai besoin de créer une œuvre », écrit-il en 1901 à un ami, le peintre Oscar Ghiglia (1876-1945). Il se rend en 1902 à Florence, puis l’année suivante à Venise, alors centre artistique important, où il approche l’impressionnisme* à travers des articles de revues parisiennes et aussi l’expressionnisme « sécessionniste » venu de Vienne et de Munich.

Mais l’avant-garde française est un attrait majeur pour tous les jeunes artistes, et, en 1906, Modigliani découvre à Paris l’œuvre de Cézanne*, les audaces de Picasso* et de Braque*. Sa propre originalité se renforce dans l’extraordinaire ambiance artistique de la capitale, et il expose bientôt (en 1908, puis en 1910) au Salon des indépendants. En 1909, sa rencontre avec Brâncuşi* par l’intermédiaire d’un mécène, le docteur Paul Alexandre, l’incite à la sculpture, et il se consacre pendant quelque temps aux Têtes de femme et aux Cariatides ; tandis que l’art de Cézanne lui suggère la construction par masses chromatiques, l’expérience de Brâncuşi et la sculpture nègre lui inspirent des compositions aux rythmes linéaires marqués. Par-delà l’influence cubiste qui transparaît dans ses sculptures, la ligne devient pour Modigliani le moyen d’expression majeur ; elle unit la surface et la profondeur ainsi que, dans d’innombrables Nus et Portraits, la sensualité et la pureté.

En 1914, Modigliani fait la connaissance de la poétesse anglaise Béatrice Hastings, sa compagne de deux années, puis du poète polonais Leopold Zborowski, l’ami inlassable qui luttera désormais pour vendre quelques tableaux du peintre et améliorer une situation matérielle particulièrement dramatique. L’exposition que Zborowski organise en 1918 à la galerie Berthe Weil se solde par un scandale (la police fait retirer les peintures de nus), mais obtient néanmoins un certain succès. En 1917, Modigliani rencontre une jeune élève de l’École des arts décoratifs, Jeanne Hébuterne (née en 1898), qui l’accompagnera jusque dans la mort. C’est à cette époque que l’artiste atteint sa pleine maturité (Nu couché ou Nu rouge, coll. priv., Milan ; Portrait de Soutine au verre de vin, National Gallery of Art, Washington). Sa ligne, hantée par un idéal de beauté suprême (qui rappelle Simone Martini, Pisanello, Botticelli), est aussi l’expression d’un tourment intérieur qu’il projette sur ses modèles ; dans de nombreux portraits, Jeanne Hébuterne incarne le plus parfaitement l’aspiration du génie de Modigliani.

Progressivement, une certaine sérénité méditative s’installe dans l’œuvre de l’artiste. Dans les toiles de 1918 et de 1919, Modigliani essaie d’intégrer à une couleur plus légère l’intensité expressive et la pureté dont la ligne demeure le véhicule. Son engouement originel pour Cézanne est plus que jamais sensible, mais selon un rythme ample et doux, comme en témoigne l’Autoportrait de 1919 (coll. priv., São Paulo), où il se représente épuisé par la maladie, mélancolique et noble. Il lui reste peu à vivre : la tuberculose, la misère, plus encore que les stupéfiants, l’ont vaincu ; Modigliani meurt le 25 janvier 1920, et, le lendemain, Jeanne Hébuterne, qui lui a donné une fille en 1918 et attend un autre enfant, se jette du cinquième étage en apprenant sa mort.

F. D.

 A. Pfannstiel, Amedeo Modigliani (Seheur, 1929) ; Modigliani et son œuvre (Bibl. des arts, 1957). / E. Carli, Amedeo Modigliani (Rome, 1952). / A. Ceroni, Amedeo Modigliani, peintre (Milan, 1958) ; Amedeo Modigliani, dessins et sculptures (Milan, 1965). / J. Modigliani, Modigliani senza leggenda (Florence, 1958 ; trad. fr. Modigliani sans légende, Gründ, 1961). / C. Roy, Modigliani (Skira, Genève, 1958). / A. Werner, Modigliani sculpteur (Nagel, 1962) ; Amedeo Modigliani (New York, 1966 ; trad. fr. Cercle d’art, 1969). / A. Ceroni, I Dipinti di Modigliani (Milan, 1970 ; trad. fr. Tout l’œuvre peint de Modigliani, Flammarion, 1972).