Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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miniature (suite)

Dans les Pays-Bas, on a déjà noté une fusion assez complète avec le style français, qui va durer jusqu’en 1477, à la mort de Charles le Téméraire. Ensuite apparaît une miniature proprement flamande. L’école ganto-brugeoise cherchera à imiter la grande peinture à l’huile, sur panneaux, de l’époque, au détriment des qualités propres à la miniature. Elle produira en particulier l’Hortulus animae, le bréviaire Mayer Van der Bergh (1510, Anvers) et le bréviaire Grimani (1490-1520, bibliothèque Marcienne, Venise). À côté des Flandres, il faut mentionner l’école hollandaise, dont les œuvres subissent l’ascendant français (Grande Bible historiale néerlandaise du maître Otto de Moerdrecht, bibliothèque de La Haye).

Une fois la veine d’inspiration ottonienne épuisée, l’Allemagne répète son enseignement jusqu’à la fin du Moyen Âge en ce qui concerne la miniature. Elle ne se dégage de Byzance que pour suivre, plus ou moins heureusement, le courant français. La production allemande est une source documentaire importante pour les archéologues et historiens par son illustration abondante de la vie profane : costumes, objets, traditions populaires. Citons les Chroniques saxonnes et les fameux manuscrits des troubadours ou Minnesänger, de Walther von der Vogelweide, Wolfram von Eschenbach, Gottfried de Strasbourg (bibliothèque de l’université de Heidelberg). Citons également le cas intéressant du livre de prières de Maximilien Ier, dont le texte est imprimé, mais dont un exemplaire fut illustré par Dürer* de quarante-cinq dessins à la plume, rehaussés d’encres de couleur (Munich, Staatsbibliothek). À Prague, le mécénat de Charles IV de Luxembourg développe l’activité des ateliers bohémiens ; le passionnaire de l’abbesse Cunégonde (1320) et la bible de Vétislav (1341-1346) en sont les œuvres les plus remarquables.

En Italie, ce n’est qu’à l’aube du quattrocento que la miniature s’épanouit. Avant 1400, cependant, l’école dite « lombarde » offre des romans de chevalerie écrits en français : le Roman de Lancelot du Lac, le Roman de Guitton le Courtois. Cet art plus français qu’italien produit également des cartes de tarot, des livres d’heures (celui de Filippo Maria Visconti en particulier).


La Renaissance et l’époque classique

Au début du xve s. apparaissent les écoles florentine et siennoise, qu’illustrent des peintres tels que Simone Martini* et plus tard Lorenzo Monaco. Bibles et antiphonaires en seront la production essentielle. Un épanouissement tardif prendra place à Ferrare, autour de la cour des Este. On y trouve des œuvres de peintres plus que d’enlumineurs, en particulier la bible de Borso d’Este (1455-1462), de l’atelier de Taddeo Crivelli, la bible de Niccolo d’Este (Bibliothèque vaticane), le bréviaire d’Ercole Ier, le livre d’heures d’Alphonse Ier.

Le plus célèbre des miniaturistes florentins, Attavante Degli Attavanti (1452-1517), travailla principalement pour l’évêque de Dol-de-Bretagne, Thomas James, et pour Mathias Corvin, roi de Hongrie, un des plus grands amateurs et mécènes du livre enluminé. Girolamo da Cremona et Liberale da Verona enluminèrent dans la seconde moitié du xve s. de somptueux antiphonaires pour la cathédrale de Sienne (libreria Piccolomini). La Lombardie garde son rôle particulier : une œuvre capitale de l’école de Milan est le livre d’heures des Sforza (1490), attribué à Ambrogio De Predis, disciple de Léonard de Vinci (British Museum). Au xvie s., un nom est à retenir, celui de don Giulio Clovio (1498-1578), appelé par Vasari « le prince des miniaturistes » et qui s’inspire des fresques de Michel-Ange.

À la miniature française du xvie s. s’attache le vocable d’italianisante. Si la miniature ne perd pas sa clientèle d’un coup, elle aura à lutter contre la gravure et l’imprimerie, et à suivre la mode pour survivre. Cherchant de nouveaux modèles, elle s’inspirera de la peinture sur panneaux, perdant du même coup son identité propre. Le style italien est d’abord introduit par Georges Ier d’Amboise, archevêque de Rouen, qui influence les divers ateliers de son diocèse. Vers 1520 paraissent les Commentaires de la guerre gallique, avec les portraits des « Preux de Marignan » élégamment traités en grisaille rehaussée d’or par Godefroy le Batave (B. N. et British Museum) ; sous Henri II sont à signaler des livres d’heures, dont le plus remarquable est celui du connétable de Montmorency (musée Condé, Chantilly). Quelques peintres français travailleront en Italie au xvie s., à contre-courant de la Renaissance et du maniérisme, probablement grâce à leur haute technicité. Le plus connu est Vincent Raymond de Lodève († 1550), dont le célèbre psautier de Paul III révèle un art exquis, très habile, mais empreint d’une froideur qui indique bien le déclin du genre. De nombreuses œuvres sortiront encore des ateliers français, de plus en plus italianisants. Mais la miniature ne pourra redevenir ce qu’elle était : l’imprimerie l’aura cette fois évincée.

Du xviie s., on peut cependant admirer la célèbre Guirlande de Julie (collection privée), recueil de madrigaux calligraphiés dont chaque feuillet s’orne d’une fleur peinte par Nicolas Robert (1610-1684), et les Grandes Heures de Louis XIV, offertes au monarque par ses pensionnaires reconnaissants des Invalides (B. N.).

Si l’art de la miniature intégrée au texte tend à disparaître, celui de la miniaturisation se développe. Cette technique hautement évoluée sera utilisée à d’autres tâches. Nicolas Robert est avant tout illustrateur de botanique (vélins de Gaston d’Orléans au Museum national d’histoire naturelle) ; d’autre part, l’enluminure et la calligraphie seront employées sous Louis XIV pour des ouvrages administratifs, cartographiques en particulier. Ensuite, la miniature ne sera plus qu’un art d’agrément, servant au portrait ainsi qu’au décor, peint sur ivoire ou émaillé, de petits objets tels que tabatières, bonbonnières, étuis, etc.