Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

métamathématique (suite)

Théorème de Löwenheim-Skolem

Partons d’une formalisation de la logique des prédicats du 1er ordre. Celle-ci contient des variables d’objets, des variables de propositions, des variables de prédicats unaires, binaires, etc., des fondeurs propositionnels et les quantificateurs. On appelle champ d’interprétation la donnée des domaines suivants :
— un domaine d’objets quelconques Do, ou domaine de base, que l’on fait correspondre aux variables d’objets ;
— le domaine Dv = df{1,0}, intuitivement le domaine {vrai, faux} qui correspondra aux variables de propositions ;
— le domaine des applications de Do vers Dv, que l’on fait correspondre aux variables de prédicats unaires ;
— le domaine des applications de Do × Do vers Dv que l’on fait correspondre aux variables de prédicats binaires ; et ainsi de suite.

Les opérateurs propositionnels sont définis par les tables de vérités usuelles et (∀xA a la valeur 1 si A a la valeur 1 pour toute valeur de x. (V. calcul des prédicats.)

Dès lors, une expression bien formée A de la logique des prédicats est dite réalisable sur si l’on peut attribuer à chacune de ses variables un élément du domaine correspondant (donner à A une assignation) et que le résultat par les opérateurs et les quantificateurs soit 1. A sera valide sur , si le résultat a la valeur 1 pour toute assignation possible. A sera valide (sans plus) si elle est valide sur tout champ dans lequel Do n’est pas vide.

Supposons maintenant que l’on ajoute à la logique des prédicats de nouvelles constantes et des axiomes appropriés (comme nous l’avons fait, par exemple, pour ). On obtient ce qu’on appelle une logique appliquée ℒ des prédicats du 1er ordre. On dit alors que ℒ possède un modèle s’il existe un champ d’interprétation dans lequel tous les théorèmes de ℒ sont valides sur . Un modèle est fini, dénombrable, non dénombrable si Do est fini, dénombrable, non dénombrable.


Remarque

Au sens strict, la logique des prédicats avec identité est déjà une logique appliquée.

La notion de modèle permet de revenir sur celles de consistance et de complétude. On dira qu’un système est sémantiquement consistant s’il possède au moins un modèle. L’anglais dit satisfiable et l’allemand erfüllbar. D’autre part, un système est sémantiquement complet (on dit aussi complet au sens faible) s’il existe un modèle par rapport auquel toute expression bien formée valide est un théorème. La complétude sémantique est donc relative au modèle choisi.

Par ailleurs, l’étude des modèles conduit à des résultats importants.

En 1915, Leopold Löwenheim avait établi un théorème, généralisé par Skolem en 1920 et qui conduit au théorème dit « de Löwenheim-Skolem » :

Si une logique appliquée du 1er ordre est consistante, elle admet un modèle dénombrable.

Ce théorème mène à une conséquence fondamentale. Il est en effet possible, dans une logique appliquée du 1er ordre, de formaliser diverses théories mathématiques et, en particulier, celle des ensembles. Or, cette dernière comporte des ensembles non dénombrables, mais, dans la mesure où sa formalisation est consistante, il est néanmoins possible de donner un domaine Do dénombrable, de telle sorte que tous les théorèmes soient satisfaits (paradoxe de Skolem). Cela a conduit Thoralf Skolem (1887-1963) à admettre que la notion d’ensembles dénombrables et non dénombrables n’était que relative et dépendait de l’axiomatisation choisie.

Une autre conséquence découle immédiatement de là. Disons qu’un système formel est catégorique si tous ses modèles sont isomorphes. est-il catégorique ? Il possède de toute évidence des modèles isomorphes.

En voici, par exemple, deux :

Les signes –, + et . dans les modèles ont leur signification arithmétique normale, et le modèle 1 est celui qui est visé par Peano.

Skolem en 1934 a démontré non seulement que possédait des modèles non isomorphes à ceux-ci (modèles non standard), mais que toute formalisation de l’arithmétique dans une logique du 1er ordre possédait de tels modèles, c’est-à-dire qu’elle ne pouvait être catégorique.

Notons, pour terminer, qu’il est possible d’obtenir une formalisation catégorique de l’arithmétique, mais à deux conditions. D’une part, il faut faire usage de la logique des prédicats du 2e ordre (les variables de prédicats y sont quantifiées) et, d’autre part, il faut s’en tenir aux modèles tels qu’ils ont été définis, modèles dans lesquels on fait correspondre, aux variables de prédicats à n places, toutes les applications de Do vers Dv.

J.-B. G.

 S. C. Kleene, Introduction to Metamathematics (Amsterdam, 1952) ; Mathematical Logic (New York, 1967 ; trad. fr. Logique mathématique, A. Colin, 1971). / J. Ladriere, les Imitations internes des formalismes (Nauwelaerts, Louvain et Gauthier-Villars, 1957). / R. M. Smullyan, Theory of Formal Systems (Princeton, N. J., 1961). / R. Martin, Logique contemporaine et formalisation (P. U. F., 1964). / G. Kreisel et J. L. Krivine, Éléments de logique mathématique. Théorie des modèles (Dunod, 1967).

métamorphisme

Ensemble des changements, intervenant à l’état solide, dans la composition d’une roche soumise à des conditions différentes de celles dans lesquelles elle s’est formée.


Méta, en composition, indique la succession. Pour qu’une succession de formes soit sensible, il faut encore que ces formes soient différentes. La succession de formes différentes, évidente pour les insectes ou les amphibiens, l’est beaucoup moins pour les roches. Aussi l’idée de métamorphisme apparaît-elle assez tard (1795) avec James Hutton (1726-1797), qui remarque la transformation des roches au contact des corps intrusifs. Il faut encore attendre une quarantaine d’années avant que sir Charles Lyell (1797-1875) ne crée le terme de métamorphisme et ne définisse le phénomène.