Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Mésopotamie (suite)

C’est peut-être au temps des Gouti que se situe le règne de Goudéa à la tête de l’État de Lagash ; ce vicaire, qui ne paraît dépendre d’aucun souverain, a des relations commerciales avec une bonne partie de l’Asie occidentale, et sa richesse lui permet de multiplier les sanctuaires, d’où proviennent les dix-neuf statues que l’on a conservées de lui et qui inaugurent cet art habile et froid qui dure la majeure partie du IIe millénaire.

Vers 2140, le roi d’Ourouk, Outouhegal, bat et expulse le peuple détesté des Gouti, et le prestige de cette victoire lui vaut la prédominance sur tout le pays de Sumer.


L’empire de la IIIe dynastie d’Our (2133-2025)

À la mort d’Outou-hegal, c’est le roi Our-Nammou, fondateur de la IIIe dynastie d’Our*, qui impose sa domination aux cités de basse Mésopotamie. C’est le point de départ d’un empire dont les limites sont mal connues : il doit comprendre toute la Mésopotamie et s’étend, sous le règne de Shoulgi, successeur d’Our-Nammou, à la Susiane et à une partie de l’Élam montagneux. On a qualifié cette période de néo-sumérienne. En fait, si la langue de Sumer est de nouveau employée dans les textes administratifs, le peuple de Sumer a disparu sous l’afflux massif des Sémites ; les populations de l’empire emploient des parlers sémitiques ou le hourrite, et le sumérien n’est plus que la langue de culture d’une élite sociale. Les rois d’Our reprennent et perfectionnent la politique impériale des maîtres d’Akkad. Dieux, ils reçoivent un culte de leur vivant et un hypogée monumental pour leur au-delà. C’est également à ce titre qu’Our-Nammou donne à son peuple le premier code publié en Mésopotamie. Vicaires des divinités locales, les souverains d’Our multiplient les constructions sacrées, en particulier dans leur capitale, où ils développent l’ensemble consacré à Sin, le dieu-lune, y ajoutant une ziggourat (bâtiment fait de terrasses de taille décroissante superposées et couronné par un temple), la plus ancienne connue. L’empire d’Our se caractérise encore par un énorme appareil administratif qui contrôle les temples et les villes. Il y a encore dans chaque cité un vicaire, mais ce n’est plus qu’un fonctionnaire nommé par le roi, qui peut le muter. Par contre, sur le plan économique, les agents commerciaux des temples et du palais commencent à réaliser des affaires pour leur compte.

Les rois d’Our n’ont guère cessé de guerroyer dans le Zagros, mais un péril plus aigu s’annonce à l’ouest : à l’infiltration continue des Amorrites s’ajoutent leurs attaques. Et l’empire est déjà plus qu’à moitié perdu lorsque les Élamites prennent Our, qui est saccagée et dont le dernier roi est déporté (2025).


La période d’Isin-Larsa (xxie-xxe s.) et la Ire dynastie de Babylone (1894-1595)

Le mouvement des peuples va se poursuivre pendant deux siècles au moins : tandis que les Hourrites progressent en haute Mésopotamie vers le sud et vers l’ouest, les Amorrites arrivent en bandes successives, qui se fixent un peu partout au pays des Deux Fleuves, et finissent par adopter un dialecte akkadien.

Ishbi-Erra, qui, comme gouverneur de Mari*, avait trahi et dépouillé son maître, le dernier roi d’Our, bien avant la catastrophe finale, fonde à Isin, en Sumer, une dynastie qui prétend continuer la domination impériale des rois d’Our ; mais cette dynastie se heurte à une dynastie amorrite installée à Larsa dans la même région. D’où le nom de période d’Isin-Larsa que l’on a donné à cette époque, où la Mésopotamie retourne au morcellement politique. Un peu partout, des chefs de guerre, le plus souvent des Amorrites à la tête de leur tribu, se proclament vicaires ou rois d’une cité. Il ne se passe pas de génération sans qu’un ou plusieurs de ces souverains n’entament la construction d’un empire qui s’écroule avant d’avoir achevé la réunification du pays des Deux Fleuves.

Mais l’histoire retient surtout les villes qui ont été des centres culturels ou économiques. Assour, redevenue indépendante à la chute de la IIIe dynastie d’Our, est gouvernée par des vicaires du dieu local Assour, portant des noms akkadiens (le dialecte assyrien est une forme dérivée de la langue d’Akkad). Ces princes participent au commerce fructueux que leurs sujets pratiquent en Anatolie* centrale et dont témoignent les fameuses tablettes assyriennes de Cappadoce (xixe-xviiie s.). Leur dynastie est renversée (v. 1816) par un roitelet amorrite du bassin du Khābūr, Shamshi-Adad Ier, qui se constitue un empire en haute Mésopotamie en dépouillant ou en soumettant les maîtres de nombreuses cités. En particulier, il met la main sur Mari (v. 1798), le grand centre commercial de l’Euphrate. Mais, à la mort du conquérant (v. 1783), son héritier est réduit à la possession d’Assour. Zimri-Lim, le représentant de la dynastie précédente à Mari, se rétablit dans la royauté de ses pères et se rend célèbre par l’achèvement d’un palais qui est le plus beau de son temps. Mais la prédominance politique va passer à Hammourabi* (1792-1750), sixième roi de la dynastie amorrite (1894-1595), qui s’est établie à Babylone, grand centre économique du Bas Pays. Le Babylonien, qui avait d’abord été un allié subordonné de Shamshi-Adad, finit par détruire, entre 1764 et 1754, les principaux royaumes du pays des Deux Fleuves — Larsa, Mari, Eshnounna (à l’est de la basse Diyālā) — et constitue un empire étendu à la majeure partie de la Mésopotamie ; mais c’est son code et ses archives administratives qui l’ont rendu célèbre. En effet, dès le règne de son fils, le royaume de Babylone est réduit au pays d’Akkad. L’obscurité tombe sur la haute Mésopotamie, de nouveau morcelée, et sur le pays de Sumer, qui, gouverné par une dynastie du pays de la Mer (v. 1735-1530), souffre du déclin provoqué par la remontée des sels, qui ruine la culture des céréales, et par la fin du commerce avec la civilisation de l’Indus, ruinée au xviiie s. Les peuples de la périphérie se remettent en mouvement, et, en 1595, une expédition du roi hittite Moursili Ier détruit la Ire dynastie de Babylone (v. Hittites).