Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Mazarin (Jules) (suite)

Lors de la succession de Mantoue, Mazarin négocia la paix entre la France et l’Espagne comme représentant du pape Urbain VIII, qui voulait empêcher à tout prix la guerre entre les puissances catholiques. Ce fut au cours de ces négociations, à Lyon, le 28 janvier 1630, que Mazarin rencontra pour la première fois Richelieu*. La levée du siège de Casale le rendit célèbre dans toute l’Europe : Mazarin, le 26 octobre 1630, au moment où tout semblait perdu et où les troupes françaises et espagnoles allaient s’affronter, s’élança à cheval entre les armées ennemies, agitant en l’air son chapeau et criant « Pace, Pace » ; il tenait en main le projet du traité qu’il venait de faire accepter aux deux puissances. Il contribua au règlement du conflit qui, par le traité de Cherasco du 6 avril 1631, assurait Mantoue au duc de Nevers et Pignerol à la France.

Dès ce traité, l’entente sembla formée entre Richelieu et le jeune diplomate. Mazarin, doué d’une intelligence remarquable, d’une acuité et d’une souplesse d’esprit surprenantes, éloquent, profondément optimiste, était un diplomate-né. Richelieu pensait grâce à lui influer sur le jeu politique du Saint-Siège.

Après un bref séjour à Paris, où il fut fort bien reçu par le roi et Richelieu, Mazarin devint en décembre 1632 chanoine au chapitre de Saint-Jean de Latran. Il entra au service du cardinal Antonio Barberini (1608-1671), neveu de Maffeo Barberini devenu le pape Urbain VIII et favorable à la France.

En 1634, Mazarin fut nommé vice-légat à Avignon et fut chargé en novembre en tant que « nonce extraordinaire » à Paris d’obtenir la restitution au duc de Lorraine de ses États, de défendre la validité du mariage de Gaston d’Orléans avec la sœur du duc de Lorraine, et surtout de plaider en faveur de la paix (l’aide fournie par Richelieu aux princes protestants faisant craindre au pape l’intervention prochaine des Français dans la guerre de Trente Ans). Mais sous la pression des Espagnols, irrités des services de Mazarin, le pape le rappela en Avignon en mars 1635. De retour à Rome fin 1636, il tomba dans une demi-disgrâce. La mort du P. Joseph, candidat officiel de la France au cardinalat, en décembre 1638, ouvrit de nouvelles perspectives à Mazarin.


Au service du roi de France

Invité par Louis XIII, Mazarin quitta définitivement Rome le 14 décembre 1639, pour entrer au service de la France, dont il adopta la nationalité l’année même.

Plusieurs missions diplomatiques lui furent confiées : envoyé en 1641 à Turin, il rétablit l’alliance française avec Marie-Christine de Savoie ; il réussit à convaincre le duc de Bouillon de céder la place de Sedan à la France en 1642.

La nomination au cardinalat ayant été arrachée au pape par les instances de Richelieu, Mazarin reçut le bonnet des mains de Louis XIII le 6 mai 1642 à Valence. Richelieu considérait Mazarin non comme son successeur éventuel, mais comme le premier collaborateur de sa diplomatie. Richelieu mourut le 4 septembre 1642 après avoir recommandé Mazarin à Louis XIII. Mazarin ne cessa jamais de proclamer son admiration et sa reconnaissance pour son bienfaiteur, dont il poursuivit la politique.

Le 5 décembre 1642, Louis XIII fit entrer Mazarin au Conseil du roi. Pour attacher davantage le cardinal au service de la France et du Dauphin, le roi le nomma parrain du futur Louis XIV. Louis XIII mourut le 14 mai 1643 ; dès le 18, le parlement de Paris annulait son testament, qui instituait un Conseil de régence, dont Mazarin était l’un des membres.


Les premières années de la régence (1643-1648)

Anne* d’Autriche, en nommant Mazarin Premier ministre, ne rompit pas avec la tradition du règne précédent. Furent-ils époux (Mazarin n’était pas prêtre) ? nul document ne permet de l’affirmer. Mais leur amour ne saurait faire de doute quand on lit leur correspondance. « De belle taille, le teint vif et beau, les yeux pleins de feu, le nez grand, le front large et majestueux », Mazarin était séduisant.

Le début de la régence fut marqué par la victoire de Rocroi, remportée en mai 1643 sur les Espagnols par le duc d’Enghien (le futur Grand Condé*). Mais ce succès, qui faisait de la maison de Condé le soutien du trône, excita la jalousie d’anciens exilés et de ceux qui avaient cru l’emporter au début de la régence dans les faveurs de la reine. Le duc de Beaufort était le chef de cette cabale dite « dés Importants ». La duchesse de Chevreuse soutenait les prétentions de la maison de Vendôme et de Châteauneuf. Les rivalités entre Mme de Montbazon et la duchesse de Longueville compliquèrent la situation. Le duc de Beaufort emprisonné, Mme de Chevreuse de nouveau exilée, Mazarin fit vraiment à partir de ce moment figure de Premier ministre.

Le cardinal ne chercha pas à réformer les abus nés du système des fermes pour la perception des impôts ; au contraire, durant son ministériat, toute l’administration financière passa aux mains des traitants ou financiers. Michel Particelli d’Emery (v. 1595-1650), surintendant des Finances depuis 1643, créa en 1644 la taxe des aisés et la taxe du toisé, qui frappait les logements modestes construits dans les faubourgs de Paris au-delà de l’enceinte, pour procurer de l’argent au Trésor, épuisé par la poursuite de la guerre. Devant l’opposition du parlement, le président Barillon fut exilé.


La politique étrangère


La guerre de Trente Ans

La paix générale de la chrétienté, tel était le but ultime de la politique extérieure de Mazarin. Le congrès de Westphalie n’empêchait pas la poursuite de la guerre. En 1645, la conjoncture devint très favorable à la France : victoire de Nördlingen, retour de la paix entre la Suède et le Danemark au traité de Brömsebro, traité avec le Danemark, qui ouvrait le Sund au commerce français, mariage de Marie de Gonzague-Nevers avec Ladislas IV, roi de Pologne. Mazarin alors eut la tentation de se réconcilier avec l’Espagne au détriment des Pays-Bas. Il aurait échangé la Catalogne contre les Pays-Bas, lesquels auraient constitué la dot de la jeune infante qui aurait été fiancée au jeune Louis XIV. Servien le dissuada d’un tel projet.