Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

antimoine (suite)

État naturel

L’antimoine, qui représente 5.10–5 p. 100 en poids de la lithosphère, se rencontre surtout sous forme de stibine Sb2S3. On trouve aussi de l’antimoine métallique, fort rare, et des oxydes (Sb2O3 et Sb2O4).


Atome

L’antimoine a dans l’état fondamental de son atome la structure électronique représentée par le symbole :
1s2, 2s2, 2p6, 3s2, 3p6, 3d10, 4s2, 4p6, 4d10, 5s2, 5p3. Il résulte des électrons externes une analogie de propriétés avec l’arsenic et le bismuth, qui fait souvent considérer ces trois éléments comme intermédiaires entre métaux et non-métaux. Cet atome a un rayon de 1,41 Å, et les potentiels d’ionisations successives valent 8,6 eV, 18,6 eV, 25 eV, 48,8 eV, 55,8 eV, 107,5 eV.


Corps simple

Le corps simple, de densité 6,6, est un solide cassant, brillant et gris, qui fond à 630 °C. L’antimoine (comme l’arsenic) a une forme solide cubique, jaune, soluble dans le sulfure de carbone et devenant instable au-dessus de – 90 °C. On obtient alors une forme noire, qui est encore obtenue si la vapeur est condensée rapidement et qui se transforme en antimoine métallique par chauffage. L’antimoine présente donc le phénomène d’allotropie.

La vapeur est formée de molécules Sb4, mais elle contient un fort pourcentage de molécules Sb2, puis de molécules Sb quand la température s’élève vers 2 000 °C.

Comme l’arsenic et le bismuth, l’antimoine brûle dans l’air. Il est attaqué par l’acide nitrique, mais non par l’acide chlorhydrique ou l’acide sulfurique dilué. Il réagit avec des métaux.

L’antimoine est extrait de la stibine par un grillage suivi d’une réduction, par le carbone, de l’oxyde Sb2O3 ainsi formé.


Principaux dérivés

Dans ce domaine encore, l’antimoine manifeste des propriétés intermédiaires entre celles de l’arsenic et celles du bismuth, le caractère métallique allant en augmentant de l’arsenic au bismuth.

Ainsi, l’hydrure d’antimoine SbH3 se prépare comme l’hydrure d’arsenic AsH3, par réduction de l’oxyde M2O3 (où M représente l’arsenic ou l’antimoine) par l’hydrogène naissant, alors que l’hydrure de bismuth BiH3 ne peut être ainsi obtenu. L’hydrure d’antimoine est moins stable que AsH3, mais plus que BiH3, que l’on ne parvient même pas à isoler.

Les trihalogénures d’arsenic, d’antimoine et de bismuth MX3 sont connus. Seuls quelques pentahalogénures MX5 existent avec l’arsenic et l’antimoine combinés aux plus électronégatifs des halogènes : fluor et chlore. SbCl5 évolue facilement en SbCl3. Ces dérivés sont hydrolysables. Par exemple,
SbCl3 + H2O ⇄ SbOCl + 2 HCl
(SbOCl est le chlorure d’antimonyle).

On connaît les oxydes Sb2O3 et Sb2O5, mais aucun acide oxygéné dérivant de l’antimoine n’a été isolé, et seuls des sels correspondants sont connus ; c’est le cas d’antimonites tels que NaSbO2, qui est peu soluble dans l’eau et qui est un réducteur plus énergique que les arsénites alcalins. Sb(OH)3 est un hydroxyde amphotère plus basique qu’acide. Il existe aussi des antimoniates et en particulier certains sels appelés ordinairement pyroantimoniates ou métaantimoniates qui ont une formule et une structure contenant le groupement Sb(OH)6 ; ainsi, le pyroantimoniate de sodium est écrit Na[Sb(OH)6].

Il existe des sels complexes tels que (NH4)2SbBr6, qui a la structure du sel K2PtCl6. Signalons également divers dérivés organiques : les stibines (R)3Sb et les halogénostibines RSbX2 et (R)2SbX (R représente un radical hydrocarboné). Les stibines et les halogénostibines additionnent molécule à molécule des éthers halohydriques en donnant toute une série de sels tels que
R2SbX3 [R2SbX2+, X]
ou
R4SbX2 [R4Sb+, X].

On a réussi à préparer quelques hydroxydes de stibonium quaternaire (R4)SbOH, des oxydes de stibine (R3)SbO. On connaît des acides stiboniques RSbO3H2 et des acides stibiniques R3SbO2H.

On utilise l’antimoine dans des alliages avec le plomb, l’étain et le cuivre, et l’oxyde intervient dans la confection d’émaux et de pigments. L’émétique tartare, qui eut un certain usage en médecine comme vomitif, est un tartrate d’antimonyle.

H. B.

 C. Y. Wang, Antimony, its Geology, Metallurgy, Industrial Uses and Economics (Londres, 1952).

Antioche

V. de l’ancienne Syrie du Nord, fondée par Séleucos Ier Nikatôr au lendemain de sa victoire d’Ipsos sur Antigonos Monophtalmos, en 301 av. J.-C. Aujourd’hui Antakya (66 000 hab.), en Turquie.



Avant les Romains

Antioche a été construite entre le fleuve et la montagne du Silpios ; la plaine s’étend sur l’autre rive, vers le nord-ouest et les contreforts du Taurus. Elle est située dans une région de passage : c’est par là qu’on aborde la Syrie, après avoir, à Issos, comme Alexandre le Grand, évité la chaîne du Taurus en longeant la mer, puis franchi le Kızıl Dağ à Belen ; l’Oronte permet le passage du nord au sud ; un défilé entre les collines du Nord syrien a toujours servi à la route de l’Est, vers Alep, Harran, l’Euphrate et l’Asie. Ainsi s’explique le rôle commercial et civilisateur d’une ville qui devait être pendant deux siècles et demi capitale du royaume séleucide*, puis, jusqu’à l’arrivée des Arabes, capitale de la province romaine de Syrie. Antioche était avec Alexandrie*, puis avec Constantinople*, une des grandes métropoles de l’Orient.

Dès sa fondation, la ville avait reçu, selon l’usage séleucide, un plan systématique, un quadrillage orienté N.-O.-S.-E. à partir de l’axe de la plaine, marqué par la rue principale. L’époque augustienne verra une réorganisation de son urbanisme, qu’il faudra reprendre largement à la suite des tremblements de terre de 115, de 458 et de 526. Au cours de toutes ces réfections, le canevas hellénistique fut à peine modifié, et il reste aujourd’hui déchiffrable sur les photographies aériennes et les plans cadastraux.

Point de rencontre entre l’Orient et l’hellénisme dans les domaines de la langue, de la culture et de la religion, Antioche groupait une population bariolée, turbulente et frivole, pour laquelle les fêtes religieuses étaient prétexte à des spectacles licencieux, en particulier au bois de Daphné, que les Anciens associaient à Antioche dans sa réputation équivoque.

Révoltée contre Démétrios II en 129 av. J.-C., Antioche subit un châtiment exemplaire. En 83 av. J.-C., les habitants attirèrent Tigrane, l’ennemi de leur souverain, et, en 65 av. J.-C., ils essayèrent de détrôner Antiochos XIII. L’année suivante, quand Pompée conquit la Syrie, Antioche passa sous la domination romaine, mais en qualité de cité libre.