Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

marée

Déformation périodique, d’origine gravitationnelle, affectant l’hydrosphère et présentant le caractère d’un mouvement oscillatoire du niveau marin résultant de l’attraction différentielle de la Lune et du Soleil sur les particules liquides des océans.


Le phénomène, qui est le plus aisément accessible sous cet aspect, se rencontre en réalité dans tout l’Univers, déformant plus ou moins tous les corps célestes, planètes, étoiles et galaxies.

Si deux corps sont suffisamment isolés dans l’espace pour être soustraits à l’influence de toute autre masse et que l’on fixe l’un d’eux, l’autre gravite autour du premier comme s’il était lui-même réduit à un simple point matériel placé en son centre de masse et affecté de toute sa masse. Mais, dans le corps réel, une particule quelconque ne se trouve pas au centre de masse, et l’accélération que lui communique le corps central diffère légèrement en grandeur et en direction de celle qui s’exerce sur le centre de masse. Si cette particule n’est pas liée rigidement au centre de masse, cette action différentielle tend à déplacer la particule et, comme le phénomène intéresse toutes les particules du corps, celui-ci se déforme. La partie qui fait face au corps central est plus attirée que le centre de masse, tandis que la partie opposée l’est moins, de sorte que le corps tend à s’allonger plus ou moins dans la direction du corps central et dans la direction opposée. Les actions étant mutuelles, le corps central éprouve une déformation analogue. Un tel phénomène a pu être observé dans quelques cas d’étoiles doubles serrées. On explique de même les allongements très nets constatés dans les couples de galaxies suffisamment rapprochées : un pont tend à s’établir entre elles, et des bras s’étirent du côté opposé.


Les marées du globe terrestre

La Terre comprend deux masses fluides, l’atmosphère et l’hydrosphère, enveloppant l’une et l’autre la partie solide, laquelle présente dans son ensemble une élasticité comparable à celle de l’acier. Il doit donc exister sur la Terre trois espèces de marées, les marées atmosphériques, les marées océaniques et les marées de la partie solide, que l’on appelle ordinairement marées terrestres. Toutefois, l’existence des marées atmosphériques n’a jamais pu être constatée de façon probante.


Force génératrice des marées

La Lune et le Soleil sont les deux seuls astres à considérer, la première en raison de sa proximité, le second en raison de sa masse. Par suite de la faiblesse des dimensions de la Terre comparées à la distance de ces astres, l’écart entre les actions newtoniennes exercées par chacun d’eux sur le centre de la Terre et sur un point de sa surface a un caractère différentiel, et la force qui engendre les marées est inversement proportionnelle au cube de la distance de l’astre considéré. Bien que cette force soit proportionnelle à la masse de l’astre, l’effet de distance est tellement prépondérant que l’action du Soleil n’atteint pas la moitié de celle que la Lune exerce. Les effets des deux astres se superposent et leur résultante constitue la force génératrice luni-solaire. Ces effets sont de l’ordre du dix-millionième de l’accélération de la pesanteur ; la composante verticale de la force génératrice fait varier très légèrement l’intensité de la pesanteur, et la composante horizontale altère sa direction d’un angle qui est de l’ordre du centième de seconde sexagésimale (0,01″).


Périodicités de la force génératrice

La force génératrice exercée par un astre en un point de la Terre varie sous l’effet des deux mouvements qui font varier en ce point la direction et la distance de l’astre, c’est-à-dire la rotation terrestre et le mouvement orbital de l’astre.

La rotation terrestre a une périodicité diurne, mais, dans le cas particulier où l’astre est dans le plan de l’équateur terrestre, la symétrie du champ de force associé à l’astre, par rapport à un plan diamétral de la Terre perpendiculaire à la direction de l’astre, crée une périodicité semi-diurne qui, compte tenu du mouvement orbital de l’astre, est de 12 h 25 dans le cas de la Lune, de 12 h dans celui du Soleil.

En dehors de ce cas exceptionnel, le phénomène est quelque peu perturbé, mais, comme la déclinaison de l’astre reste toujours inférieure à 28°, il apparaît seulement dans le schéma semi-diurne une inégalité diurne qu’on interprète comme la superposition d’une action diurne à l’action semi-diurne.

Le mouvement orbital de l’astre introduit des inégalités déclinationnelles d’une période d’environ deux semaines pour la Lune et de six mois pour le Soleil, ainsi que des inégalités parallactiques de périodes doubles. Combinées avec la rotation terrestre, ces inégalités correspondent à de petites composantes de la force génératrice, dont les périodes diffèrent légèrement d’un jour ou d’un demi-jour de l’astre.

Les termes à longue période qui subsistent sont également très faibles.


Les marées de l’hydrosphère


Principales composantes de la marée

Les oscillations du niveau de la mer ont été remarquées dès l’Antiquité, et elles sont restées pendant très longtemps l’unique manifestation connue du phénomène des marées. Leur rattachement au principe de la gravitation universelle a permis de définir quantitativement l’action du Soleil et de la Lune sur les particules liquides des océans.

Pour établir le mécanisme de cette action, on considère que chaque composante périodique de la force génératrice suscite une marée partielle de même période, et l’on admet que la marée totale est la superposition de toutes les marées partielles, qu’on appelle aussi ondes, ou composantes.

Comme les bassins océaniques sont des systèmes mécaniques qui ont des périodes propres d’oscillation, une force périodique extérieure peut y entretenir des oscillations forcées de même période qu’elle, mais l’amplitude et la phase de ces oscillations dépendent essentiellement des conditions mécaniques du système ; il peut même se produire des phénomènes analogues à des résonances. Cette théorie dynamique s’applique aux composantes les plus importantes des marées, tandis que les ondes à longue période, qui n’ont qu’une faible amplitude, sont régies par une théorie statique qui permet d’obtenir les phases, mais qui ne fournit les amplitudes qu’à un facteur constant près.