Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Antigonides (suite)

Le règne d’Antigonos Gonatas

Antigonos (roi de 276 à 239 av. J.-C.) réorganise la puissance macédonienne. Il sait limiter ses ambitions, au contraire de ses prédécesseurs. Il refuse de s’occuper des affaires de Thrace, bien que le royaume soit vacant, et le laisse aux Séleucides, mais il réunifie la Macédoine.

Cependant, Antigonos doit se battre contre le roi d’Épire Pyrrhos, qui, à son retour d’Italie, avait envahi son royaume ; il réussit à se débarrasser de lui. La défaite et la mort de l’Épirote à Argos (272) lui permettent de régler à sa guise les affaires de Grèce : il possède Corinthe, pu il installe son frère Cratère ; à Élis et à Megalopolis, il favorise la mise en place de gouvernements philomacédoniens ; son influence est néanmoins limitée par la ligue Étolienne, qui s’est étendue à toute la Grèce centrale et qui coupe les communications terrestres entre la Macédoine et l’isthme.

Néanmoins, la puissance des Antigonides s’affermit peu à peu. Ptolémée II ligue contre eux des États péloponnésiens, Sparte et Athènes dans la guerre chrémonidéenne (267-262), mais Antigonos riposte en menaçant les possessions ptolémaïques en Égée et impose la paix au Lagide et à ses alliés. (C’est à cette époque qu’Athènes perd sa liberté et doit subir l’occupation macédonienne.) On peut ainsi considérer qu’en 262 la Macédoine a retrouvé la puissance qui était la sienne sous Philippe II.

Antigonos réorganise l’État et évite de choquer ses sujets en adoptant sans nuances les habitudes des dynasties voisines : il n’instaure pas de culte royal mais, habilement, favorise le culte du dieu Pan, auquel il lui sera relativement facile de s’assimiler.

Le roi n’a pas supprimé l’assemblée de l’armée, mais aucune réunion, pourtant, ne se tient sous son règne ; en fait, il dirige seul le pays ; les « amis » réunis en conseil ne sont que des aides. Le territoire macédonien est divisé en districts, qui peuvent porter le nom de la ville principale ; on ne voit pas apparaître à leur tête des fonctionnaires spécialisés, mais nous connaissons des « épistates », à qui le roi donne à diriger une cité ou un groupe de cités. Il est, néanmoins, difficile d’apprécier le degré véritable de dépendance des cités à l’égard du roi. L’organisation des impôts est mal connue ; en tout cas, bien que le pays s’enrichisse, le trésor macédonien ne sera jamais aussi bien rempli que celui des Syriens.

À la tête des provinces extérieures ou des marches du royaume, le roi place ses « stratèges », dont dépendent les troupes d’occupation ou de surveillance : le stratège de Corinthe est un homme extrêmement puissant (Cratère fut une sorte de vice-roi) ; on trouve aussi des stratèges au Pirée, en Eubée, en Péonie. Le régime imposé aux États vassalisés par les Macédoniens est assez strict, puisqu’on voit disparaître tous les monnayages autonomes dans leur mouvance (sauf ceux d’Athènes et de Corinthe, places commerciales d’une telle importance internationale qu’il était impossible d’arrêter, sans provoquer de crise, leurs émissions).

La fin du règne d’Antigonos est marquée par de graves revers : Alexandre, fils du stratège de Corinthe, se révolte et se proclame roi (v. 250) ; Aratos de Sicyone, qui domine alors la ligue Achéenne, s’allie à lui ; Athènes fait aussi défection. Alexandre meurt rapidement, et, si Antigonos peut rétablir tant bien que mal la situation, il ne sait pas (il faut peut-être accuser son âge) s’opposer de façon vigoureuse au développement de la ligue Achéenne.


Les successeurs d’Antigonos

La Macédoine, sous les règnes de Démétrios II (roi de 239 à 229) et Antigonos II Dôsôn (roi de 229 à 221), va donc vivre des jours difficiles ; pourtant, ce dernier saura servir avec éclat sa puissance. Il organise en Grèce (224-223) une nouvelle alliance hellénique, dont il prend le titre d’hêgemôn : chacun des États membres (Achaïe, Épire, Acarnanie, Béotie, Eubée, Thessalie, Macédoine même, associée à la ligue indépendamment de son roi) conserve son autonomie interne ; la ligue délègue à un conseil de l’alliance des députés qui ont pour fonction de mettre au point des propositions d’action, les instances supérieures de chacun des États alliés étant seules compétentes pour les accepter ou les refuser. Cette organisation est originale, mais, respectant trop l’autonomie de ses membres, elle ne peut durer.

Le jeune roi Philippe V (roi de 221 à 179) doit faire face à des difficultés de tous ordres ; les grands, appuyés par des soldats révoltés, s’opposent au roi, qui sera vainqueur et fera reconnaître le caractère absolu de son pouvoir.

Philippe est même assez fort pour imposer aux Étoliens la paix de Naupacte (217), qui met un terme à la dure guerre des alliés, et pour se lancer dans la lutte contre les Romains, qui ont pris pied en Illyrie depuis 229. Il signe en 215 une alliance avec Hannibal, dont les premiers succès sur Rome semblent promettre une victoire rapide dans la guerre menée par Carthage en Italie, provoquant ainsi la première guerre de Macédoine (216-205). Malheureusement pour lui, ses alliés grecs, entraînés dans l’affaire, regimbent. Le roi de Macédoine est obligé de limiter l’autonomie des cités amies ; les incidents se multiplient, et la popularité du souverain en souffre. Les Étoliens vont jusqu’à signer une alliance avec Rome (212), qui ne pourra d’ailleurs pas pousser la guerre avec assez de vigueur ; on s’acheminera donc vers un compromis en 205 (paix de Phoinikê).

La trêve est brève : Philippe V, allié aux Séleucides, mène une politique active en Égée ; Rhodes et Pergame s’inquiètent et demandent aux Romains d’intervenir. Rome accepte d’autant plus volontiers que la guerre avec Carthage est terminée et qu’il est difficile de démobiliser des soldats dont beaucoup ont perdu leurs propriétés, ravagées par les armées d’Hannibal. La deuxième guerre de Macédoine (200-196), menée avec énergie par T. Quinctius Flamininus, se termine par la bataille de Cynoscéphales, où, servie par la chance, la légion romaine, plus mobile, fait voler en éclats la phalange macédonienne (juin 197). La paix alors signée exclut la Macédoine de la Grèce et enferme dans des limites exiguës l’activité des Antigonides ; ceux-ci sont invités à agir plutôt dans les Balkans, où s’agitent des Barbares qui, sans leur intervention, pourraient descendre vers le sud.