Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Mans (Le) (suite)

L’histoire du Mans

Sous le nom de Vindinum, Le Mans était avant la conquête romaine la capitale des Cenomani (Cénomans), un des peuples de la grande tribu des Aulerques. C’est durant la période gallo-romaine qu’il prit le nom du peuple, bientôt transformé en Le Mans ; il avait alors une grande importance si l’on en juge par les vestiges des remparts et des tours de cette époque.

Le christianisme y fut prêché au iiie-ive s. par saint Julien. Conquise par les Armoricains en 486, puis par le chef franc Rigomer, la ville fut prise en 510 par Clovis Ier. Sous les Carolingiens, Bretons et Normands la ravagèrent. Au Moyen Âge, les comtes du Maine dépossédèrent peu à peu les évêques de leurs pouvoirs ; ceux-ci s’unirent contre eux avec les habitants lorsque, au xie s., ils désirèrent une charte communale.

Malgré la révolte des Manceaux en 1066, qui mirent à profit le départ de Guillaume Ier le Conquérant pour l’Angleterre, la ville resta sous la domination des rois normands d’Angleterre et passa ensuite dans le domaine des Plantagenêts. Henri II y naquit. Si Philippe II Auguste conquit tout le comté du Maine, il laissa la ville à la reine Bérengère, femme de Richard Ier Cœur de Lion. Durant la guerre de Cent Ans, la cité fut assiégée à diverses reprises.

Le Mans ne revint à la couronne de France qu’en 1481, sous le règne de Louis XI. En 1589, Henri IV s’empara de la ville, qui avait auparavant embrassé le parti de la Ligue. Capitale du gouvernement du Maine sous les Bourbons, la cité fut le théâtre, durant la Révolution, d’une sévère défaite des vendéens. L’armée catholique et royale, composée de 70 000 hommes, mais seulement de 15 000 combattants, s’était emparée du Mans le 10 décembre 1793. Trois jours après, elle en fut chassée par Marceau et Westermann, et laissa 5 000 morts sur le terrain.

Durant la guerre de 1870, le général Chanzy, qui commandait la IIe armée de la Loire, fit du Mans le centre de ses opérations. Sa défaite des 10-12 janvier 1871 par les troupes allemandes du prince Frédéric-Charles rendit impossible la délivrance de Paris.

P. P. et P. R.

Y. B.

➙ Loire (Pays de la) / Maine / Sarthe.

 R. N. Raimbault, Le Mans au fil des ans (Hirvyl, Angers, 1941). / J. Gouhier, Naissance d’une grande cité : Le Mans au milieu du xxe siècle (A. Colin, 1953).


L’art au Mans

De l’époque romaine demeurent maints vestiges et surtout une partie imposante de l’enceinte de la fin du iiie s., avec ses tours cylindriques, ses poternes, ses murs à décor géométrique et polychrome, qui englobent dans un périmètre presque rectangulaire la majeure partie de la ville médiévale, dominée par la silhouette de la cathédrale Saint-Julien. En fait, la première cathédrale devait être beaucoup plus petite pour tenir dans l’enceinte, et le chœur gothique se situe au-delà. Les reconstructions furent nombreuses, et l’édifice en porte la trace. La partie conservée la plus ancienne, dont la façade, remonte à la fin du xie s. Après l’incendie de 1134, la plus grande partie de la nef fut reconstruite, et consacrée en 1158. De cette époque datent le vitrail de l’Ascension, très belle œuvre de la peinture romane, et le portail sud, dont les sculptures (Christ en majesté du tympan, apôtres du linteau, statues-colonnes des ébrasements) rappellent l’art du portail Royal de Chartres. Le chevet appartient à l’art gothique du xiiie s. Son maître connaissait les grands chantiers des cathédrales de Bourges et du nord de la Loire, mais il a heureusement innové en projetant, au-delà des deux déambulatoires d’inégale hauteur, une ample couronne de profondes chapelles dont l’écartement a engendré un système d’arcs-boutants très original, se divisant en deux branches comme un Y. Les verrières des chapelles ont souffert des destructions des huguenots, mais il en subsiste plusieurs, dont celle des Miracles de la Vierge dans la chapelle d’axe. Les vitraux des fenêtres du déambulatoire intérieur et des fenêtres hautes sont mieux conservés et datent pour la plupart du milieu et de la seconde moitié du xiiie s. Après le chevet, on reprit le transept, et les gros travaux s’arrêtèrent au xive s.

Deux autres églises illustrent l’architecture médiévale au Mans : Notre-Dame-du-Pré et Notre-Dame-de-la-Couture. Notre-Dame-du-Pré a été élevée dans l’ancien cimetière romain, de l’autre côté de la Sarthe, au-dessus des restes de saint Julien. Son chevet à déambulatoire et à chapelles rayonnantes, de la fin du xie s., rappelle celui de Notre-Dame-de-la-Couture et les premiers édifices romans de la vallée de la Loire. Sa nef, un peu plus tardive, n’a été voûtée qu’au xve s., et la façade est moderne. À Notre-Dame-de-la-Couture, le chœur s’élève au-dessus d’une crypte voûtée d’arêtes, et les chapelles rayonnantes ont été altérées. La nef, divisée en trois travées carrées, a été couverte, dans la seconde moitié du xiie s., de voûtes bombées à liernes de type angevin. Un portail de la fin du xiiie s., sculpté d’un Jugement dernier, se dresse à l’ouest entre les tours. Une porte de style flamboyant, une Vierge sculptée par Germain Pilon, des tableaux des xviie et xviiie s. ornent par ailleurs cet édifice. L’art médiéval est encore rappelé au Mans par la chapelle de l’ancien hôpital de Coëffort, aujourd’hui église Sainte-Jeanne-d’Arc, qui montre la persistance de l’influence angevine au xiiie s., par quelques vieilles maisons, comme celle dite « de la Reine-Bérengère », et par les collections du musée de Tessé, où, à côté de peintures siennoises du xive s. et d’œuvres plus récentes, est conservée la plaque émaillée, sans doute funéraire, de Geoffroi Plantagenêt, comte du Maine, mort en 1151 ; mais le château des comtes a disparu, remplacé à la fin du xviiie s. par l’actuel hôtel de ville.