Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Mammouth (suite)

On connaît de très nombreuses représentations de Mammouths préhistoriques, surtout magdaléniennes : le Mammouth gravé sur ivoire de La Madeleine (Dordogne) découvert par Lartet (1801-1871) en 1865 est particulièrement célèbre, car cet objet démontrait que l’Homme avait été contemporain du Mammouth. On a relevé des dessins de Mammouths, notamment dans les grottes de Font-de-Gaume, des Combarelles, de Bernifal (en Dordogne), de Pech-Merle (dans le Lot) et tout récemment (1956) dans une grotte de la Dordogne (Rouffignac) : les représentations de Mammouths de cette dernière grotte ont été très discutées, mais paraissent bien être authentiques.

Il existe une certaine ambiguïté dans le terme Mammouth. Ainsi, le Mammouth américain, bien que récent, n’est pas un Mammouth, mais un Mastodon (Mastodon americanus). De même, on réunit souvent dans un groupe Mammuthus diverses espèces de Proboscidiens plus proches du Mammouth que de l’Éléphant d’Asie et de l’Éléphant d’Afrique (Elephas meridionalis, E. planifrons, E. trogontherii, etc.).

J.-P. L.

 H. F. Osborn, Proboscidea. A Monograph of the Discovery, Evolution, Migration and Extinction of the Mastodonts and Elephants of the World (New York, 1936 ; 2 vol.). / C. Dechaseaux et R. Vaufrey, « Proboscidiens », et J. Piveteau, « Représentation de Proboscidiens dans l’art du Paléolithique supérieur » in J. Piveteau (sous la dir. de), Traité de paléontologie, t. VI, vol. 2 (Masson, 1958). / J. Augusta, A Book of Mammoths (Londres, 1963). / A. Leroi-Gouhan, Préhistoire de l’art occidental (Mazenod, 1965).

Man ou Mann (Mendel)

Écrivain d’expression yiddish (Płońsk, au nord de Varsovie, 1916 - Paris, 1975).


Issu d’une lignée de paysans juifs établis au début du siècle dans la région de Płońsk, il passa les années de son enfance à Sochochin, village des environs.

Il suivit les cours d’une école polonaise. Ses dons de peintre le firent entrer à l’école municipale des beaux-arts de Varsovie. Mais, dès 1938, il publia des poèmes dans Literarishe Bleter de Varsovie.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, il se réfugia en U. R. S. S. et fut mobilisé dans l’armée rouge : il participa à la défense de Moscou, au siège de Varsovie et à la prise de Berlin. Démobilisé, il rejoignit la Pologne, où il dirigea le service des écoles du « Comité juif ». En 1945, il publia un recueil de poèmes et de ballades, Le silence exige, premier ouvrage en yiddish édité dans la Pologne libérée. L’été 1946, après le pogrom de Kielce, il abandonna la Pologne pour Israël, via l’Allemagne.

Il s’installa au village de Yasur et décrivit la réalité israélienne naissante ; en 1954, il s’établit à Tel-Aviv, où il exerça les fonctions de secrétaire de rédaction de la Goldene Keyt, revue littéraire et culturelle en yiddish. Depuis 1961, il vit en France, où son œuvre fut traduite en français à l’instigation de Manès Sperber : le Village abandonné, 1954 ; Aux portes de Moscou et la Chute de Berlin, 1959 ; les Plaines de Mazovie, 1962 ; le Chêne noir et Autoportrait, 1969 ; les Gens de Tiengouchaï, 1970. Depuis 1968, il est rédacteur en chef du quotidien yiddish Unzer Wort.

L’œuvre de Man est celle d’un peintre qui décrit à la fois les paysages intérieurs et extérieurs : son écriture est peinture de fresques, de miniatures de tableaux bucoliques, mais cette peinture est tout empreinte d’un naturalisme lyrique comme si le réel n’était que figure, le symbole ne devenant qu’image, l’abstrait palpable.

A. D.

mana

Puissance diffuse supposée dans certains objets ou certains êtres dans les civilisations préindustrielles.


Un projet systématique d’explication à partir d’analogies préside, au début du xxe s., aux développements de notions comme celle de mana, dont on suppose alors, en raison d’une certaine généralité du signifié perçue à travers des signifiants divers dans de multiples cultures, qu’elles doivent traduire l’origine universelle des croyances primitives ou représenter des catégories essentielles de l’esprit humain. Les spéculations sur l’essence du sacré apparaissent sous-jacentes à cette démarche plus philosophique qu’ethnologique, dont l’un des principaux défauts consiste à ne pas serrer d’assez près les données concrètes ou bien à les interpréter hors de leur complexe culturel d’origine. Tel est le propre d’une science encore jeune d’accentuer des significations pour donner l’illusion d’une cohérence de l’explication ou d’infléchir plus ou moins intentionnellement les données afin de justifier des thèses insuffisamment mûres. À l’inventaire complet des emplois de termes crus analogues dans des contextes culturels différents, il aurait fallu ajouter une démarche comparative qui non seulement souligne les convergences de significations, mais aussi insiste sur les éventuelles divergences.

Quoi qu’il en soit, la découverte de la notion de mana a constitué un événement historique en anthropologie par les recherches et les débats quelle a suscités depuis que le missionnaire R. H. Codrington (1830-1922) l’a révélée dans une lettre au professeur Max Müller (1823-1900), qui la mentionne en 1878. Dans son livre classique sur les Mélanésiens, Codrington s’exprime de la sorte : « Le Mélanésien a l’esprit absolument hanté par la croyance à une puissance surnaturelle dont le nom est presque partout mana. C’est le mana qui opère tout ce qui excède les facultés normales de l’homme et les voies ordinaires de la nature ; il est présent dans l’air et l’ambiance, il s’attache aux personnes et aux choses, et il se manifeste par des effets qu’il est impossible d’imputer à d’autres qu’à lui. Celui qui est entré en sa possession peut s’en servir à sa guise et le diriger, mais sa force peut aussi exploser en un point nouveau ; on décèle sa présence par une épreuve. [...] Mais cette puissance, tout en étant elle-même impersonnelle, est toujours liée à une personne qui la dirige ; les esprits l’ont toujours, les âmes des morts l’ont le plus souvent, enfin quelques hommes aussi la possèdent. »