Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Malaysia (suite)

Deux plaines côtières bordent la zone montagneuse. La plaine occidentale est large (30 km en moyenne et 65 km au maximum) et presque continue ; les alluvions sont épaisses. La plaine orientale est, en réalité, une série de deltas et de petites plaines que séparent des hauteurs : deltas et plaines présentent en bordure de mer des cordons littoraux bas (permatang), séparés par des marécages.

La péninsule est une portion du « pseudo-socle de la Sonde » (v. Asie de la mousson) ; elle a été plissée pour la dernière fois au Jurassique, les plis étant accompagnés de montées granitiques. La trace des plis se marque encore fortement dans le relief, mais les chaînes sont dues essentiellement à des failles tertiaires.

La péninsule, au climat constamment chaud et humide malgré des nuances régionales, est forestière. La forêt dense ombrophile couvre 60 p. 100 du pays. La mangrove est continue sur la côte ouest, où elle peut atteindre 20 km de large ; elle occupe les embouchures de toutes les rivières orientales ; lui succède sur de vastes superficies l’arrière-mangrove à Gelam (Melaleuca leucodendron).

Toutes ces conditions difficiles expliquent que la péninsule soit restée si longtemps peu peuplée, frangée seulement, sur la côte est, de quelques établissements malais.


L’économie

Elle est entièrement, ou presque, à vocation commerciale. Les rizières ne couvrent que 400 000 ha, dans des conditions difficiles : il faut notamment conquérir et défricher l’arrière-mangrove et il est parfois impossible d’utiliser des animaux de trait. Cette culture familiale occupe surtout les deltas et les plaines orientales (notamment le delta de la Kelantan) ainsi que le nord de la plaine occidentale (États de Kedah et de Perlis). Les rendements sont assez bas ; la production atteint 1 Mt. La riziculture témoigne de peu de dynamisme. Les paysans malais petits propriétaires joignent à cette culture celle du cocotier (200 000 ha), celle aussi de l’hévéa (en culture de jardin), saigné quand les cours sont élevés. La pêche maritime (à la senne) est active, et le paysage des kampongs rappelle celui des villages thaïlandais ou cambodgiens.

L’hévéa, seul, couvre 1 400 000 ha (près des deux tiers de la superficie cultivée). Avec 1,4 Mt, la péninsule est de loin le plus grand producteur mondial. L’hévéa est cultivé en plantations (estates) de plus de 40 ha, en petites exploitations (small holdings ou farms) ou en cultures de jardin. Plus de 2 000 estates couvrent près de 800 000 ha (plus de la moitié de la superficie plantée) ; les deux tiers des estates ont de 40 à 200 ha, appartenant à des Européens, des Chinois, des Indiens ; les estates de plus de 400 ha appartiennent surtout à des sociétés européennes. Dunlop et London Asiatic ont chacune environ 40 000 ha. Environ 90 000 petites exploitations occupent 600 000 ha. Les trois quarts ont moins de 4 ha. La moitié appartiennent à des Malais. La culture commença en 1890 et prit un grand essor dès 1910. La Malaisie est le plus ancien producteur de caoutchouc. La superficie cultivée atteignait 900 000 ha en 1920. Elle était de 1 300 000 ha en 1937, les small holdings s’étant développés dans l’intervalle. L’hévéaculture est localisée sur la côte occidentale de la Malaisie, d’abord entre la Selangor et la Muar (c’est la Southern Zone, la plus importante), en partie dans le nord de Perak et le sud de Kedah (Northern Zone). Pourtant, ici, la topographie et les sols ne sont guère propices. Les plantations s’étendent partiellement sur des terrains marécageux, ayant nécessité d’importants travaux de drainage, et aussi sur les bas versants de la Main Range (jusqu’à 400 m), où la circulation est difficile et où des terrassements ont été parfois imposés. Les terroirs sont peu fertiles, très argileux, en partie basse, ferralitiques sur les versants.

Initialement, la région était très insalubre, et ce sont des raisons historiques qui expliquent cette localisation : dans l’ouest de la péninsule existait déjà un réseau routier et ferroviaire, mis en place pour l’extraction, beaucoup plus ancienne, de l’étain. Dans les small holdings et les farms, surtout nombreux dans le Sud, les arbres sont beaucoup plus serrés qu’en plantation (jusqu’à 1 000 arbres à l’hectare) ; le bananier, le manioc, l’ananas s’y mêlent en cultures intercalaires. La saignée est surtout active en période de hauts cours. Les procédés de transformation sont archaïques (coagulation du latex, séchage de feuilles à la fumée ou même au soleil). Le produit obtenu, bon marché, mais de qualité moyenne, doit être de nouveau usiné à Penang ou à Singapour. Les arbres trop âgés sont remplacés par des clones à haut rendement à raison de 48 000 ha par an ; en 1970, 63 p. 100 des small holdings disposent de ces clones.

À l’hévéa, il faut ajouter les cultures de l’ananas (85 000 ha et 340 000 t), surtout dans le Johore, et de l’elæis (palmier à huile ; 60 000 t de noix de palme et 260 000 t d’huile).

L’autre grande production commerciale est l’étain (76 000 t). Les mines se trouvent sur la côte ouest, d’abord à proximité de Kuala Lumpur, mais surtout dans la moyenne vallée de la Kinta, aux environs d’Ipoh, dans un paysage karstique typique. L’exploitation porte presque exclusivement sur des dépôts alluviaux. La teneur est souvent faible. La principale raffinerie d’étain se trouve à Penang. La main-d’œuvre est surtout chinoise. La Malaisie est de loin le premier producteur mondial. Mais les réserves ne sont pas énormes et les difficultés de commercialisation sont nombreuses.

L’extraction du minerai de fer est plus récente. Les principales mines se localisent sur la côte orientale ; 6 Mt d’un minerai à haute teneur (50 à 68 p. 100) sont, en quasi-totalité exportées, destinées à la sidérurgie japonaise, qui a été d’ailleurs à l’origine de l’extraction du minerai.

L’hévéaculture et la production stannifère sont responsables d’une très inégale répartition de la population (l’Ouest est la région la plus peuplée). Elles expliquent aussi, mais avec l’existence d’une très forte minorité chinoise, l’importance de la population urbaine ; 35 p. 100 de la population vivent dans près de cent villes de plus de 5 000 habitants. L’Ouest a un réseau urbain bien organisé et desservi par d’excellentes routes. Il n’y a pas de très grande ville. Sur la côte, à Malacca (70 000 hab.), aujourd’hui bien déchue, il faut opposer Port Swettenham, au débouché de la Klang, reliée à Kuala Lumpur par route et voie ferrée et qui, en pleine expansion, concurrence Singapour pour le commerce extérieur de la Malaysia et surtout George Town (235 000 hab.), dans l’île de Penang, très active (fonderie d’étain, usinage du caoutchouc), à la population très bigarrée (majorité de Chinois). À l’intérieur, Ipoh (126 000 hab., majorité chinoise aussi) est le grand centre d’exploitation de l’étain. Kuala Lumpur (800 000 hab.) est la capitale de la Malaysia. Ancien centre minier (fondé vers 1860), centre de l’hévéaculture, Kuala Lumpur doit son essor actuel à son rôle politique depuis 1948 quand elle devint capitale de la fédération. Ville refuge lors des troubles de 1949-1955, elle reçut alors nombre de réfugiés misérables. La ville est établie sur trois collines que séparent des fonds restés inoccupés. L’élément chinois est majoritaire et domine l’activité économique (les deux tiers des Chinois sont nés en Malaisie). Les Indiens (17 p. 100, avec une énorme prédominance masculine) assurent notamment les transports. Les Malais (15 p. 100) sont employés dans l’administration, la police et l’armée. Il tend toutefois à se constituer une nouvelle classe dirigeante de hauts fonctionnaires malais et de riches Chinois, vivant à l’européenne, avec les Européens, et ayant créé un nouveau monde culturel très occidentalisé, indépendant des origines ethniques.