Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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machinisme agricole (suite)

Les choux pommés et les laitues posent avec acuité le problème d’échelonnement des maturités. On s’est donc contenté longtemps, comme dans les vignobles, de mécaniser la manutention au champ par tapis convoyeurs mobiles. Des prototypes existent pour la récolte totale, mais sur des variétés à maturité presque simultanée (choux). La machine élimine les feuilles externes quand le légume est encore en terre. Le dispositif de coupe est du type scie à ruban. Sur les laitues, on n’obtient guère plus de 30 p. 100 de maturité simultanée : la mécanisation est donc très délicate, et les Américains expérimentent des machines électromécaniques dont les organes de coupe sont déclenchés par des tâteurs sensibles à la grosseur et à la fermeté des laitues.

Pour les choux-fleurs, seule la manutention est mécanisée ; pour les choux de Bruxelles, la récolte est toujours manuelle, seul l’« égrenage » est mécanique (par friction ou par couteaux vibrants, mais à poste fixe).

Donc, à part les épinards, aucun légume à feuilles n’est commodément récolté.

• Légumes en grains ou en gousses : haricots verts, haricots blancs, pois, etc. Avec ces légumes de conserverie, on quitte le domaine du prototype pour atteindre celui des machines couramment utilisées, mais constituant un investissement tel qu’il n’est pas à la portée de l’exploitant. La machine de récolte appartient à la conserverie qui passe un contrat avec l’agriculteur.

Les petits pois en grain se récoltent désormais de plus en plus à la ramasseuse-batteuse automotrice. Après une coupe et un andainage préalables (léger préfanage), l’automotrice ramasse les pois au pick-up et les bat dans un grand cylindre rotatif à mailles en Nylon dans lequel tourne en sens inverse une sorte d’hélice métallique à pales très arrondies. Les pois et les déchets divers sont séparés à l’aide de tapis inclinés et par ventilation. Ces machines extrêmement modernes ont toutes leurs commandes hydrauliques et sont munies de systèmes automatiques de stabilisation. L’investissement est de l’ordre de 200 000 F, et le débit voisin de 0,3 ha/h. Ces machines fonctionnent aussi sur les flageolets.

Pour les haricots verts de type « mange-tout », le problème mécanique est pratiquement résolu, et les marques existantes sont déjà nombreuses. Dans son principe, la récolteuse de haricots verts est simple puisqu’elle comporte : des peignes rotatifs d’axe longitudinal qui arrachent les feuilles et les grappes de gousses (les tiges restent en terre), un système d’égrappage à bandes et à scie circulaire, un système de nettoyage-triage par aspiration et un système de chargement. Après avoir réalisé des machines tractées à 1 ou 2 rangs, on s’oriente maintenant vers des automotrices à 3 ou 4 rangs et à coupe frontale.

Les haricots verts fins, très fragiles et à maturité très échelonnée, ne se récoltent qu’à la main, d’où leur prix très élevé.

• Légumes à tiges comestibles : les asperges. L’asperge blanche, telle qu’on la consomme en France, est très difficile à récolter mécaniquement, car les griffes sont fragiles et les pousses échelonnées. Mais la récolte manuelle constitue une charge énorme : les Américains étudient la récolteuse d’asperges depuis 1956 ! La machine sélective, à l’intérieur de la butte, n’a jamais pu être mise au point, et la machine non sélective à scie à ruban provoquerait des pertes inadmissibles (supérieures à 35 p. 100, soit environ 5 000 F par hectare, de quoi payer de nombreux ouvriers temporaires !).

La consommation d’« asperges vertes » rend possible la mécanisation, car on récolte alors une partie aérienne ; courante aux États-Unis, cette pratique est rare en France, et nous rencontrons là un autre type d’adaptation, celle du consommateur (ce qui n’est pas tellement invraisemblable avec les techniques publicitaires actuelles).

• Un légume-fruit : les tomates. Le problème est presque aussi difficile que pour les asperges blanches ; cependant, il est en voie de résolution sur des variétés adaptées (rondes ou ovoïdes, régulières, fermes). Les machines les plus simples fonctionnent comme des arracheuses-trieuses de pommes de terre : la plante est coupée dans le sol, les tiges sont secouées sur des grilles oscillantes, un tri approximatif est effectué sur une table de visite par des ouvriers portés par la machine. Les Américains, plus ambitieux, étudient une machine sélectionnant les tomates rouges des tomates vertes grâce à des détecteurs photo-électriques.

On pourrait évoquer aussi les récolteuses de melons, de citrouilles, de cornichons, de concombres, etc., qui sont mises peu à peu au point dans différents pays, mais le problème général est sensiblement analogue : il s’agit d’un, problème mécanique, génétique et économique. Il n’est pas douteux que toutes ces productions seront mécanisées dans un avenir très proche, et que les produits non récoltables mécaniquement deviendront des produits de haut luxe. Le palliatif de la main-d’œuvre étrangère ne peut être que très temporaire.


La mécanisation de l’élevage

La mécanisation de l’élevage se développe dans un contexte assez différent de celui des cultures. C’est la grande inconnue des années à venir. Depuis 4 ou 5 ans, en Europe, on pense à diminuer le travail manuel dans les élevages, même dans les élevages bovins, en s’appuyant sur les exemples pris aux États-Unis. Mais cette mécanisation est très lente, car la pesanteur des structures se fait sentir encore bien plus que dans les autres domaines agricoles.

Dans les élevages purement industriels, volailles ou porcs, la mécanisation presque totale existe non seulement aux États-Unis, mais dans de nombreux pays d’Europe. Pour les volailles par exemple, dans les élevages en batteries, la répétition dans la disposition des cages rend assez facile la mécanisation de toutes les opérations : distribution d’alimentation ; nettoyage ; collecte des œufs ; contrôle de l’ambiance.

Dans les élevages de porcs, les grosses unités sont mécanisables sans trop de difficultés. Néanmoins, l’incertitude du marché de la viande de porc rend aléatoire la rentabilité de certaines installations techniquement séduisantes.

Pour les bovins et les ovins, on se heurte à des difficultés techniques, mais surtout économiques. Les grandes unités sont encore très rares en France, et la mécanisation ne peut s’envisager que dans ces grandes unités.

Nous prendrons nos exemples dans les élevages bovins, et plus particulièrement en élevage laitier.

• Généralités. Les éleveurs doivent en même temps faire face à une crise de main-d’œuvre et à une nécessaire intensification.

L’augmentation des effectifs doit pouvoir se faire sans augmentation de main-d’œuvre : il faut donc éliminer les tâches inutiles, simplifier au maximum et mécaniser, voire automatiser.

En élevage laitier, les tâches journalières se situent principalement à quatre niveaux : alimentation ; nettoyage ; collecte du lait ; surveillance des animaux.

Le dernier groupe de tâches ne peut être confié, dans l’état actuel des techniques, qu’à des ouvriers hautement qualifiés.

Pour les autres tâches, on peut envisager l’aide de machines dans le dessein de réduire l’effort physique, de gagner du temps, d’améliorer les performances des animaux par un contrôle plus rigoureux de l’alimentation. Toutes ces machines doivent, en outre, n’apporter aucune perturbation aux animaux eux-mêmes (production et état sanitaire).

• Collecte du lait. La traite est mécanisée depuis le début du siècle. Et pourtant, il n’y a guère en France plus de 16 machines à traire pour 100 vaches (40 pour 100 vaches aux Pays-Bas).

La solution technique qui a prévalu sur les différentes tentatives fait appel à la succion. Mais une succion continue provoque une congestion inadmissible de la mamelle, d’où la généralisation des machines modernes à double chambre et à deux temps. Le vide est produit par une pompe à palettes ou à pistons entraînée électriquement dans la majorité des cas.