Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Lully ou Lulli (Jean-Baptiste) (suite)

L’orchestre prit chez Lully une importance de plus en plus grande. Dans les ballets, il comprenait des violons, des flûtes et des hautbois ; dans la tragédie lyrique s’ajoutaient les bassons, et, dans les scènes de chasse, de bataille, de triomphe, les cors et les trompettes. Après, l’ouverture, qui était — sauf exception — la seule page de musique pure, chaque acte avait ses entrées chorégraphiques et ses symphonies descriptives. Les danses classiques (chaconnes, passacailles, courantes, sarabandes) et les danses nouvelles (menuets, bourrées, gavottes) contribuaient à rehausser l’éclat du spectacle. Dans les symphonies, Lully aimait évoquer la nature ou bien les états d’âme de ses personnages ; il apportait ainsi chaque fois l’élément de réalisme qui séduisait l’auditeur du temps. Il prêta attention au chant des oiseaux (Armide), au bruit du vent (Isis, plainte de Pan ; Bellérophon, scène de la pythie), au soulèvement des flots (Persée), à la tempête (Cadmus, prologue) ; il peignit la fureur de Roland, la sérénité apaisante du sommeil (Atys, Persée, Armide), l’élan du guerrier (Thésée, marche).

La musique religieuse de Lully est, au regard de son œuvre lyrique, peu abondante. Il a laissé vingt-trois motets. Ses grands motets (à double chœur) étaient destinés aux offices solennels. Il y suit, dans l’ensemble, la tradition de ses prédécesseurs, N. Formé et H. Du Mont*. Le Miserere (1664), encore écrit dans le style contrapuntique, est remarquable par sa grandeur tragique. Le Plaude laetare (1668), le Te Deum (1677) et le De profundis (1683) sont plus franchement harmoniques. Dans le Dies irae, Lully fait entendre pour la première fois les violons et les trompettes à l’église. Ses petits motets, de moindre intérêt, sont à trois voix et basse continue.

Lully fut avant tout un homme de théâtre. Durant les trente années où il domina la scène lyrique française, son ascension fut continue. Animé d’une indomptable persévérance, il créa la tragédie chantée, seule forme de l’opéra dont la musique, loin de heurter de front le sentiment national, s’adaptait à la mentalité et à la sensibilité de son public ; bien que formée d’éléments hétérogènes, cette tragédie chantée était parfaitement équilibrée. De caractère monumental, elle faisait sa part au spectacle — ballets, airs, divertissements — et au drame. Malgré la perfection du récitatif, auquel on a pu reprocher sa monotonie, due bien souvent à une imitation par trop fidèle de la déclamation du vers alexandrin, le drame restait sans doute « raisonnable », mais il avait les lignes nobles et précises que seul pouvait lui donner un architecte du Grand Siècle. La dictature exercée par Lully sur le monde musical de son temps, qui, fâcheusement, tint à l’écart un musicien authentique comme M. A. Charpentier*, n’en fut pas moins bénéfique, car elle permit à la musique française de retrouver le prestige qu’elle avait perdu. L’activité que Lully déploya, depuis son arrivée à la Cour jusqu’à sa mort, eut en effet d’importantes conséquences. En faisant travailler tout le personnel de sa troupe, en exigeant de ses musiciens d’orchestre la cohésion et une grande perfection d’exécution, en faisant répéter ses chanteurs, en mettant lui-même ses œuvres en scène, il contribua à former toute une génération d’artistes, qui n’oublia pas ses leçons. Par l’intermédiaire de ses élèves étrangers, l’Anglais Pelham Humfrey (1647-1674), les Allemands Georg Muffat (1645-1704) et Johann Fischer (1646-1716), le Hongrois Johann Sigmund Kusser (1660-1727) et l’Italien Teobaldo di Gatti (v. 1650-1727), son style symphonique se répandit dans toute l’Europe. En Angleterre, H. Purcell* et G. F. Händel*, en Allemagne, J.-S. Bach* et G. P. Telemann* adoptèrent l’ouverture à la française. En France, l’opéra de Lully, qui avait imposé son style au genre et qui fut adopté par les successeurs du compositeur, par J.-P. Rameau* lui-même, demeura au répertoire jusqu’à l’avènement de Gluck*.

A. V.

➙ Académies de musique / Ballet / Livret d’opéra / Opéra / Ouverture / Récit / Récitatif.

 C. Nuitter et E. Thoinan, les Origines de l’opéra français (Plon, Nourrit et Cie, 1886). / E. Radet, Lully, homme d’affaires, propriétaire et musicien (Allison, 1891). / H. Prunières, Lulli (Laurens, 1909) ; l’Opéra italien en France avant Lulli (Champion, 1913) ; la Vie illustre et libertine de Jean-Baptiste Lully (Plon, 1929). / L. de La Laurencie, Lully (Alcan, 1911 ; 2e éd., 1919) ; les Créateurs de l’opéra français (Alcan, 1921 ; 2e éd., 1930). / J. Tiersot, la Musique dans les comédies de Molière (Renaissance du livre, 1922). / E. Gros, Philippe Quinault. Sa vie et son œuvre (Champion, 1927). / E. Borrel, Jean-Baptiste Lully (la Colombe, 1949). / J. Eppelsheim, Das Orchester in den Werken J.-B. Lullys (Tutzing, 1961).

lumière

Ensemble des radiations visibles émises par des corps portés à haute température (incandescence) ou par des corps excités par diverses formes d’énergie (luminescence).


On désigne ainsi les radiations de la gamme des ondes électromagnétiques, entre 400 et 720 nm, qui correspondent à la zone de sensibilité de l’œil humain normal. Cette zone s’adapte assez bien également au spectre de la lumière du Soleil filtrant au travers de l’atmosphère.

La lumière blanche est celle qui est fournie par le corps chaud (ou le Soleil) porté à 6 500 K. Les lumières fournies par des corps chauds à température plus élevée (le ciel bleu, une explosion atomique, etc.) sont dites froides (plus chargées de radiations bleues et violettes) ; les lumières produites par des corps chauds à température moins élevée (filament d’une lampe à incandescence à 3 000 K, coucher du Soleil) sont dites chaudes (plus chargées de radiations orange et rouges). Il y a aussi d’autres moyens de produire de la lumière, telle la photoluminescence, qui est une transformation de longueur d’onde, ou la luminescence provoquée par divers types d’excitations.